Chapitre 4 ; Adoption particulière

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Je me méfie. Cette femme vient de m'annoncer qu'ils veulent m'adopter, elle et son mari, alors qu'ils ont déjà quatre enfants. Cela paraît trop beau pour être vrai. Trop irréel et bien trop faux. Je n'ai jamais confiance en personne, je suis réputée pour ça après tout. Mais j'ai l'étrange sensation que je dois leur faire confiance. Ce qui me conforte dans l'idée que je dois refuser.

- Si tu préfères réfléchir...
- C'est non.

Je me lève et part. Je ne veux pas finir enfermée dans une cave ou pire ! Tout simplement mourante ! Ces gens sont bien trop étranges. Chose encore plus bizarre, ils ne cherchent pas à me retenir. Hors de question que je parte avec eux !

***
Une heure plus tard, me voilà dans leur voiture. Génial... Madame Li m'a forcé à monter dans leur Bugatti Mistral, une voiture de luxe fort coûteuse. Un truc à rajouter sur la liste des bizarreries ! Où ont-ils trouvé l'argent pour se payer un tel véhicule ? Le vent balaye mes cheveux argentés que j'avais si soigneusement coiffés. En plus de rouler comme des malades, ils n'ont pas refermé le toit de la décapotable et le vent s'engouffre dans l'habitacle. Parlons-en de l'habitacle ! Il y fait chaud, une odeur de fleurs et de cannelle y règne, et la musique diffusée par les hauts parleurs est bien trop forte. Mes valises tiennent parfaitement à mes pieds, étant donné que je n'ai qu'un petit sac de sport qui contient l'intégralité de mes tenues.

- Tout se passe bien à l'arrière ? crie monsieur Lanos par-dessus le vacarme des rafales.

Je réponds par un grognement sourd. La musique couvre le son de ma voix.

- Tu n'aimes pas Halsey ? me demande Théodora.
- J'aimerais surtout qu'elle arrête de chanter !

Même s'il est vrai que cette musique accompagne plutôt bien le voyage, elle est forte et va finir par me refiler des acouphènes ! Les routes de Corse sont plutôt calmes pour un mois de juillet. Les vacanciers sont sûrement affalés sur le canapé de leur maison de location. Pendant ce temps, je suis coincé dans cette fichue voiture avec des gens que je connais que depuis une heure et demie. Mes ongles s'enfoncent dans le siège en cuir au fit-et -à- mesure du voyage. Le trajet est long et je n'ai que la mer pour paysage. Après plus de deux heures de route, nous arrivons devant une demeure bordée d'arbres et de ruisseaux. À vrai dire, la maison est un peu perdue au fond de la forêt et une seule route y mène. Dans quel pétrin ai-je encore atterri ?! Je m'attends à voir un major d'homme sortir de nulle part pour attraper mon unique valise, mais je ne vois personne. Aucun problème ! J'attrape mon sac et sors de la voiture en regardant autour de moi. Qui peut s'offrir une demeure pareille ?! Sûrement pas un commercial et une femme de ménage. À bien y réfléchir, je ne sais rien d'eux à part leurs noms et ceux de leurs enfants. Mais est-ce vraiment suffisant ? Je déteste les cachotteries et je sens que le couple Lanos cachent bien plus de choses qu'ils veulent en dire. Mener ma petite enquête sera mon objectif principal. Chris et Théodora me guident dans l'allée principale, bordée d'une fontaine et de buissons. Les jardiniers se mettent à l'œuvre dès qu'ils aperçoivent leur employeur. Assurément des tirs au flanc... Nous arrivons dans le hall de la maison. J'ai mal au cou à force de fixer le plafond et les escaliers qui s'étendent à perte de vue. Un trop-plein de luxe, voilà ce que représente cette demeure. On m'invite à rentrer dans une chambre tandis que monsieur et madame Lanos s'en vont prévenir leurs enfants. La chambre est au deuxième étage. Moi qui déteste la marche, je vais être servie ! Je gravis les escaliers avec grande difficulté et arrive enfin devant ma chambre, fermée par une porte en bois lustrée. Lorsque je pénètre le seuil de ma chambre, une odeur boisée me remplit les narines. Une si douce odeur... Je pose mon sac dans l'armoire en face de mon lit. En me retournant, j'aperçois des roses blanches disposées sur le lit, certaines en bouquets et d'autres tout simplement éparpillés, toujours couvertes d'épines. Sérieusement ?! Ils veulent m'empoisonner ou me trancher les mains avec des épines ?! J'enlève délicatement les roses et retire les épines plantées dans les draps pour m'y allonger. Des roses blanches... J'en viens à me demander s'ils ne m'auraient pas menti. Est-ce un signe du destin ? Je me suis toujours demandé où était ma place. Mais ma place ne peut être ici... J'ai toujours imaginé que je fêterais mes dix-huit ans dans cet orphelinat et que je serais ensuite libre comme l'air. Aujourd'hui, j'ai surtout l'impression qu'un piège vient de se refermer sur moi. Je ne dois pas leur faire confiance. Si je baissais la garde, ne serait-ce qu'un instant, ils en profiteront pour m'induire en erreur. Quels secrets dissimulent-ils ? Je suis déterminé à le découvrir et à comprendre leur motivation. Il y a bien une raison à cette adoption particulière. Mais laquelle ?

Rosa Bianca è Rossa ( En correction / réécriture )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant