Chapitre II

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Présent.


Les lèvres colorées de Selene me remémorent inévitablement notre première rencontre, malgré moi, je me mets à la reluquer de façon insistante, même si quelques années séparent notre première discussion et ce moment précis, rien n'a changé chez elle ni même dans l'attirance qui nous rapproche chacune de l'autre comme des aimants destinés à se combler alors que la seule chose dont nous avons envie est de nous arracher l'une à l'autre. Elle porte toujours son charisme naturel comme une seconde peau, sans même s'en rendre compte : elle est la femme la plus charitable qui puisse être dans tout New-York, du haut de ces gratte-ciels imposants, elle pourrait faire taire une voix si elle le voudrait.

Il y a cependant plus à y perdre qu'à y gagner, je dois bien l'avouer, et ce n'est pas une solution pour elle comme pour moi. Nous voulons savoir qui nous traque, qui serait susceptible de connaître la véritable histoire tragique qui s'est déroulée ce soir de janvier, après notre dernière performance.

Je ne suis pas certaine de vouloir retourner sept ans en arrière, or, je n'ai pas vraiment le choix que de le faire si je ne veux pas finir esclave des plus riches de cette ville folle à lier, je n'ai pas fait tous ses sacrifices pour finir dans une situation encore plus dérisoire que celle dans laquelle j'étais. Je m'y refuse.

J'étais la guitariste la plus connue de New-York et du jour au lendemain, on m'a arraché ce rêve des mains, ce que j'avais réussi à accomplir, toutes mes fantaisies et ma musique, puis... Mon ami. La musique et Zayn m'ont été dérobés sous mes yeux, les choses les plus précieuses que je possédais.

Alors, qu'on veuille me remettre au fond du trou, ne me plaît pas beaucoup. Maintenant que j'arrive enfin à vivre sans sentir la culpabilité et l'humiliation me nuire, il faut que quelqu'un déterre tout ce mystère par simple amusement ou colère : peu importe, on m'a dérangé et je ne compte pas rester les bras croisés.

Le valet de Selene se faufile difficilement dans la salle puisqu'elle a expressément demandé à tous ses domestiques à ce qu'elle ne soit dérangée sous aucun prétexte, celui-ci s'avance doucement, la peur brouille ses pas, cela se sent à des kilomètres. Selene me jette un coup d'œil complice, auquel je réponds en levant le sourcil. L'homme dépose finalement l'enveloppe sur la table, les doigts tremblants, il repart bredouille alors que sa maitresse ne lâche pas mon regard.

Une bataille silencieuse s'ensuit, ce n'est pas une nouveauté, il y a toujours eu de l'attirance entre moi et cette femme. Elle est le démon et la purge à la fois, laissant mes doutes se glisser sous ma peau, me donnant des frissons, parcourant l'entièreté de mon corps de ses iris maudit. Je la maudis, elle et la trainée de choses interdites qui la suivent.

Et je la maudis davantage alors que je me lève subitement de mon siège et que je me dirige dangereusement vers elle, elle lève le menton, je connais bien cette expression : celle qui crie de ne pas l'approcher, or, je n'ai pas peur de cette femme, je connais déjà les torts et le chaos qu'elle a causé.

Elle est mon désir et mon mensonge. L'objet de nombreux doutes et tentations.

Lui portant secrètement une haine viscérale, qu'elle-même adresse à sa personne lorsqu'elle se retrouve dans l'obscurité de la nuit, si sinistre pour une personne se sa race. J'ai pitié de sa personne, de sa situation, mais rien ne se montre sur mon visage tant ma rancune est vive.

J'arrive à sa hauteur, son regard est empli d'espoir, d'une lueur fougueuse qui me frappe, mais qui ne m'est pourtant pas étrangère. Je sens l'électricité qui se propage entre nos deux corps, on se tourne autour, laissant nos envies mutuelles se faire désirer. Lorsque nous craquons finalement, elle se retrouve le corps courbé, les mains à plat contre la gigantesque table en bois qui prend presque toute la superficie de la pièce et le poids de mon corps est contre le sien.

Nous ne parlons pas, aucunes paroles ne frôlent nos lèvres, nous n'en avons pas besoin, nous connaissons les envies de nos corps respectifs, des mots enfouis sous un lourd silence désapprobateur, des discussions qui auraient dû être goûtés par nos langues, mais, nous savons également que cela n'augure rien de bon et que tout pourrait être foutu en l'air. Je sens que je suis en train de perdre la tête : je fais remonter sa robe moulante sur ses fines hanches tandis que ma main droite remonte le long de son ventre jusqu'à venir se loger contre sa poitrine pendant que ma main gauche rejoint la sienne sur la table. Je connais chacune des courbes de son corps, il n'a pas changé, il est toujours le même que celui que j'ai eu entre mes draps pour la première et unique fois.

Je la sens s'abandonner contre moi, elle en a réellement envie et je le sais, ses multiples réactions me poussent à croire qu'elle attendait ce moment depuis ces longues sept années à pourrir seule, à m'attendre, à espérer une seconde rencontre dont je ne voulais pas qu'elle voie le jour. Mon souffle caresse sa nuque, elle pose sa tête contre mon épaule, je glisse mon nez de sa nuque à son oreille, elle frémit sous moi et son bassin forme désormais des petits cercles contre le mien.

De mes doigts libres, je remonte le long de son bras pour venir la presser contre son cou, la forçant à la laisser tomber un petit peu plus avant de susurrer ses quelques mots qui, je sais, vont la troubler au point d'en oublier la ferveur qu'elle me porte après tant d'années à nous abominer dans l'ombre, coincées dans une relation passagère, mais ardente du passé :

– Crois-tu vraiment que je vais donner et oublier, ma main sous son vêtement retombe tandis que je m'éloigne.

La chaleur de son corps me manque déjà, le poison qu'elle m'a injecté n'a pas fini de me torturer, pourtant je suis prête à m'en aller.

– Non... souffle-t-elle en relâchant son souffle qu'elle retenait jusqu'à lors.

Son corps s'abaisse sur la table, elle ne bouge plus, visiblement déçue et embarrassée d'avoir cru qu'elle obtiendrait quelque chose de moi, mais, je me dirige déjà vers l'entrée, terriblement frustrée et à contrecœur.

C'était une terrible erreur.

Selene Bell n'est pas une femme à baiser, des choses maléfiques en émanent après en avoir tiré une jouissance quelconque.

Blow That Out ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant