Chapitre 6 : Affaires classées

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Un soir, alors que je discutais avec Albert, nous nous sommes mis à ressasser le passé, il fronça les sourcils avec un air perplexe et le regard vide. Je voyais bien que quelque chose lui trottait dans la tête. Je m'enquis donc de ces pensées. D'abord, il fit mine que tout allait bien, or en allant s'installer confortablement dans son fauteuil, il se servit un verre de vin puis se mit à parler : "Voici, Sebastian, l'affaire la plus complexe de ma carrière mais aussi celle qui a bouleversé ma vie et toutes mes convictions. Un nouveau jour s'était levé sur la capitale brumeuse. J'entrais, l'air guilleret, dans l'appartement de Madame Hudson. Je ne sais pas si vous vous en souvenez mais j'avais apporté des viennoiseries pour toute l'équipe. Vous étiez tous si affamés que vous vous êtes directement jetés sur le paquet. Seul Mycroft pensa à me remercier. Il me demanda ensuite la permission pour pouvoir prendre un des gâteaux. Je le remerciai à mon tour de sa politesse et de son éducation à la différence de certains dont j'omettrai le nom. Le téléphone sonna. C'était Miss Moneypenny à l'appareil. Elle m'informa que de multiples crimes qui s'étaient produits pendant ces derniers mois avaient mystérieusement été résolus. Soit les criminels venaient faire pénitence en avouant directement leurs méfaits sans qu'on ait besoin de les chercher, soit un corbeau bien informé s'en chargeait à leur place. Les officiers de Scotland Yard recevaient tous les lundis matins une lettre listant tous les péchés commis la semaine passée. Ce corbeau horripilait Lestrade au plus haut point car il le faisait passer pour un incompétent auprès de la presse locale. Je dois bien avouer que cela me procura un certain plaisir. Le moment le plus humiliant pour l'inspecteur fût lorsqu'il reçut une missive un mercredi lui annonçant qu'un meurtre serait commis le lendemain. Comme celui-ci a un orgueil légendaire, il n'a pas écouté son informateur et a préféré attendre. Le crime a donc pû se dérouler en toute impunité sans que personne ne soit jamais inquiété. Cette affaire a évidemment fait scandale et c'est ainsi que Mycroft s'est retrouvé à diriger l'enquête. Sachant cela, j'ai voulu apporter ma pierre à l'édifice. J'ai donc demandé expressément à être mis sur l'enquête. Mycroft vint me chercher à l'appartement. Lorsqu'il entra, il me serra la main de façon amicale et nos regards se croisèrent. Il avait de ses yeux d'un marron profond qui ressemblaient à deux noisettes. Tandis que je me fondais dans son regard, une étrange sensation vint parcourir mon ventre, comme si une nuée de chauve-souris s'était réveillée d'un seul coup. Je crois que je ne l'avais jamais réellement regardé dans les yeux. J'avais l'impression d'avoir un tout autre homme devant moi. Voyant que je le dévisageait avec insistance, il me fixa étrangement. Je pris un air innocent et l'invita à entrer. Il avala cul-sec un café et nous sommes repartis. Nous nous sommes ensuite rendus chez Lestrade pour avoir tous les détails de chaque affaire. Quand Mycroft et moi sommes arrivés au commissariat, Gregson était furieux. Il hurlait dans tout le bâtiment : " Ah vous allez voir ce que vous allez voir les petits malins qui jouent aux consultants ! On dirait ce pédant de Holmes ! Heureusement qu'il a disparu de la circulation, lui, ça me fait des vacances !" Il entra en trombe dans le bureau de Lestrade et tombe nez à nez avec Mycroft. Gêné, il s'exclame : "Ah Mr Holmes, je ne savais pas que vous étiez là" en se grattant la tête. Mycroft le salua d'une simple poignée de mains. Lestrade prit la parole et exposa les différents crimes à étudier :

Un jeune homme qui avait volé le sac d'une vieille dame est venu deux jours après au commissariat rendre tout son butin. Il a même avoué que ce n'était pas la première fois. Il avait l'air paniqué lors de sa déposition.

Une femme est venue expliquer qu'elle faisait chanter son amant depuis des mois. Il devait lui livrer milles livres sterling par mois sinon elle irait raconter à sa femme son adultère.

Un homme très âgé se présenta et tendit ses bras en demandant qu'on lui passe les menottes. Les policiers stupéfaits voulaient plus d'explications. Il livra en détail le meurtre atroce qu'il avait commis sur sa femme il y a dix ans de cela. Il l'avait sauvagement assassiné sous prétexte qu'elle était d'une jalousie maladive. Un soir où il rentra d'une partie de bridge entre amis, elle l'attendit et l'interrogea. Elle le soupçonnait d'avoir une liaison, si bien qu'elle se mit à le suivre toute la journée pendant des mois alors qu'il lui répétait sans arrêt qu'il l'aimait et lui apportait la preuve de chacune de ses sorties. Elle ne voulait rien savoir et restait campée sur ses positions de femme trompée. Un jour, exaspéré par ce rituel incessant, il saisit un couteau puis lui trancha la gorge. Quand les agents de police lui demandèrent pourquoi il ne s'était pas manifesté avant, il répondit simplement qu'il avait peur de finir en prison mais aujourd'hui, il n'en a plus pour longtemps alors il veut partir la conscience tranquille.

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