5. Quand pèse l'absence

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Des jouets éparpillés aux quatre coins de la maison, des vêtements à plier qui traînaient dans une bassine, de la vaisselle sales qui attendait d'être lavée et la poussière qui s'accumulait sur les meubles. Les yeux fatigués et le corps courbaturé par sa dernière mission, Meloshi se pencha pour attraper une paire de chaussettes qui n'avait rien à faire coincée entre les coussins du canapé. D'un revers de manche, elle dégagea son visage des mèches de cheveux qui venaient lui chatouiller le nez.

Dans la chambre au bout du couloir, Tobi était endormi depuis seulement une quinzaine de minutes. Après avoir retourné la maison, il avait fini par tomber de sommeil, laissant à sa mère quelques heures de répit pour remettre un peu d'ordre dans cette pièce qui ressemblait plus à un champ de bataille qu'à un salon. Débordant d'énergie et de curiosité, Tobi était un petit garçon qui demandait une attention de tous les instants. Détourner les yeux une seconde était la garantie de le retrouver en train d'escalader une armoire pour fouiller dans les cartons qui y étaient rangés tout en haut, ou de tripoter les prises électriques pour voir si son ami Goichi avait dit vrai lorsqu'il avait affirmé à la récréation que ça picotait un peu le bout des doigts.

Le regard fatigué, Meloshi observa d'un air absent la marque rouge vif qui recouvrait sa paume. Même préparer le repas était compliqué avec un petit monstre pareil dans les pattes et un peu plus tôt, l'inattention lui avait fait oublier que la casserole qu'elle voulait remettre sur le feu était déjà brûlante.

Ses chaussettes sales entre les doigts, elle traversa le couloir pour se rendre dans la salle de bain et les balança négligemment dans le bac de linges, avant d'ouvrir le placard à pharmacie et d'en sortir un tube de crème et un rouleau de bandage. D'un geste habitué, elle tartina sa brûlure de baume cicatrisante et enroula sa main dans le ruban blanc. Elle terminait tout juste le noeud, quand elle entendit des cris provenant de la chambre de son fils.

Elle laissa tomber par terre le reste de la bobine qui se déroula sur le sol avant de finir sa course contre le mur et se précipita à l'extérieur de la pièce. Elle ouvrit grand la porte sur laquelle était gravé le prénom "Tobi" en hiragana et retrouva son petit garçon en pleurs recroquevillé sous sa couverture.

- Tobi ? Qu'est-ce qui t'arrive ? Tu vas bien ? s'inquiéta-t-elle en venant au chevet de l'enfant.

- C'est papa... renifla Tobi, ses paroles entrecoupées de sanglots. Il est tombé... dans le grand trou... et il a disparu...

Meloshi s'installa au bord du lit et serra le petit garçon dans ses bras.

- Viens-là. C'est rien. T'as dû faire un mauvais rêve, le rassura-t-elle, tapotant doucement son dos. Papa va bien, ne t'inquiète pas.

- Il va revenir alors ? questionna le jeune Hatake, les yeux brillants de larmes.

Sa main passant dans les cheveux argentés, les yeux de la kunoichi du pays du Soufre se détournèrent légèrement vers la fenêtre. Dehors, dans un ciel sans étoile, scintillait une lune pleine et radieuse.

- Bien sûr, répondit-elle. D'ailleurs, il ne devrait plus tarder à rentrer du travail.

- Tu peux rester avec moi jusqu'à ce qu'il rentre ?

Lorsque Tobi la serra un peu plus fort entre ses petits bras, quelques reniflements s'étouffèrent contre sa poitrine et Meloshi esquissa un sourire attendri. Elle releva alors légèrement la couverture pour se glisser en-dessous et s'allongea aux côtés de son fils.

- Tu m'chantes ma chanson ? demanda Tobi d'une voix fluette.

Meloshi acquiesça d'un signe de tête et ferma un instant les yeux, comme si elle cherchait à se remémorer les paroles de cette fameuse comptine qu'elle avait longtemps oublié et qui lui était revenu en mémoire lorsqu'elle avait accepté de renouer avec son passé plusieurs années en arrière. Dans une inspiration, elle ouvrit alors la bouche et laissa la mélodie désuète s'en échapper :

Franchir la porteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant