Chapitre XIV

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Présent.

Mon corps drainé se promène aux alentours de la grande demeure. Ses lumières projettent une lueur sur la pelouse, au-dehors de cette dernière, quelques silhouettes s'affairent à l'intérieur. C'est charmant. Assise sur le banc à plusieurs mètres de la porte principale, je veille inconsciemment sur sa propriétaire tandis que les gouttes froides tombent sur mon visage.

La pluie m'amène à me diriger vers les lumières qui m'éclairent, elles aussi, désormais. J'entre sans trop de convictions lorsque le pan s'ouvre, cette fois-ci non pas sur le majordome, mais sur Selene elle-même. Son visage n'éclaire pas mon esprit, puisqu'elle a l'air davantage étonnée que moi.

Avec absence, mes jambes me poussent jusqu'à la grande salle, là, j'enlève mon manteau trempé que je laisse tomber sans vigilance sur le sofa. Mes chaussures ont laissé des traces sur le sol lumineux.

La chevelure noisette de Selene se balance autour de ses épaules alors qu'elle ordonne à l'une des bonnes de notifier le cuisinier qu'un autre repas doit être cuit. Elle lui demande également de choisir la meilleure bouteille de vin rouge qu'elle pourra trouver dans la cave à vin

Une certaine langueur se fait ressentir dans sa voix.

Mes paupières ont du mal à s'ouvrir à chaque fois que je les ferme, mais un repas réconfortant me donne l'envie de les laisser ouverts. Cela fait deux jours que je creuse les investigations sans trop savoir où cela me mène.

– Tu n'étais pas obligé, c'est ma première parole alors que Selene se retrouve à placer deux verres sur la table.

Elle ne répond pas, elle s'arrête néanmoins dans ses mouvements, elle est maintenant prête à écouter ce que j'ai à dire, comme si je n'étais venue que pour cette raison, peut-être que cela vaut mieux finalement.

– Nous sommes dans l'impasse, penses-tu que nous allons trouver qui nous fait chanter Selene ?, je lui demande désespérément un avis.

Un long silence me fait me questionner. Nous n'avons rien à nous reprocher, pourtant, nous cherchons tout de même à nous innocenter. Cela n'est-il pas insensé, de vouloir se justifier tant nous pensons que tout cela n'était que de notre faute à nous.

– Et si, une hésitation, je faisais jouer ma notoriété, Selene relève sa tête afin que je puisse rencontrer son regard.

Des gouttelettes qui tombent de mes cheveux font résonner un lourd son contre le parquet. Les bougies de la table vacillent parfaitement, une atmosphère rassurante me gagne. La chevelure détachée de Selene glisse devant son visage, elle replace cette mèche derrière son oreille.

– Et si, on essayait de se reconstruire.

C'est mesquin, je sais pertinemment que je ne pourrais jamais me reconstruire dans le brouillard qu'elle a laissé dans ma vie. Une pointe de culpabilité se loge dans mon estomac à mesure que j'y pense avec plus de vivacité : un quotidien sans penser à Zayn serait un soulagement profond dont je ne crois pas mon corps capable autant que je ne le vois pas semer le chaos dans celui de Selene Bell en retour. Ma seule réponse n'est donc autre que de la culpabilité enivrée par l'envie de me reconnaitre dans les moments passés.

Je me déplace lentement vers l'odeur de café qui me brûle tantôt les narines, tantôt m'envoie des souvenirs auxquels j'aimerais parfois m'agripper un petit peu plus longtemps : j'attrape ses doigts d'une douceur, comme si une bourrasque aurait pu les fragiliser et faire éclater ce lien.

C'est si fragile, toutefois si puissant.

– À l'unisson, je succombe contre son lobe en chuchotant.

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