Chapitre 5 : La fin d'une époque

31 2 0
                                    

Et voilà, ma valise est bouclée. Je referme la porte de ma chambre à clé avant d'aller voir si Irène a besoin d'aide. Elle est en train de se battre avec ses bagages. Elle s'assoit sur son sac afin de le fermer mais sans succès. Je propose d'enlever des vêtements de ses affaires pour les mettre dans les miennes mais elle ne semble pas m'écouter. Elle est obnubilée par son rangement. C'est à ce moment qu'elle me dit, essoufflée, qu'il faudrait officialiser notre relation au plus vite avant que nos amis ne l'apprennent par quelqu'un d'autre. Will, lui, l'aurait su depuis longtemps ; peut-être même le savait-il déjà avant de partir.

Hum... enfin, je ne suis pas très emballé mais soit. Puisque Von Herder et Albert sont déjà au courant, autant crever l'abcès dès maintenant avec le reste de l'équipe. J'espère que Fred ne va pas m'en vouloir ! Je lui annonçai il y a à peine un mois que j'étais son père et aujourd'hui que je sors avec Bonde. Ça va lui faire un choc ! Mais bon, quand il faut y aller faut y aller !

Une heure plus tard, on réunit toute l'équipe dans le salon de Mme Hudson, notre nouveau logement en attendant d'en trouver un meilleur, qui est partie nous préparer du thé dans la cuisine. Je prend la parole :

Voilà, Bonde et moi avons quelque chose à vous annoncer

Quoi donc ? demande Mycroft

Eh bien, Irène et moi ... comment dire ça simplement ? Nous. dit-je en cherchant mes mots

Soudain, Irène prend mon menton et colle mes lèvres aux siennes. Nous échangeons un baiser devant l'assistance médusée. Elle s'arrête et lance :

Voilà, c'est plus clair, non ! Sebastian et moi sortons ensemble.

Wouah, quelle grande surprise ! s'exclame Fred ironiquement. Il n'a pas l'air choqué et c'est tant mieux.

On ne peut en dire autant de Mme Hudson qui, nous voyant, a lâché le plateau de thé et est tombée à la renverse. On l'a allongée sur le canapé, le temps qu'elle reprenne ses esprits. Elle s'est redressée puis nous a félicité en nous expliquant que c'était la première fois qu'elle voyait deux hommes s'embrasser et qu'elle a simplement été surprise. Le reste de l'équipe n'avait pas l'air plus étonné que ça. D'ailleurs la plupart nous ont confié qu'ils s'y attendaient. Ils avaient remarqué bien avant nous notre attirance réciproque.

Bon, puisque cela ne dérange personne, on peut vous annoncer notre mariage, alors ? ajoutai-je

De quoi ? Demande Irène stupéfaite.

Rien, je déconne

Oh tu m'as fait peur ! On n'en est pas encore là toi et moi !

Non c'est vrai, mais cette blague m'a donné une idée. Pour son anniversaire, je pourrai lui faire la surprise de la demander en mariage. Pour l'instant, je vais plutôt lui proposer une balade. Ça fait si longtemps qu'elle me gonfle pour faire les magasins. Alors, aujourd'hui, c'est décidé, je l'emmène aux galeries Harrods. Ce sont de grandes halles où l'on trouve des articles luxueux venus de toute l'Europe et même d'Amérique.

Je recouvre les yeux d'Irène avec un bandeau jusqu'à notre arrivée. Devant la porte, je lui enlève. Son regard s'illumine comme un enfant devant un sapin de Noël. Elle se met à courir de boutiques en boutiques, prend des dizaines de vêtements sur les portants, me les colle dans les bras et fonce aux cabines d'essayage. Dès qu'elle change une pièce de sa tenue, elle tire le rideau pour me montrer l'ensemble qu'elle pourrait faire avec. Chacun de ses vêtements la rend plus belle mais même nue elle est parfaite. Elle se parfume ensuite de milles senteurs de roses, fleurs d'oranger, cumin. Un chien pourrait la repérer à des lieues à la ronde rien qu'à l'odeur. Une fois nos emplettes terminées, payés au frais de la couronne bien évidemment, elle m'emmène devant l'opéra, un endroit cher à son cœur. C'est là qu'elle a passé presque toute sa vie. Ils jouent Le songe d'une nuit d'été de Shakespeare, sa pièce préférée. Je lui propose d'entrer mais elle me raisonne en disant que nous sommes des criminels en cavale. Nous ne pouvons pas rentrer ainsi. Je lui lance un regard malicieux en lui disant : "Qui a dit qu'on allait passer par la grande porte ?". Elle a tout de suite compris ce que je voulais faire et à voulu m'en dissuader. Pourtant, elle sait que je suis têtu. Je contourne le bâtiment et passe par l'entrée des artistes. On déambule dans le vestiaire et on prend les premiers déguisements qui nous tombent sous la main pour dissimuler notre identité. On se glisse ensuite parmi les spectateurs de la tribune haute et contemplent le spectacle. A un moment, un personnage sombre apparaît sur scène et en poignarde un second avant de s'enfuir aussi vite qu'il est venu. L'acteur restant presse sa blessure d'où s'échappe une quantité importante de sang. Je me lève et acclame la prouesse technique, on se croirait presque devant un meurtre. Le public reste bouche bée devant la scène. Irène me tire par la manche et me murmure : "Ce n'est pas dans la pièce d'origine, je crois qu'il vient de le tuer". L'homme se tourne vers l'assemblée, crache du sang et s'effondre. Les spectateurs se mettent à hurler et à courir dans tous les sens. De notre côté, nous sommes déjà partis aux trousses de l'agresseur. Étant donné l'avance qu'il a sur nous, nous n'arrivons pas à le rattraper. Il nous glisse entre les doigts. Bonde veut alors retourner aider la victime mais je lui rappelle que nous sommes recherchés par la police. On doit vite déguerpir avant que quelqu'un nous repère. On se faufile dans les petites ruelles sombres de Londres en égrenant les parties de nos costumes qui nous gênent. On arrive enfin à Baker Street. Nous tentons d'aller discrètement dans notre chambre. Juste avant qu'on entre, une voix fluette nous lance : "C'est à cette heure-ci qu'on rentre !". On se retourne, un peu gênés. Fred, en voyant nos visages pâles, nous demande si on a vu un mort. On se contente de hocher la tête puis on se glisse dans la chambre. J'ai hâte que cette journée se termine. Nous nous couchons et je m'endors comme une masse.

Alter-egoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant