CHAPITRE 12

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LÉRIA

Ça fait plusieurs semaines que Kai s'occupe de moi, il me nourrit trois fois par jour, me porte jusqu'aux toilettes et me fait prendre un bain.

Durant la journée, on discute un peu, j'ai le droit de choisir des livres dans sa bibliothèque pour m'occuper à la seule condition que je ne casse pas la tranche.
C'est arriver qu'on fasse des après-midi lecture et à la fin on débriefe, j'aime ces moments, ils me permettent d'oublier ma situation.
Toutes ces choses me créent une routine, un semblant de normalité.

La plupart du temps, je suis seule en dehors des repas, quand il revient, il est presque toujours couvert de sang.
J'imagine qu'une dizaine d'autres filles ont dû visiter le sous-sol alors que moi, je suis dans un lit plutôt confortable, mais contrairement à elle, je porte les marques de son passage en restant bien vivante.

Je sais qu'il ne me reste plus longtemps dans cette posture, une fois cicatrisé, je ne sais pas ce qu'il va se passer et ça m'inquiète.
Est-ce qu'il va faire une roue sans fin ? Je te torture et je suis gentil le temps que tu guérisses et on recommence ? Je ne sais pas, j'avoue avoir du mal à le cerner. Un coup, il est adorable et deux seconds plus tard, il explose pour un rien.

Je l'ai entendu sans prendre à Trystane à plusieurs reprises, quand il est réapparu son visage était méconnaissable. Des balafres pleines le visage, l'arcade sourcilière explosée et ce n'est que la partie voyante...
Ma vie se résumera à ça ? Souffrir continuellement pour le même homme.

Comme chaque midi, c'est Trystane qui apporte le plateau repas, j'ai toujours de la viande dans mon plat. Pas que ça me déplaise, mais une fois de temps en temps, je pourrais ne pas en avoir. Quand je lui ai fait remarquer, Malachai m'a crié dessus en disant de manger, que j'avais de la chance de ne pas être au sous-sol et d'être bien nourri. J'ai tout de suite coupé court, je ne voulais pas le contrarier plus que nécessaire.

Je remarque un liquide foncé dans une tasse, je n'en ai jamais eu auparavant.

— Qu'est-ce que c'est ?

Je lui montre la tasse du doigt, depuis quelques jours, je peux à nouveau manger seule.
Ma cicatrice n'est plus douloureuse, il me laisse un peu d'autonomie, mais insiste pour me porter à la salle de bain et pour aller aux toilettes.

— C'est du thé, je pensais que ça te ferait du bien de boire autre chose que de l'eau.

Ma situation avec Trystane s'est aussi améliorée, il ne me voit plus comme une menace, du moins que ça ne vient pas de mon côté.
Quand je suis seule, il vient me voir et m'apporte quelques collations supplémentaires, il essaie de se faire pardonner l'arrogance de notre première rencontre.

Nous avons beaucoup discuté de nos familles, à quel point elle nous manque malgré la certaine stabilité ici. Contrairement à moi, il ne veut pas rentrer même s'il veut revoir ces parents. Il se plait ici, je ne peux pas le blâmer, je commence moi aussi à m'adapter à tout ça. Enfin d'une certaine façon.

Trystane s'en va comme à son habitude, il ne reste pas quand je mange bien que je lui ai demandé à de nombreuses reprises.
J'avale mon thé en dernier, il a un gout de menthe légèrement citronné, j'aime la douceur de ce goût.

Au bout de quelques secondes, je sens un gout métallique remplacer celui de la menthe. Je commence à avoir des crampes d'estomac, il y a quelque chose de pas normal.
Je m'assois sur le rebord du lit, ma tête tourne, je ne me sens pas bien. Il faut que j'atteigne la salle de bain au plus vite.

Je me lève et commence à marcher, je n'ai pas le temps de faire un mètre que je commence à cracher du sang.

Rapidement, je tombe sur les genoux, tout est trouble autour de moi, j'ai l'impression qu'on me tord les boyaux.
Des gémissements de douleur s'échappent de ma bouche alors que je vomis du sang sur le sol pendant que j'essaie d'avancer à quatre pattes. On dirait qu'une enclume vient me percuter le crâne, je me sens lourde, faible, j'ai mal.

Lorsque j'arrive proche des escaliers à coter de la porte, je sens mon corps se couper de toute conscience et je m'effondre au sol.

                                     * * *

Quand mes yeux se rouvrent, je suis dans une pièce que je ne connais pas, j'observe rapidement. Une télé au-dessus d'une cheminé entourer de deux grandes bibliothèques, une immense vitre sur la gauche donnant sur l'extérieur, des fauteuils et canapés sont disposés un peu partout.
Je suis dans son salon, comment je suis arrivée ici ?

— Hey, comment tu te sens ?

Je vois le visage de Malachai rentrer dans mon champ de vision, il s'assoit sur le rebord du canapé sur lequel je suis allongée et passe sa main sur mon visage. Ma vue est encore trouble, mais je le distingue parfaitement.

— Ça va enfin, je crois... qu'est-ce que je fais ici ?

— Tu étais par terre quand je suis arrivé, ton vomi était rempli de sang et ta peau si blanche, j'ai cru que tu étais morte.

— J'ai bu le thé et je me suis sentie bizarre.

Je me redresse pour m'assoir, son regard est rempli d'inquiétude envers moi.

— Je sais, on t'a empoisonné.

— Quoi ?! Oh ne me fais pas croire que ce n'est pas toi, tu aimes jouer avec ma vie depuis mon arrivée.

Bien sûr que c'est lui qui d'autre, il veut me faire croire qu'il m'a sauvé d'une mort inévitable pour que je me jette dans ces bras, je ne suis pas dupe.

— Je n'ai rien à voir là-dedans princesse.

— Arrête de m'appeler comme ça, je sais que c'est toi, tu me prends pour une idiote, mais ça ne marche pas.

Il se lève et commence à partir.

— Tu me laisses ici ?

— Tu es parfaitement capable de marché, crois-le ou non, je n'ai rien fait. En revanche, je sais qui est le responsable. Dit-il sans se retourner et en hurlant.

Il est complètement dingue, il pense vraiment que je vais le croire ? Ce qui m'intrigue le plus dans tout ça, c'est qu'il est parti. Il est parti en me laissant seule dans le salon.

Je me redresse doucement et me lève tout en gardant appui sur le canapé. Je laisse s'écouler quelques secondes, ma jambe ne me fait pas souffrir.

Depuis mon court séjour au sous-sol, je n'ai pas posé un pied par terre. Il m'a toujours porté d'une pièce à l'autre, pour me doucher, j'étais assise dans la baignoire, toujours sur sa surveillance.

Au début, je refusais qu'il me regarde et encore moins qu'il me touche, mais j'ai appris à mes dépens que ce n'est pas le genre de personne qu'on doit contrarier alors, j'ai fini par le laisser faire. Je pouvais voir son érection à travers son pantalon presque à chaque fois, mais je savais qu'il ne tenterait rien, ce qui est étrange quand on sait qu'il viole des cadavres, peut-être même avant leurs morts.
J'ai hésité un certain temps à lui poser la question, mais je me suis résigné, je ne sais pas encore quels sujets sont sensibles et d'autre non. De plus, je n'étais pas en état de supporter une autre violence de ça part, mon corps est peut-être guéri, mais pas mon âme.

Je fais des cauchemars quasiment toutes les nuits, je revis cette nuit encore et encore jusqu'à me réveiller en hurlant parce que je ressens à nouveau à la douleur de ces actes. J'ai beau essayer de ne pas y penser, j'ai conscience que quelque chose ces cassés à l'intérieur de moi et que rien ne sera plus jamais comme avant, a supposé que je m'en aille d'ici.
Partir... une idée qui ne mettait plus venu à l'esprit depuis un certain temps. 

Je fais un pas en avant, puis un autre, un sentiment d'euphorie me vient. Je suis libre de mes mouvements, sans contraintes ni entrave.

Malachai - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant