Intempéries (1/2)

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Lorsque vint l'après-midi, une forte averse de pluie se déversa sur l'île entière entraînant avec elle une grande agitation des arbres.

Dans le salon secondaire, Catherine, accompagnée de Jacob, buvait une tasse de thé chaud, assise sur un grand pouf beige appuyé contre un mur.

Repliant ses jambes sous elle, elle s'était parée d'une couverture en raison des petits frissons que lui procurait le froid.

Avalant une gorgée de son thé encore fumant, elle déposa la tasse sur la petite table vitrée et porta son regard vers la baie transparente.

- Au point où j'en suis il ne me manque plus qu'un bon livre et ce sera un moment idyllique. confia t-elle à Jacob.

- Ce temps est nul à en crever, pas étonnant que la chaleur aie été aussi torride ce matin.

Catherine pencha la tête sur le côté.
- Tu veux rire ! Moi j'adore ça ! Le bruit de la pluie, l'odeur de la terre et des arbres qui me...

- Les goûts et les couleurs ne se disputent pas darling ! fit remarquer Jacob. L'odeur de la terre ! Faut croire que je ne suis pas aussi passionné que toi, ça ne me rappelle que des mauvais souvenirs. ajouta t-il l'air pensif.

- Ah oui ! Tu veux m'en parler ?

Jacob vida d'un trait la bouteille qu'il tenait à la main, puis se pencha en avant un sourire taquin sur les lèvres.

- Ne vas pas croire que parce que tu as bien voulu me pardonner, je vais compatir et te raconter ma vie.

Catherine lui jeta un des coussins au visage .
- Arrêtes de faire l'idiot, ça n'a aucun rapport, je veux seulement savoir. Vas-y raconte ! insista t-elle.

Se tenant immobile, il gardait le regard fixe. Les souvenirs étaient aussi frais que s'ils avaient eu lieu la veille. Ils étaient encore douloureux, mais nullement comme avant sa thérapie.

Tout autrement, il se sentait fier d'avoir surmonté seul ce pénible calvaire. Ce qu'il ne voulait pas en revanche, c'était le regard de pitié dont on le recouvrirait si jamais il en parlait. C'était ça l'horreur !

Pour une raison ou pour une autre, il se sentit cependant en confiance à pouvoir lui parler en toute honnêteté.

Encouragé par le regard d'intérêt qu'elle lui portait, il débuta :
- Tu dois penser... Tout le monde doit penser que je suis né avec une cuillère en or dans...

- Et c'est pas le cas ?

Jacob leva son index et ferma les yeux.
- Je déteste qu'on me coupe la parole, si tu l'avais bouclé tu aurais déjà su toute l'histoire.

Catherine fit mine de se coudre la bouche signe qu'elle ne le dérangerait plus.

- Merci ! Bon ... Où en étais-je ? Ah oui... Je disais donc, tout le monde doit penser que je suis né avec...

- Argh ! s'impatienta Catherine, tu l'as déjà dit celle-là : " tout le monde doit penser que tu es né avec une cuillère en or dans la bouche" et apparemment tout le monde s'est trompé, mince ! ajouta t-elle ironique.

- Tu m'as encore coupé !

- Obligée !

Reprenant son sérieux, il continua :

- J'avais huit ans, je venais de fuguer de mon nouveau foyer où je n'étais qu'un simple bon à rien, du moins c'est comme ça qu'ils m'appelaient là-bas.

Sans savoir pourquoi, j'ai couru pendant... je ne saurais te donner un temps précis, mais ce qui est sûr, c'est que j'ai couru longtemps.

Je me suis arrêté à la première gare trouvée pour reprendre mon souffle, j'étais terrifié, c'était ma première fugue, je n'avais nulle part où aller, personne à qui parler... Bordel ! Je n'étais qu'un gamin...

L'énigme Du Cœur Brisé Où les histoires vivent. Découvrez maintenant