Blow That Out ?

Chapitre IV

Présent.

L'amertume me domine. Mes muscles sont tendus et ma respiration est difficilement courte. C'est un supplice de devoir faire un pas de plus dans les rues de New-York alors que des souvenirs douloureux m'assaillent de plein fouet, tout m'évoque Selene dans sa belle robe marron, ses cheveux se battant au vent et sa maniaquerie soignée. Je déteste me rappeler tous ces moments, c'est comme un retour à une réalité dont on n'a aucune envie de revivre. Mes pas trainent sur le bitume complétement recouvert de feuilles aux couleurs orangées, même le temps me traque pour que je puisse, à l'évidence, mieux me remémorer de ces tourments incessants. Les oiseaux gazouillent sur les fines branches dorénavant nues alors que je me suis enfuie de l'immense demeure que Selene détient depuis son jeune âge. Les domestiques à l'entrée n'ont même pas osé m'arrêter ni même jeter ne serait-ce qu'un minuscule coup d'œil dans ma direction, j'entends les gens heureux et des enfants rigoler dans le parc sur ma droite. La vie continue son train alors que la mienne s'est arrêtée il y a bien des années.

Savoir ce qu'il s'est réellement passé ne m'intéresse pas tant que ça, malgré moi, je préférerais que cela reste flou pour moi et que la raison ne me soit jamais divulgué. Que je continue à vivre dans l'innocence, comme je l'ai très bien fait les années qui ont suivi. Après la mort de Zayn, cela avait été compliqué de reprendre une vie assez banale, malgré les aides que l'on m'avait accordé pour ne pas avoir été assez fortunée, la conversation et la compagnie était cependant ce qu'il me manquait le plus. Zayn avait été mon ami, un homme bon et serviable. Il n'avait jamais cherché de mal à personne, il n'avait jamais rabaissé une femme : élevé pour son statut de jeune homme aimable, il était réputé pour être le plus doux d'entre nous deux. Notre paire se complétait parfaitement selon les spectateurs que nous avions ou plusieurs de nos admirateurs.

Un gigantesque soupir quitte mes lèvres, la nostalgie d'une vie passée, une vie qui me manque, m'emplit les poumons lorsque je respire, elle me suivait de très près depuis que ça avait changé. PLus j'y pensais, plus ma haine viscérale pour Selene ne faisait qu'accroître, seulement voilà, je ne devais pas non plus me voiler la face : Selene avait fait partie de ma vie, une majeure partie même et je ne regrettais en rien d'avoir connu cette femme, c'était ce qui avait suivi qui m'avait terriblement troublée. Tant de choses avaient changé, le regret se glissait par moment dans la nostalgie, mais je ne le laissais jamais gagner une très grande place, une place qu'il ne méritait pas. Le regret était un sentiment bien trop maladif pour ma personne.

Je n'étais pas très loin du quartier de Selene, j'errais ici en me demandant si c'était toujours obligatoire de lui demander son aide, de lui demander de démasquer cette vérité avec moi. Après tout, elle était avec moi lorsque c'est arrivé, et lorsque tout a commencé à se détériorer. Mes mains froides attrapèrent mon téléphone ainsi que les écouteurs emmêlés qui traînaient dans mes poches, lorsque j'en avais besoin et que j'en ressentais le besoin oppressant : j'écoutais de la musique, des mélodies qui me rappelaient étrangement les heures passées à réviser nos morceaux avec Zayn, nos moments sur scènes, les choses qui nous avaient laissés hilares des heures durant et d'autres souvenirs enfouis dans le fond de ma mémoire, s'effaçant peu à peu, les recouvrant d'un voile de poussière comme pour m'aider à effectuer mon deuil.

Mes phalanges rougies par les températures se coincèrent sous mon appareil tandis que je branche mes écouteurs et les enfoncent dans mes oreilles avant de me mettre à écouter le rythme et les battements s'enchaîner, faisant vibrer l'entièreté de mon corps. Des frissons me parcourent tant la mélodie me rappelle celles que nous jouions, sur une scène de bois miteux, puis celles plus aménagées. Toutes me disent que Zayn jouait avec une expertise que lui seul connaissait, ayant appris seul.

Ses baguettes me manquent, la manière dont ils les faisaient tourner autour de ses doigts, d'une agilité dont je ne disposais pas, ces mêmes doigts du batteur aux cheveux ébouriffés et l'air inconscient de tout. Sa personne et sa façon de penser me donnent envie de m'amuser pour lui, pour son âme perdue. Un sourire irrépressible s'affiche sur mon visage. Je suis sur le point de retirer les écouteurs de mes oreilles, toujours concentrée sur mes pensées, à l'arrêt devant un parc. Zayn et Selene m'auraient traité de folle.