La surprise de Mme Célestine fut, une fois de plus, au-dessus de nos attentes.
Avant de nous faire entrer en cours, la prof fit se mettre en demi-cercle devant elle et la porte la vingtaine d'élève excités que nous étions. Elle annonça de la voix d'un conteur né :
-Attention, mes chers élèves... Vous vous apprêtez à pénétrer dans l'antre de la terrible sorcière des Mathématiques ! Vous devez retrouver de puissantes herbes médicinales qui sauveraient votre pauvre chat Tarzan d'une terrible maladie. Mais prenez garde ! Vous ne pourrez sortir avant de les avoir trouvés et la sorcière reviendra dans très exactement 50 minutes après sa cueillette de champignon quotidienne. Et si elle vous trouve... mieux vaut ne pas parler de ce qui adviendrait alors de vous ou de ce qu'il en restera...
Elle laissa planer un petit silence pendant lequel Ben et moi pensèrent la même chose en nous regardant avec de grands sourires ; « elle a complètement pété les plombs mais c'est comme ça qu'on l'adore. »
Et Mme Célestine ouvrit la porte.
La salle de classe n'en était plus une. Elle était métamorphosée. Là, un chaudron, ici une pile de vieux grimoire. Au mur, de vieux balais poussiéreux, des piles de grimoires aux allures anciennes s'étalaient sur une étagère et sur une table en bois usé, des baguettes aux arabesques mystiques. Les murs étaient recouverts de toiles d'araignées et de portraits aux visages laids et grimaçants.
La demi-classe des 3°5, passé son instant d'ébahissement en découvrant la salle s'organisa rapidement. Il fallait trouver des indices au plus vite et fouiller chaque recoin de la salle.
A tout hasard, je lu un papier scotché sur une commode en bois. Il y était inscrit qu'il me fallait remettre de l'ordre dans les ingrédients de la sorcière pour qu'elle ne fasse pas sa recette de ragoût de dragon à l'envers.
Je me doutais que cette recette de ragoût ne nous aiderait pas directement mais me mis à détester cette sorcière. Les dragons étaient créatures littéraires préférées ! On ne les faisait pas en ragoût !
J'ouvris tout de même un des nombreux tiroirs. Dedans, rien. Ah si, une sorte de chose maronnasse. Je compris alors le but de cet exercice qui n'avait presque rien de mathématique et esquissai un sourire. Il me fallait sentir les épices contenues dans ces tiroirs et les restituer dans l'ordre donné par le bout de papier nous donnant la recette du ragoût.
Les épices étaient ultra simples à reconnaitre. J'avais un odorat très développé. Je m'amusais souvent, pendant mes heures perdues, à partir dans la forêt ou à me poster à la fenêtre de ma chambre pour ressentir. Je me taisais, guettant le moindre son ou la moindre odeur en provenance des sous-bois. Je savais à présent différencier l'odeur et le pas d'un sanglier, d'un cerf ou d'un renard facilement. Je reconnaissais les oiseaux à leurs différents chants.
C'était parfaitement inutile dans la vie courante mais j'appréciais ces moments de calme qui me procuraient une sensation agréable. De plus cela me rapprochait des nombreux romans que je dévorais au fil des jours où les héros fantastiques chassaient en silence des créatures de plus en plus terrifiantes.
Je réussi facilement la restitution de la recette et ceci me permit de trouver des chiffres qui complétaient une équation découverte par un autre de mes camarades que nous résolûmes ensemble.
La fin de cet escape game se déroula aussi vite qu'une glace qui fond en été et il s'en fallu de peu que la sorcière nous prenne sur le fait mais nous pûmes finalement sauver Tarzan et tout le monde était ravi.
Malheureusement, Mme Rodriguez et son super-pouvoir de la nullité réussit à rabrouer cet enthousiasme et à plomber l'ambiance. Son cours fut aussi ennuyant que d'habitude et je ne pouvais même pas discuter avec Daphnée ou Ben car elle avait séparé tous les petits groupes d'amis de la classe pour que le silence règne.
Mme Rodriguez est prof d'espagnole, elle a cinq enfants et elle sort d'un congé maternité qui nous avait plus profité qu'à elle. Le professeur remplaçant, M Gontrag était génial. Un exemple de pédagogie et de « coolitude » comme dirait la petite sœur de Daphnée. Tout l'opposé de Mme Rodriguez qui a un don pour que les cours d'une heure semblent en durer 3.
Je poursuivais ma journée sur une agréable bataille de boule de papier en salle de permanence où le surveillant chargé de nous ''surveiller'' était un véritable escargot accroché à son téléphone portable qui se fichait complètement de ce que nous pouvions faire. Je pense même que nous pourrions repeindre la salle en rouge vif sans qu'il ne se rende compte de rien.
J'appréciais le collège des Ormes pour des tas de raison. L'ambiance était bonne et chaleureuse, les bagarres étaient rares et quasi inexistante, la cantine était bonne, le personnel (en général) était sympa et il y avait de la verdure dans la cour.
Nous mangeâmes de bonne humeur en compagnie de quelques amis de Ben forts sympathiques et sortîmes profiter des premiers rayons de soleil de la journée et de l'année et pour réviser notre contrôle de SVT.
Heureusement que j'avais bien suivi le cours et tout compris sur les neurones car Daphnée était complètement larguée. En même temps cette matière n'était clairement pas son point fort, contrairement à moi qui dépotais en SVT et en Physique-Chimie.
- Souhaites-tu que je dissèque ton cerveau pour que l'on puisse en étudier les neurones, demanda Ben à Daphnée.
- Non merci, répondit-elle.
- C'est étrange, intervins-je. Je ne connais personne d'autre que toi qui refuserait de ce faire ouvrir le crâne. Et c'est dommage aussi... je me serait fait une joie de gouter à ta cervelle.
Daphnée me jeta un regard faussement horrifié et s'enfuie vers le terrain herbeux.
- Vous n'aurez pas ma brillante cervelle bande de zombie !!!
Nous la poursuivîmes quelque temps mais je la rattrapais assez vite. J'étais de loin la plus rapide et la plus forte physiquement de nous trois.
On finit par s'allonger dans l'herbe verte, regardant le beau ciel bleu tacheté de quelques nuages à l'horizon.
- Salut les photons, murmurais-je quand un rayon de soleil vint caresser mon visage.
- C'est moi ou tu es bizarre ? Me demanda Daphnée.
- C'est moi ou tu ne le savais pas encore ? Répliquai-je avec un sourire en coin.
La sonnerie retentit alors.
- Zut ! S'écria Daphnée en se relevant d'un coup. Le contrôle de SVT !
- T'inquiète, lui dit Ben, se levant à son tour, tu pourras copier sur ta voisine alias l'intello des cours de sciences.
- C'était prévu, répondit-elle en m'adressant un grand sourire.
Je lui adressais un clin d'œil. C'est alors, tandis que nous nous dirigions vers l'entrée du bâtiment, que quelque chose dans le ciel attira mon regard.
- C'est quoi ce truc ? Demandais-je à mes deux camarades en m'arrêtant net.
- Certainement un rapace, répondit Ben. Dépêche-toi on va être en retard en cours.
Mais, fronçant des sourcils, je ne lâchais pas le rapace des yeux. Il s'était approché du second bâtiment, à l'opposé du notre. Malgré la distance, je voyais bien que ce n'était pas un rapace. Je plissai des yeux pour mieux voir.
Un instant, la sensation étrange qui me parcourait depuis le début de la matinée s'intensifia.
Et c'est alors qu'une partie du second bâtiment que j'observais s'écroula. Provoquant maintes hurlement et cris de stupeurs et de douleur.
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Elzémir
FantasyApolline est censée être normal dans la mesure de l'humanité car on a tous nos petits trucs qui nous rendent plus ou moins des autres. Elle aime ses amis, sa mère et son collège. Jusqu'à ce qu'elle se plonge dans un monde qui ressemble beaucoup trop...