Stiles éprouvait une certaine satisfaction à regarder Derek cuisiner, préparer leur repas. Si le jeune homme se débrouillait fort bien dans le domaine, il fallait avouer que voir son hôte faire était une chose particulièrement satisfaisante parce qu'il se rendait graduellement compte que son niveau en la matière ne semblait pas si loin du sien. Stiles ne s'estimait pas énormément, mais il se savait bon pour faire de jolies et bonnes choses. C'était un talent qu'il avait développé au fil des années, à force de voir son père s'empoisonner l'existence et le corps avec cette malbouffe qu'il leur commandait sans arrêt. De son côté, il en avait eu mal au ventre à de si nombreuses reprises qu'il avait décidé de prendre cet aspect-là de leur vie en main. Depuis lors, il gérait très bien la cuisine, réalisait chaque plat d'une main de maître... Ce qui ne l'empêchait pas de se faire plaisir de temps en temps et d'autoriser à Noah quelques transgressions gentillettes.
Et pour une fois, quelqu'un prenait sa place aux fourneaux. Bien que Derek cuisinait pour lui depuis qu'il logeait chez lui, Stiles le regardait faire pour la toute première fois. Il décortiquait chacun de ses gestes, en tous points semblables aux siens. Précis, justes, sans mouvement superflu. Derek faisait dans l'économie, privilégiait l'efficace. Et bizarrement, cette idée lui plaisait. De façon générale, Stiles appréciait le fait de voir faire autre chose que ce pour quoi il le connaissait. Ainsi, il avait l'impression de découvrir un nouveau Derek, d'avoir accès à une certaine forme de privilège. Qui dans la meute, Peter mis à part, pouvait se vanter de voir l'ancien alpha vivre en dehors des réunions ? Qui pouvait se vanter d'entrevoir l'homme qu'il semblait être dans l'intimité ? Personne, mis à part lui. La différence, c'est que Stiles n'en montrerait aucune fierté. La bouffée de chaleur qui réchauffait tout son être, elle était à lui. Il s'agissait de son ressenti, de ce petit trésor intérieur qu'il préservait autant que possible. Stiles voyait ça comme un coffre-fort sans fond, à l'intérieur-même de sa tête. Il y rangeait plus ou moins consciemment souvenirs et émotions les plus positifs possibles, de sorte à pouvoir s'en servir. C'était une chose à laquelle il avait pensé tout récemment. Pour l'instant, il logeait chez Derek, qui le surveillait constamment et faisait son possible pour lui faire oublier ce secret longtemps gardé entre les pages de deux carnets et qui avait bouleversé le cours de son existence. S'il pouvait rester ici un peu plus longtemps que prévu, Stiles savait qu'il aurait toutefois à rentrer chez lui bientôt – ce qui le priverait de l'omniprésence de l'ancien alpha. Au départ, elle avait tendance à l'agacer, mais Stiles avait rapidement fini par l'accepter, en voir les avantages. L'humain, sans cesser de le regarder faire, se fit la réflexion que Derek était la meilleure personne sur qui il aurait pu tomber ce soir-là : il songea à sa chance, qui ne se représenterait sans doute pas deux fois. Stiles ne devait à l'heure actuelle sa vie qu'aux habitudes régulières de Derek – il était, au final, heureux de ne pas l'avoir suffisamment espionné par le passer pour les connaître. Autrement, il aurait agi différemment.
Et il aurait réussi.
Car Stiles savait qu'il aurait fini par appuyer sur la détente. Il se souvenait parfaitement de l'ampleur de la pulsion qui avait dirigé ses gestes à la baguette. Rien de censé n'aurait pu l'arrêter – aucune réflexion qu'il aurait pu avoir, en tout cas.
- Tu veux me remplacer ?
La voix de Derek le sortit instantanément des ténèbres dans lesquels il avait commencé à plonger – à pieds joints. La mine tout d'abord défaite par une surprise de l'ordre de la traîtrise, Stiles passa rapidement à un léger rictus moqueur. Si Derek l'avait déjà vu dans sa phase la plus sombre, l'humain ne tenait pas à faire perdurer cette image de lui – elle ne lui correspondait pas. Il préférait se protéger, quitte à feindre un peu, de sorte à montrer au loup-garou qu'au moins, il essayait. C'était là sa manière de faire comprendre ses intentions, car Stiles commençait réellement à avoir à cœur de remonter la pente. Il désirait vraiment faire tout ce qui était en son pouvoir pour redevenir celui qu'il était. Était-il possible qu'un souvenir de soi-même nous manque ? C'était en tout cas l'effet que cela lui faisait parce qu'il avait envie de se reconnaître, de réagir à tout comme il avait l'habitude de le faire. Être Stiles Stilinski, ça lui manquait – il se donnait l'impression de n'être que l'ombre de lui-même.
Alors, il se reprit.
- Tu aimerais ? S'enquit-il d'un air aussi désinvolte que possible.
Faire des efforts, voilà ce qu'il devait faire, tout en se convainquant lui-même de cette comédie dont il n'espérait garder que le côté réel. C'était comme ça qu'il avait toujours fonctionné sans jamais réellement désirer faire semblant. Ainsi, il lui arrivait de mentir sans que l'envie y soit vraiment. Stiles se persuada qu'un jour, il n'aurait plus besoin d'avoir recours à ce moyen-là. Ses sourires ne seraient plus feints, ses yeux brilleraient à nouveau de malice.
Mais ce qu'il vivait n'était rien de moins qu'un nouveau deuil. Lié au premier, certes, mais différent de par sa nature. Stiles devait accepter que l'image de la mère qu'il avait toujours connue n'était pas réelle.
Elle, elle avait fait semblant pour de mauvaises raisons et ce, jusqu'au bout. Stiles, lui... Désirait simplement se donner un coup de boost. Il n'était pas pareil qu'elle... Il n'était pas elle.
- Pour cette fois-ci, je veux te surprendre.
La voix de Derek le ramenait à nouveau dans cette réalité à laquelle il devait s'accrocher. Celle qu'il désirait ardemment vivre. Cette fois-ci, son demi-sourire se fit un peu plus sincère, à tel point que quelque chose en lui se décrispa. Dans son ventre, toujours cette boule de chaleur qui reprenait de l'ampleur. Parce que Derek reprenait ses mots, cette idée qui séduisait depuis le départ une part de lui qu'il pensait endormie. Dans un sens, l'ancien alpha avait déjà gagné son pari : il le surprenait et ce, de plusieurs manières. Sa douceur en était une, son omniprésence en était une autre. C'était comme si Derek savait à quel moment lui parler, à quel moment agir. L'illumination se fit alors dans l'esprit de Stiles et celui-ci se sentit bête. Evidemment que Derek savait : il avait son odeur à disposition et sans être un loup, l'humain se doutait qu'elle devait être très parlante quant à son état émotionnel.
- Tu me surprends déjà.
Par ces mots, Stiles essayait de reprendre contenance tout en se forçant à prendre le chemin de l'honnêteté : s'il pensait sa comédie nécessaire, il la voulait limitée. Ce qu'il disait restait toutefois sincère et il essayait à sa manière de faire comprendre au loup-garou qu'il reconnaissait ses efforts. A moins que Derek se montre ainsi de façon naturelle : Stiles n'était pas assez familier avec lui pour oser le lui demander. Néanmoins, il se doutait bien que la vérité, si elle n'était point celle-ci, ne devait en différer que légèrement. Stiles sentait Derek tranquille et pouvait au moins lui accorder cela de façon sûre.
- Mais la prochaine fois, c'est moi qui te surprendrai, ajouta l'hyperactif sans réussir à faire disparaître ce rictus qui ne demandait qu'à rester apparent.
Parce qu'il ressentait l'envie de faire quelque chose pour lui, de lui montrer qu'il était capable de bien des choses – pas de se tuer, plus maintenant.
Si Derek ne sourit plus, il hocha la tête en guise de réponse. Stiles ne s'en formalisa pas : il avait vu son, y avait lu une espèce de chaleur qu'il commençait à reconnaître. Elle était toujours là, lorsqu'il le regardait.
Elle réchauffait son cœur.
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A la dérive
FanficStiles veut faire une bêtise, Derek l'en empêche. Il va alors tout faire pour comprendre alors qu'une menace nouvelle surnaturelle plane sur Beacon Hills. (Sterek et autres plus tard) (Disclaimer : header pas de moi / Tw appartient à Jeff Davis mais...