Un Chanteur à New York

Chapitre 15

Dans les coulisses, mon corps palpitait sous les éclats des projecteurs qui esquissaient une estrade vide et les veines de mon front bouillaient sous la pression des âmes passionnées qui se figeaient sur l'immense terrain de tournoi sportif. Ils étaient des milliers à briller comme des étoiles avec les flashs de leur smartphone et étaient pressés de rencontrer leurs idoles. En les observant, je pouvais deviner que personne n'aurait pu souhaiter les décevoir, tellement l'engouement était grand. Je sentais, en plus de cela, toute cette ferveur d'accroître à chaque mouvement de plateau, mais le temps passait et nous n'étions toujours pas prêts.

— Quand est-ce qu'il arrive ? m'affolais-je auprès de la foule de techniciens. Pourquoi Maxence n'est pas là ?

— Aucune idée. répliqua Issan visiblement aussi étonnée que moi.

Je m'arrêtai net, étonnée qu'il me tienne la parole. Cela faisait deux jours qu'il n'osait pas décrocher un mot, mais le voilà qu'il me reparlait comme si de rien n'était. Naturellement, je ne pouvais m'empêcher d'angoisser à un moment aussi propice et Issan était le premier à l'avoir décelé. C'était le grand soir et nous étions à l'aboutissement même de 10 années d'acharnement. Et pourtant... Celui qui devait être là, se glissait indéniablement dans la liste des abonnés absents. Il s'était évaporé de cette vie tumultueuse comme un spectre incandescent sous les rayons de la lune.

— Cela fait au moins une dizaine de minutes qu'il devrait être monté sur scène. ajoutais-je tout en essayant de garder la tête froide. Quelqu'un a-t-il au moins des nouvelles ?

— Il ne répond pas à son téléphone.

Qu'il ne soit pas présent était une chose, mais que Maxence ne dédaigne décrocher un mot à son équipe, était une autre histoire. Une histoire qui ne me plaisait pas du tout.

— Est-ce que quelqu'un sait où il pourrait se trouver ?

— Non, même à l'hôtel, il n'a pas donné signe de vie.

—Je dois partir...

Je commençais à préparer mon sac et à clipper la fermeture, puis je m'approchai de la sortie la plus proche pour fuir en toute discrétion. Cependant, alors que je me croyais sortie d'affaire, Issan s'introduisit sur le chemin en plein élan et me barra le passage. Il était d'ailleurs tellement imposant qu'il obstruait toute l'ouverture et je ne pouvais plus passer.

— Tu n'iras nulle part.

— Il a besoin de moi... Je ne peux pas le laisser comme ça.

— Est-ce que tu en es sûre ?

Issan avait la voix posée, il semblait avoir deviné ce qu'il s'était passé entre Max et moi. Je m'étonnais d'ailleurs que celui-ci ait encore le droit de m'adresser la parole, mais je savais que ce n'était pas pour longtemps et lui aussi. Le producteur avait fini par avoir la main mise sur nous tous ici présent et ce n'était plus un secret. Issan tourna alors la tête et se frotta les paupières jusqu'à ce que ces globes se tintent d'un liquide pourpre. Puis, il reprit comme s'il avait envie de se rectifier.

— Tu seras plus utile en restant ici.

— Pourquoi ?

Je sentais Issan perdre patience. C'était la première fois que je le voyais aussi inquiet.

— Peut-être, qu'il a besoin de s'éloigner de tout ça.

— S'éloigner de tout ça ou de moi ?

— Tu serais plus utile en montant sur scène, crois-moi.

— Je ne monterai pas sur cette putain de scène...

— Pourquoi ? C'est toi qui as écrit plus de la moitié de ses textes. Non ?