★ HEURE ET LUEUR

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NDA ; big up au wiki fandom link click d'où sont tirées les informations sur les noms/caractères de cheng xiaoshi et lu guang, j'espère qu'ils disent pas de bêtises dessus ahahah, je ne parle PAS UN MOT de mandarin </3

et bonne lecture!

CHAPITRE 06
Heure et lueur

LU GUANG s'est longtemps demandé quel genre de personne serait son âme sœur.

Les gens ont tendance à supposer qu'il ne se préoccupe pas de ces choses-là, sûrement parce qu'il a toujours l'air ― à les entendre parler ― de ne se soucier de rien, et de n'accorder aucun intérêt ni attention à son avenir amoureux ou même à son futur de manière générale. Il vit au jour le jour à leurs yeux, et ils n'ont pas totalement tort à ce sujet.

Et puis, dans leur société où peu de gens croient encore aux âmes sœurs, il ne donne pas vraiment l'impression d'être le type de personne à aller contre l'opinion majoritaire.

Pour autant, Lu Guang s'est bien souvent questionné sur l'identité de cette personne qui va croiser son chemin. Il s'est demandé quel serait son genre, ses origines et son parcours avant de le rencontrer ; à quoi elle ressemblerait et comment serait sa personnalité ; et enfin, comment serait leur rencontre.

Il n'aurait toutefois jamais pu imaginer que son âme sœur puisse être aussi stupide.

« Qu'est-ce qui vous a pris ? » souffle-t-il à l'intention du jeune homme qui vient de crier de la sorte, au beau milieu de la rue et en attirant sur lui tous les regards.

Le conseil de Liu Siwen tournoie dans son esprit. Agis différemment chaque jour qui se répète. Techniquement, ce que le jeune homme en face de lui vient de faire correspond à cela. Mais tout de même... Lu Guang parvient difficilement à croire qu'il ait pu faire quelque chose d'aussi voyant et stupide que crier dans la rue pour attirer l'attention de son âme sœur.

Le pire, c'était qu'il ne semble même pas se rendre compte de sa puérilité.

(Le pire, c'est que ç'a fonctionné.)

Lu Guang a initialement hésité à réagir. Après tout, il ne croit pas aux âmes sœurs et ne voit pas en quoi cette rencontre forcée par le destin est supposée l'amener à tomber amoureux et à se sentir accompli dans son existence ― comblé par la présence de celui dont il a soi-disant été autrefois séparé. Lu Guang n'aime pas particulièrement cette injonction omniprésente que le destin leur inflige depuis plusieurs siècles, et à laquelle les gens se sont si longtemps pliés. D'ailleurs, il s'estime heureux d'être né à une époque qui a remis en question tout cela et qui ne force plus, socialement, les individus à épouser leurs âmes sœurs.

Mais, présentement, à quoi bon éviter l'inévitable ? S'il ne tente pas de trouver son âme sœur, il ne pourra jamais sortir de la boucle temporelle et forcera également une autre personne à rester coincée dedans.

Et, au vu de ladite personne, Lu Guang n'est pas particulièrement enthousiaste à l'idée de passer le restant de ses jours à voir un tel idiot faire des pieds et des mains de la sorte pour obtenir de lui son attention.

Il vaut mieux en finir au plus vite, briser la boucle et reprendre le cours de leur vie chacun de leur côté.

Mais pour cela, encore faut-il que l'autre, cet idiot aux cheveux noirs, accepte de reconnaître que, même s'ils sont âmes sœurs, ils ne sont pas forcés de s'aimer et de se jurer fidélité. Encore faut-il qu'il accepte de reconnaître que leur rencontre, forcée comme elle l'est, n'a aucune valeur et ne doit pas nécessairement avoir un effet sur toute leur vie, mais qu'ils peuvent aussi plutôt faire comme si de rien n'était, et oublier que le destin les considère comme âmes sœurs.

Lu Guang doute quelque peu que ce soit le cas, à en juger par son attitude.

« Alors c'est toi ! » s'exclame l'inconnu en lui adressant un grand sourire. Lu Guang a employé le vouvoiement par réflexe, estimant que la situation dans laquelle ils se trouvent ne justifie pas qu'il s'adresse tout de suite au jeune homme aux cheveux noirs avec une franche familiarité, mais il semble que son interlocuteur ne voit pas les choses du même œil. « Enchanté ! » se présente-t-il immédiatement, montrant tout de même un minimum de politesse.

Lu Guang le détaille quelques instants : il porte une tenue assez formelle, assez facilement identifiable comme celle d'un agent de sécurité, et a même, d'ailleurs, dans sa poche, un talkie-walkie qui crépite sans qu'il n'y prête vraiment attention. Il n'a pas particulièrement le physique de son emploi, songe Lu Guang, compte tenu de sa corpulence. Ses cheveux noirs sont en bataille, et une partie est retenue dans une minuscule queue de cheval à l'arrière de sa tête. Il a également, autour du cou, un badge d'accès et d'identification qui indique le nom de Cheng Xiaoshi.

Son nom s'écrit avec le caractère pour heure, et le jeune homme aux cheveux blancs trouve ironique qu'il ait un nom qui colle si bien avec le champ lexical de la temporalité actuellement malmenée par le destin.

« Je n'aurais jamais pensé que c'était toi mon âme sœur, poursuit le dénommé Cheng Xiaoshi avec un entrain qui lui semble propre et le fait ressembler à un petit chiot surexcité. Je veux dire, c'était difficile de ne pas te remarquer dès le premier jour avec ton immense bouquet de coquelicots. Pourquoi tu en as un, d'ailleurs ?

― C'est mon anniversaire, explique le jeune homme aux cheveux blancs avec indifférence. Son interlocuteur cligne des yeux plusieurs fois successivement.

« Sérieux ? Tu rencontres ton âme sœur le jour de ton anniversaire ? C'est trop cool. Remarque, au moins, revivre cette journée ne doit pas te déplaire. »

Le jeune homme aux cheveux noirs fait la grimace en prononçant ces mots, laissant son interlocuteur supposer que lui-même n'est pas ravi de revivre ce jour en boucle. La curiosité de Lu Guang est immédiatement piquée, mais il s'efforce de rester concentré. S'ils peuvent briser la boucle temporelle rapidement, cela n'en sera que pour le mieux pour tout le monde. Mais, pour cela, ils doivent trouver quelle est la « bonne manière » pour eux de se rencontrer.

Cette « bonne manière » est différente pour tout le monde. Lu Guang a appris, en écoutant les récits de son entourage, qu'elle dépend fondamentalement du contexte et de la personnalité des principaux concernés. Rien n'indique toutefois aux prisonniers de la boucle la marche à suivre pour que les choses se déroulent comme elles doivent le faire ; aussi, Lu Guang décide tout simplement de s'en remettre au destin, et de laisser la conversation progresser comme elle vient.

Ainsi, il déclare :

« Je m'appelle Lu Guang. » Pour correctement apprendre à connaître quelqu'un, le nom semble être une bonne façon de commencer. À sa grande surprise, l'autre lui rétorque immédiatement, avec un sourire :

« Tu l'écris avec le caractère pour lueur ? » Le concerné hoche la tête, sans trop comprendre où il veut en venir. « Si on le combine avec mon nom, ça donne temps. C'est comme si nos parents nous prédestinaient à être âmes sœurs ! »

Lu Guang le dévisage sans trop savoir que répondre à cette remarque, qui est la plus incongrue qu'on lui a jamais faite sur son nom.

Et en son for intérieur, pendant une (très) brève seconde, il songe que l'autre n'a pas totalement tort. 

JUSQU'À CE QUE FANENT LES COQUELICOTS - 𝗹𝗶𝗻𝗸 𝗰𝗹𝗶𝗰𝗸Où les histoires vivent. Découvrez maintenant