★ PROMESSE

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NDA ; un autre de mes chapitres favs!!

CHAPITRE 18
Promesse.

LU GUANG ne s'est jamais imaginé inviter son âme sœur dans son appartement.

Il invite si peu de personnes au quotidien que l'idée de faire entrer chez lui la personne que le destin lui aura choisie pour âme sœur lui a toujours semblé complètement incongrue. Il n'a jamais pensé devenir assez proche d'il ou elle pour lui ouvrir la porte de sa maison, et encore moins l'inviter de son plein gré, lui proposer du thé et toutes sortes de chose, en ignorant volontairement le fait qu'ils ont failli s'embrasser la veille et qu'il n'a empêché cela que parce qu'il a naïvement paniqué en sentant le souffle de Cheng Xiaoshi sur sa joue.

Lu Guang a passé la nuit à y repenser, sans trop savoir s'il se remercie ou se fustige pour cette attitude.

Après tout, le jeune homme aux cheveux blancs n'a pas encore totalement changé d'avis.

Il n'est pas encore certain que les choses puissent fonctionner entre Cheng Xiaoshi et lui.

Et il ne sait pas vraiment comment interpréter le fait que la boucle temporelle ne semble pas vouloir se briser, peu importe à quel point ils font preuve d'inventivité dans leurs rencontres et dans leurs conversations.

Voilà neuf jours qu'ils essaient de se parler, d'apprendre à se connaître, et pourtant, ils ne paraissent toujours pas en mesure d'offrir au destin ce qu'il attend d'eux. Lu Guang finit par se demander quelle rencontre tordue le destin souhaite voir de leur part.

Et en même temps, il se surprend à trouver cette bulle temporelle presque agréable.

Elle constitue une pause dans sa vie et dans le temps.

Il n'y est plus question de se soucier de ses heures de travail, ou simplement de tous les autres qui ne se pensent qu'au moment où ils vont enfin rencontrer leur âme sœur jusqu'à ce que celui-ci se produise et qu'ils puissent fièrement dire qu'ils sont désormais libres de rencontrer qui ils souhaitent, parce que jamais cela ne fonctionnerait avec la moitié que le destin leur a associée.

Lu Guang a été comme eux, avant de rencontrer Cheng Xiaoshi.

Maintenant, il se prend à douter.

« Tu décores si peu ton appart', fait remarquer Cheng Xiaoshi en observant les murs et les meubles nus lorsqu'ils arrivent enfin chez lui et que le jeune homme aux cheveux noirs peut poser ses affaires et détailler son nouvel environnement. Je comprends pourquoi ton collègue t'offre toujours des coquelicots. »

Le jeune homme aux cheveux blancs, qui est justement en train de tirer de son meuble un vase pour y déposer le bouquet délivré par Chen Bin le matin-même, suspend son geste quelques secondes avant de secouer la tête, sans rien dire toutefois, comme s'il souhaitait contester, mais ne sait pas quoi dire. Il se contente de remplir le contenant d'eau et d'y plonger les tiges des fleurs du bouquet, avant de le déposer et de l'observer quelques instants. Dans la décoration particulièrement claire et épurée de son appartement, le bouquet est particulièrement visible. Il le constate tous les jours depuis neuf répétitions, mais cela lui saute toujours aux yeux lorsqu'il le place ainsi sur sa table.

Pour lui, le bouquet est le symptôme, le symbole du recommencement incessant qui s'effectue tous les jours, parce que chaque matin, il a disparu de cette même table. Chaque matin, lorsque Lu Guang ouvre les yeux, le vase est à nouveau rangé à sa place et les fleurs inexistantes. La veille, lorsque le jeune homme aux cheveux blancs est resté éveillé trop longtemps à son goût, assailli par des pensées, il a voulu voir le phénomène mystérieux qui se produit sans cesse, en vain. Il a cligné des yeux au moment fatidique, et le vase a disparu. C'est si étrange à vivre, d'ailleurs. Il a eu à la fois le sentiment que tout et rien n'avait changé.

Que la vie a repris son cours tout en ayant cessé d'avancer.

Cheng Xiaoshi suit son regard en silence pendant un long moment, avant de ramener un sujet de conversation comme il sait si bien le faire, avec une aisance que Lu Guang aurait pu lui envier dans d'autres contextes. On pourrait croire qu'il se moque de ce qui s'est produit la veille et a failli aboutir en l'union de leurs lèvres, et le jeune homme aux cheveux blancs ne sait pas vraiment quoi en penser.

Est-ce sincère ? Ou le jeune homme cache-il ses émotions ? Difficile à dire.

Quoiqu'il en soit, le jeune homme aux cheveux blancs ne voit pas le temps passer une fois de plus. Ils continuent de parler de tout et de rien toute l'après-midi, jusqu'à ce que le soleil se couche et les plonge tous les deux dans une obscurité partielle au travers de laquelle ils peinent à se voir l'un l'autre. Lu Guang n'esquisse aucun geste pour allumer la lumière, toutefois. Il aime bien cette atmosphère calme et apaisante. Cheng Xiaoshi lui-même est de nouveau silencieux, le regard perdu une fois de plus sur le bouquet de coquelicots.

Au bout d'un moment de silence, il parle finalement.

« Je me demande si je verrais un jour ce bouquet de coquelicots faner. »

Lu Guang comprend immédiatement ce qu'il veut dire. Depuis qu'ils se sont rencontrés, Cheng Xiaoshi l'a toujours vu avec ce bouquet de coquelicots fraîchement cueillis. Chaque jour, la journée recommence et il le voit encore et encore, comme si rien ne s'était passé. Si un jour il peut le voir faner, cela signifierait qu'ils sont passés aux jours suivants et que le temps a recommencé à avancer ― mais également que les deux jeunes hommes sont restés en contact.

Cette simple phrase veut dire beaucoup de choses.

C'est même presque une demande de promesse.

Promesse qu'ils se reverront, même si le temps doit recommencer à avancer.

Et dans l'obscurité, dans le semi-silence de son appartement, dans cette atmosphère qui fait grossir encore et encore le cœur de Lu Guang, il opine :

« Je suis sûr que oui. »

JUSQU'À CE QUE FANENT LES COQUELICOTS - 𝗹𝗶𝗻𝗸 𝗰𝗹𝗶𝗰𝗸Où les histoires vivent. Découvrez maintenant