Athena T1

21.Menteur(se)

Athena

Trois semaines se sont écoulées depuis cette fameuse nuit. Bientôt deux mois que je suis avec Isaiah, sans savoir si je le suis de mon plein gré ou si je n'ai toujours pas le choix.

Bientôt deux mois où je dors avec lui et la journée chacun retourne à ses activités. Lui remplit ses contrats d'après ce que j'ai compris. Il joue et il s'entraîne, tandis que moi, je lis, je m'entraine à écrire et j'essaye le piano quand il n'est pas là.

Ce quotidien commence à me gêner, je ne tiens pas à m'attacher à ses habitudes passagères. Cette vie ne me convient pas, mais elle ressemble de plus en plus à une vie "normale". C'est étrange. C'est apaisant. Au-delà d'être calme, c'est peu commun en réalité. Je suis là, avec mon kidnappeur, comme si tout allait bien.

Seulement, il y a le "comme si" qui ne pourra jamais être plus.

Un soir, il y a quelques jours, il m'a dit qu'il me réveille chaque nuit pour couper la phase profonde de mes sommeils pour que je ne fasse pas de cauchemar.

Je ne sais pas ce que j'en ai pensé. Un certain réconfort sûrement.

Comme tout le reste. Comme tous les soirs.

Ça pourrait seulement être passager, mais j'ai la mauvaise impression que même lorsque ce sera fini, ça continuera juste dans mon imaginaire. Je me demande si ça compte pour lui ce que l'on s'apporte de temps à autre.

Je me demande aussi si je suis tombé malade de ressentir ne serait ce que le moindre sentiment pour cet homme. Alors que je déteste aussi ce qu'il est. Ou du moins, ce qu'il souhaite montrer.

Durant deux semaines, il ne m'a pas parlé de lui. Pas au sens propre. Mais toujours de façon abstraite. Lorsqu'il ne trouve pas de mots justes, il joue du piano et même s'il n'a pas l'intention de me dire qui il est vraiment, je n'ai pas de difficulté à l'apercevoir.

Seulement, à travers les notes, il n'y a pas tout. Il y a une grande partie de sa vie cachée, tellement profonde, que je doute pouvoir un jour avoir la chance de la voir. Alors que je suis si impatiente de voir ce qui se cache entre les lignes. De connaître sont passés aussi sombre et torturé que le mien.

Durant les jours qui ont passé, je me suis posé de nombreuses questions sur ma venue ici, qui sont toujours sans réponse. En fait, on n'en parle que très rarement. Voir jamais. Parce que je sais que malgré sa façon d'être avec moi, comme il l'a si bien dit, il ne me choisira pas. Et le pire, c'est que je ne lui en veux pas, car je ne le choisirais pas non plus. Ma liberté passera avant. Ma vie passera avant tout le reste. Avant lui

J'ai envie de partir, loin, suffisamment loin pour que personne ne me retrouve. Dans un endroit où les gens ne connaissent pas mon nom. Ou personne ne serait susceptible de vouloir ma mort. Je devrais sûrement aller dans le Pôle Nord à ce niveau-là.

Je me demande ce que je ferai en sortant de là.

En premier lieu, avant de me casser, je vais devoir me venger. La meilleure des solutions, c'est Isaiah, mais je ne serai pas capable de jouer avec ses émotions. Alors, il va falloir que je trouve autre chose.

Ensuite seulement, je partirai loin, et qui sait, je serai peut-être romancière ou bien juste une lectrice dans un milieu totalement paumé sans circulation.

Ce qui est sûr en revanche, c'est que j'écrirai un roman sur mon histoire lorsque tout sera fini. Et, je serais certainement la seule à le lire, mais au moins, je pourrais la raconter au passé.

Je ne sais pas si je suis en train de me voiler la face, mais j'essaye juste de voir la lumière au bout du tunnel. Aujourd'hui, je pense qu'il y en a une, mais je ne suis pas encore sûr de la trouver.