Laisser faire

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Exit music - Radiohead
Thomas

Parfois, j'ai l'impression que je serais jamais heureux comme je l'étais quand j'étais plus petit. Lorsque j'attendais toute la semaine que mon frère rentre le soir pour me raconter ce que ça fait d'être un grand. Je sais que je serais heureux, que je l'ai été, mais jamais plus comme ça. Le vrai bonheur, c'était de lire dans le fauteuil avec un jus de fruit en plein été, des histoires sur une adolescence que je n'avais pas encore connue, que j'aimais imaginer. Le vrai bonheur, c'était ma maison, mon frère , ma mère et le reste..

Je tourne la dernière page du dernier livre de ma pile.

- Merde..

Ma mère me sourit en passant devant ma chambre. Le même sourire inquiet comme pour dire « tu ne veux toujours pas sortir ? ». Parce que voila: j'ai embrassé Leo et maintenant je ne veux plus sortir de chez moi. J'ai refusé chaque invitation de Zoé à les rejoindre au café ou au même à la crique depuis plus d'une semaine. Sauf que une semaine enfermé chez moi en plein milieu des vacances d'Eté, ça inquiète ma mère. Tout ce que je veux , c'est n'être plus rien du tout , l'espace d'un instant.

Isaac rentre soudainement et s'allonge sur mon lit dans un soupir sans fin.

- Quoi ?

Il soupire à nouveau avant de répondre.

- Ça fait une semaine que la copine de Leo me harcèle parce qu'il ne répond plus au téléphone et moi j'y peux rien, je peux pas le forcer à utiliser son téléphone.

Sa copine.

- Sa copine ?

Il hoche la tête.

- Ouais, Nina. Bon ça fait que quelques temps qu'ils sont ensemble mais franchement elle était chouette mais là il recommence à faire n'importe quoi et je peux plus le couvrir..

Je hoche la tête mais mon cœur bat si fort que je n'entend plus mon frère parler aussi distinctement.

- Peut être que toi tu peux le convaincre.

Soudain la voix de mon frère devient plus claire.

- Moi?

Moi.

- Oui. Vous êtes proches, puis franchement je dois aller aider Zoé, une histoire de grand père j'ai pas tout compris..

Je souris un peu en regardant mon frère se lever du lit.

- S'il te plaît , ça te fera sortir de la maison au moins. 

Il sort avant même que je puisse répondre quoi que ce soit.

Merde.



Je tourne en boucle toutes les phrases qui pourraient me passer par la tête mais rien de bien n'en sort. Ma main frappe à sa fenêtre et le voilà qu'il s'en approche vivement. Quand il l'ouvre , il s'arrête une seconde pour m'observer, comme pour être sûr que c'était bien moi , là , devant sa fenêtre. Il finit par me laisser la voie libre pour passer.

La chambre de Leo est toujours pareille: grande, chaleureuse , décorée. Elle n'a rien avoir avec la mienne. Il n'a rien avoir avec moi. Je fixe son « étagère à souvenirs » , comme il l'appelle , où jonchent par dizaines des bibelots attrapés partout et nulle part avec le temps et fini par m'asseoir sur le coin du lit. Il ferme la fenêtre et s'assoit sur sa chaise roulante, faisant des vas et viens sur sa moquette, le visage vers le sol.

Je fini par me dire que peut être je devrais parler.

- Je suis désolé..

Il lève soudainement la tête vers moi, l'air étonné.

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