Chapitre VI

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Présent.


Aujourd'hui, Madame Selene Bell a voulu m'inviter à diner. Le carton d'invitation qu'elle a glissé sous ma porte git désormais sur le comptoir de ma cuisine alors que je fais les cents pas à proximité, mon jus à la main. Je sais que je devrais décliner, pourtant quelque chose me pousse à croire qu'après notre échange quelque peu farfelu d'hier, je ne serais pas contre un bon diner, ni un échange avec Selene, en fait, j'adorerais savoir ce qui lui avait passé dans la tête pour qu'elle m'embrasse. Était-elle saoule ou peut-être simplement que les souvenirs faisaient remonter des sensations dans son estomac, celles que nous avions partagées, tout comme moi. Je lance une injure entre mes lèvres pincées, je suis complètement indécise.

Je ne sais pas si c'est une bonne idée, ni si mon esprit et mes jambes auront le courage et la force de m'y amener. Je me sens étouffer dans sa gigantesque demeure alors qu'elle s'y pavane comme si elle connaissait l'entièreté de l'espace qu'elle consommait. Partager un diner avec elle n'est ni la bonne solution ni une quelconque bonne idée, mais elle est tout ce qu'il me reste désormais et si je ne lui donne pas l'intérêt qu'elle recherche ni l'attention dont elle a besoin maintenant, je ne pourrais jamais découvrir qui se cache derrière ce journal à titres de rédacteurs anonymes et qui veut me traquer et retracer ma vie, mes pas, à ma place.

J'ai été contrainte de quitter la scène, la musique et les feux lumineux alors même que c'était ma seule raison de me sentir vivante et, je suis présentement mise sous les feux des projecteurs contre mon consentement. Je n'avais jamais eu de réelles complications avec nos spectateurs jusqu'à ce jour-ci, dans le petit supermarché au coin de la rue dans laquelle je logeais, mais quelqu'un voulait faire savoir la vérité et cela ne me plaisait pas, contre toute attente, lorsque l'on m'avait proposé de garder cela enterré pour que le jeune homme ait une mort digne et que les proches puissent faire leur deuil tranquillement sans encombrement, j'avais directement accepté, sans contraintes, sans même une once hésitation.

Je jetais un regard noir au carton d'invitation si simple et épuré pour la jeune femme luxueuse que j'avais connue sept ans auparavant, cela était troublant, car même si rien n'avait changé dans son attitude ni dans la manière de prononcer ces mots ou de me tourmenter, son style lui avait suivi les codes de la société en ajoutant une touche de sa personne dans son style, je remettais plutôt cela sur son couturier personnel.

Mais Selene avait toujours était comme cela, une femme imprévisible, peu redondante et à qui l'on pouvait faire extrêmement confiance au bon moment. Mais jamais, au grand jamais, celle-ci ne sortait sans être un minimum apprêté, elle avait le sens du goût et de l'élégance : comme une évidence qui se présentait à elle.

Je laissais le carton posé là, dubitative face à ses envies et surtout à ce que je devais faire.

***

Plusieurs heures plus tard, je me retrouve devant la grande porte ouverte de son foyer, à ma grande surprise, plusieurs invités avaient fait du chemin jusqu'ici : tous leurs visages étaient recouverts par d'élégants masques divers. Un bal masqué. Évidemment que Selene était plus intelligente que cela, comment j'avais pu penser que cette femme à l'ombre traite voulait simplement partager un diner avec moi autour de sa grande table alors qu'elle pouvait se divertir en invitant des centaines de personnes. Je me faufile entre la masse de personnes nobles qui s'est rassemblé à l'issue de ce bal, où j'ai moi-même était invitée. Mon costume noir au tissu fluide contraste avec les habits lumineux de tous malgré l'extravagance de mon haut au décolleté plongeant, révélant l'encre du nœud papillon qui y est inscrit au centre. Mon regard divague entre les invités, mais là, accoudé aux grandes portes, son corps est délicatement courbé contre le bois, une cigarette à la bouche : dans sa robe moulante au dos nu, la courbe de ses seins est marquée par l'arrêt du tissu. La fumée embrasse son visage tandis que je m'approche tout en évitant de croiser le regard de tout autre individu, une certaine ferveur m'emplît, je ne suis attirée que par le sien.

Blow That Out ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant