Chapitre 8 - Léonard

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Je le regarde s'en aller alors que mon corps entier est pris de tremblement. Il ne pouvait pas savoir quel mot déclencherait une crise. Il ne sait même pas ce que j'ai. Mais qui le sait ? Je tente par tous les moyens de me calmer, de me reprendre en main. Je dois gérer ma douleur, il le faut.

Je n'ai pas compris pourquoi le voisin est venu me voir, suis-je une attraction ? Une distraction ? Ou s'inquiète-il réellement pour moi à cause de la dernière fois ? J'aimerai avoir des réponses à toutes les questions qui se bousculent sous mon crâne. Mais nous n'avons pas toujours ce que nous désirons.

J'entends ma mère et Hélios parler en bas. Je ne comprends pas ce qu'ils disent mais le bruit de leur voix me parvient.

Hélios... Quel joli prénom, quelle belle signification. Moi aussi j'aimerai être comme ça, joyeux, heureux, rayonnant. Seulement, je suis une masse sombre, informe, inintéressante, maudite aussi.

Mon prénom renvoie à un lion fort, ce qui est ironique quand nous savons que mon esprit est fragile. Le voisin a raison quand il dit que mon prénom n'est pas fait pour moi, qu'il ne me convient. Peut-être pas par rapport à sa simplicité mais à sa signification. Je n'ai jamais vu un prénom si mal assorti à un être humain.

La fatigue me submerge à nouveau, mes tremblements cessent, je redirige mon regard vers mes mains jointes, et je me laisse à nouveau sombrer dans le sommeil.

J'entends des coups contre une porte. Je ne réagis pas pensant que ce doit être dans mon esprit agité que le bruit est présent. Pourtant, les coups se font de plus en plus fort jusqu'à ce qu'ils cessent. Je soulève mes paupières et remarque qu'un raie de lumière filtre par la porte de ma chambre alors que la nuit est tombée. Des pas se rapprochent de moi, la porte se ferme, une chaise est retournée dans ma direction et une personne s'y assoit.

Je n'ai pas d'autre choix que de me redresser. Je n'ai pas changé de position depuis que je me suis endormi. Je suis toujours collé au mur assis et recroquevillé. La personne allume les lampes présentes sur mon bureau pour éclairer suffisamment la pièce afin que je la voie. Il s'agit d'un des médecins qui me suis. Je ne l'apprécie pas. C'est un faux gentil. Je n'aime pas quand il vient me voir, je ne me sens jamais en sécurité, toujours agressé. Je vois plusieurs médecins et différents psychologues tout au long du mois comme si j'étais une bête de foire et aucun d'eux n'a su faire remonter la raison de mon état. Personne n'en est capable.

Je ne le supporte pas à sa manière de rentrer dans ma chambre aussi, je déteste ça. Il toque de toutes ses forces pour ensuite devenir invisible et ne plus faire de bruit. Il cherche à me faire peur, à déclencher une réaction en moi, c'est pour ça que maman ne me prévient jamais de sa venue, il a ses manières à lui et je ne peux pas les supporter.

— Bonsoir Léo, comment te sens-tu aujourd'hui ? me demande-t-il avec son faux sourire et un stylo coincé entre ses doigts prêt à noter la moindre chose me concernant.

Encore ce surnom, ce diminutif. Comme si mon prénom ne signifiait rien, comme s'il ne m'appartenait pas et qu'il fallait, pour que je réagisse, le changer. Je n'aime pas qu'on ne m'appelle pas par le prénom que mes parents ont choisi, ça me donne l'impression d'être mort pour de bon, d'avoir disparu. Pourtant, j'ai besoin qu'on me le répète encore et encore, ça me prouve que je suis encore en vie.

Alors je ne réponds. D'un part par esprit de contradiction, d'autre part parce que même si je le voulais, je ne pourrais pas prononcer un mot. J'aimerai pouvoir parler mais j'en suis incpable. Et lui, ce fameux médecin ne le supporte pas, il croit que je veux juste l'embêter, que ça m'amuse de ne pas pouvoir communiquer correctement.

— Bon, reprend-il presque exaspéré.

Un médecin ne doit-il pas être calme ? Neutre ? Doux ? Compréhensible ? Ne pas perdre patience ? Accompagner son patient durant sa chute, sa convalescence et sa guérison ?

L'ombre à la fenêtreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant