Hélios m'a promis et il a tenu parole.
Chacun de ses derniers jours, il a toqué à ma porte, s'est assis sur le sol à mes côtés et m'a apporté des morceaux de carotte. Un jour sûrement j'en aurai marre d'en déguster, pour le moment, j'apprécie car ce sont des instants suspendus que nous passons tous les deux. Il me tient la main, j'entrelace nos doigts, il me raconte sa vie et je souris. C'est à peine un rictus mais c'est un pas si grand que je ne peux m'empêcher d'avoir peur qu'il me délaisse.
Pourtant, à chaque fois, Hélios revient. Il a une patience infinie. Il mange avec moi, me regarde pleurer, me tend des mouchoirs, m'enlace pour me réconforter maintenant que je le laisse me toucher et me murmure des mots à l'oreille qui font taire les voix incessantes qui hantent mon esprit en me disant que je serai toujours un moins que rien. Il écoute mes peurs et les accepte. Je continue d'écrire dans le carnet ce qu'il me passe par la tête, et lui, il le lit attentivement ajoutant des petits cœurs de ci et là pour me montrer qu'il est présent même au cœur de mes tourments. Mon âme s'accroche un peu plus à lui à chaque seconde qu'il passe à mes côtés, j'ai l'impression que c'est réciproque même si je n'ose pas y croire.
Je dois le dégoûter un minimum non ? En tout cas, moi, je me répugne. Mon corps n'est pas sain, mon esprit est noirci et je me détruis un peu plus à chaque instant. Qui pourrait aimer un homme qui crée son propre enfer pour résister à celui qu'on lui à infliger ?
Aujourd'hui c'est Noël. Je dois sortir de la maison, me rendre chez la voisine et être poli. Je ne dois pas pleurer, pas quitter la table en courant, ni aller me couper assis sur le sol froid de la salle de bain. Je dois être un « bon enfant », rendre fière ma maman comme quand j'avais huit ans et ne pas faire de vague. Je ne sais pas si je m'en sens réellement capable mais je veux essayer.
Quand j'arrive dans le halle d'entrée pour enfiler mes chaussures ainsi que mon manteau, ma mère m'attend déjà vêtue et portant un grand sac à bout de bras. Elle aime acheter trois tonnes de cadeaux et préparer beaucoup trop de nourriture. Noël est une des périodes de l'année qu'elle préfère car c'est avant tout, pour elle, une fête de famille où la bonne humeur règne et où les rires sont toujours francs. Je crois bien qu'elle n'a jamais été croyante mais elle s'en fiche, il est inscrit sur son calendrier et dans ses traditions familiales alors elle perpétue le rituel même si ses parents sont décédés il y a quelques temps maintenant ; un accident est si vite arrivé. Depuis, elle fait tout pour que chaque festivité soit encore meilleure que celle de l'an passée et elle y arrive.
Notre porche est de plus en plus envahi de guirlandes lumineuses, notre jardin de bonhomme de neige gonflable et de nains de jardins ou de lutins, tandis qu'à l'intérieur de notre maison, on se croirait au cœur de l'atelier du père-noël. Il devrait d'ailleurs songer à l'embaucher, ça lui plaira davantage que son actuel boulot où elle méprise ses collègues et rêve - pas si secrètement - que son boss se casse une jambe, voire pire. Un démon sommeil en elle.
En sortant de la maison, une angoisse sourde monte en moi, j'ai du mal à respirer mais j'avance, un pas après l'autre. Je tiens tête aux voix et à mes démons. Ma mère est là, rien ne peut m'arriver. Ou en tout cas, c'est ce dont j'essaye de me persuader. Je plonge mes mains tout au fond de mes poches, rentre ma tête dans mes épaules, cache ma peur et me dis que je suis fort. Je me souviens alors des mots que m'a glissé Hélios : « Tombes, je te rattraperai. Cours, je te suivrai. Brilles, je t'éclairerai. Pour ça, il te suffit de respirer, quant à moi, je prendrai soin de te faire exister. ». Ces phrases qu'il a pris le temps de murmurer alors que mon cerveau était encore brumeux de m'être frappé contre le mur de ma chambre. Ces promesses qu'il m'a dites droit dans les yeux avec une tendresse infini et une conviction inflexible. C'était il y a quelques jours.
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L'ombre à la fenêtre
Teen FictionLéonard, ne sort pratiquement jamais de sa chambre qu'il voit comme sa bulle, le seul endroit où il est en sécurité, loin de ses troubles et de la haine. Un jour il découvre qu'un jeune homme s'est installé dans la maison d'en face, bousculant ses h...