~ Chapitre 12 ~

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Pdv Hope


Lorine ralentit à l'approche de la maison de mon oncle et Jin me secoue doucement par le bras pour me réveiller. A peine 10 minutes de trajet et j'ai eu le temps de m'endormir. Je me lève péniblement, tout juste réveillée, et claque la portière en remerciant et saluant mes amies.

La voiture s'éloigne, tourne à l'intersection et disparaît. Je reste immobile dans l'allée, mon sac sur mon épaule, et contemple la maison de mon oncle tout en essayant d'imaginer une vie normale : ma mère qui m'accueillerait à bras ouverts en me posant tout un tas de questions sur mon après-midi, mon père qui déposerait un baiser sur ma tempe... Tout ça me paraît si irréel et lointain.

*

Je sors de ma salle de bain vêtue du premier jogging que j'ai pu trouver dans le bazar qu'est devenu mon dressing, les cheveux encore humides, et entre dans ma chambre. Je m'immobilise quand je m'aperçois qu'Ely est dans la pièce, dos à moi. Il examine ma chambre qui est ornée de quelques photos et autres décorations ici et là. Il n'a pas dû m'entendre arriver. Je me racle la gorge et il se retourne brusquement : je l'ai fait sursauter.

- Oh heu... Salut. Ouais, ton oncle m'a fait entrer.

Je hoche lentement la tête de haut en bas, gardant le silence. Il enfonce ses mains dans ses poches et je reste debout, toujours immobile, ne sachant que faire.

- Ecoute, j'avais besoin de te voir et de te parler.

Il appuie son dos contre le mur adjacent à ma porte, gardant ses distances avec moi.

- Ca me rend fou, tu me rends fou... Je ne comprends pas les sentiments qui me traversent quand je suis à tes côtés, je ne comprends pas pourquoi je ressens sans cesse ce besoin de te protéger. J'ai besoin de savoir ce qu'il t'est arrivé, j'ai besoin d'en connaître plus sur ton passé.

Il fait une pause, passe la main dans ses cheveux en respirant profondément. Il se frappe le crâne en faisant les cent pas. Une boule se forme dans ma gorge.

- Ely...

Il se tourne vers moi. Ma voix se brise et ma vue se trouble de larmes. Je tente de résister et essuie mes yeux avant que les larmes mouillent mes joues. Je m'assois sur mon lit et il vient m'y rejoindre.

- Pff... Je ne sais même pas par où commencer...

Je reprends mon souffle.

- Mon père est en désintoxe et ma mère est en train de perdre son taff.

Ely se décompose face à mes paroles : j'ai lâché ça comme une bombe.

- Mon père et mon oncle avaient monté une entreprise : une carrosserie plus précisément. Ils avaient cette passion en commun depuis des années et ont finalement réussi à monter leur boîte. Ça a très bien fonctionné au début, mais ensuite, ça s'est dégradé et les conflits sont arrivés entre mon oncle et mon père : les revenus devenaient moins réguliers et ne permettaient pas de couvrir tous les frais. Ils ne géraient pas les choses de la même façon. Par manque d'argent et au bord du burn out de voir l'entreprise sombrer, mon père est tombé dans les trafics de drogue... Il a fini par en consommer à son tour et l'entreprise a finalement mis la clé sous la porte, incapable de remonter la pente. Mon père est devenu accro et s'est mis à prendre de ces substances plus régulièrement. Il est entré en dépression et ne rentrait presque plus chez moi. Ma mère, qui avait déjà des soucis avec son cabinet d'avocat, a commencé petit à petit à couler elle aussi sous les dettes. Finalement, ma famille s'est effondrée : mon père ne nous reconnaissait plus les peu de fois où il passait à la maison et il en devenait presque violent. Un soir que je rentrais à la maison après les cours, la police était devant chez moi : ma mère a pris peur face à l'état de mon père défoncé par la drogue et elle a appelé les flics. Ils l'ont emmené Ely. Ils l'ont emmené de force en cure de désintoxication. Et là, ça a été encore pire et plus dur pour ma mère. Une enquête a démarré sur mon père et les services sociaux ont commencé à s'en mêler et, comme je suis mineure, ils ont décrété que ma mère n'était plus apte à s'occuper de moi. Je suis donc venue ici, en Californie, pour vivre chez mon oncle, malgré tout.

Ely ne m'a pas coupée une seule fois tout le long de mon récit. Les larmes dévalent mes joues et je hoquète de surprise quand Ely dépose sa main sur ma joue pour l'essuyer.

- Hope, il ne se passe pas une minute sans que je ne pense à toi et au baiser qu'on a échangé. Tu es une femme très forte et je suis vraiment navré que tu ais du vivre tout ça. Tu mérites tellement mieux...

Alors que les larmes continuent de couler, je lui demande entre deux sanglots :

- Comment tu fais pour tenir le coup toi ?

Il sourit faiblement.

- Tu as vu Hunger Games ?

- Heu, oui ?

- L'espoir.

- L'espoir ?

- L'espoir. « Parce que c'est la seule chose plus puissante que la peur. Et si un peu d'espoir est bénéfique, trop d'espoir est dangereux. Une lueur c'est parfait. » Et ce fut toi ma lueur à moi.

Je reste sous le choc face à sa révélation et ne sait que répondre. Au moins, j'ai cessé de pleurer. Ely s'allonge à mes côtés et pose sa tête sur mes cuisses. Instantanément, mes mains viennent se loger dans ses cheveux et il ferme les yeux au contact de mes doigts contre son crâne.

Tout en continuant à manipuler ses cheveux qui tombent sur son front, j'entends sa respiration ralentir et devenir plus régulière : il s'est endormi. Une de ses mains repose sur son ventre qui se soulève au rythme de ses inspirations tandis que l'autre est autour de ma taille pour me rapprocher de lui.

Quelques minutes plus tard, ma main toujours dans ses cheveux, mes paupières s'alourdissent et je m'assoupis à mon tour.

HopelyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant