...je n'ai pas besoin...

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Je n'ai pas besoin de les voir pour entendre le grésillement des fusils à propulsion électromagnétique et les grognements des chiens.
Je déglutit.

Vaincue.

Incapable de détourner le regard de celui d'Abimola.

Il ne sert à rien de mentir.

Mais comment avouer la terrible vérité de ce que nous étions en train de faire ? J'aimerais croire que ces femmes peuvent se montrer empathiques, mais les fusils chargés et les babines retroussées des bêtes me font douter.

— On reprend la route, annonce courageusement Yemaya en s'avançant d'un pas, comme pour prendre seule la responsabilité de nos actes.

Abimola hausse un sourcil.

— Sans dire au revoir ?

Son ton est mielleux.

Dangereusement doux.

— Tu ne nous aurais pas laissé partir, tenté je en essayant de dissimuler les tremblements de ma voix.

— Moi, Abimola ? s'étonne la vielle femme en posant une main sur son cœur.

L'atmosphère devient lourd, ma peau s'humidifie de sueur et une boule se forme dans ma gorge.

— Tu avais promis de nous donner des vivres pour le voyage au bout de deux jours, tu ne l'as pas fais.

— Et vous avez préférez les voler ?

Je déglutis encore une fois. Ma gorge est sèche.
Aucun de nous ne lui répond.
Elle nous fixe tour à tour avant de soupirer longuement en se passant une main sur le visage.

— Repartez d'où vous venez.

Son ton est tranchant, dissimulant à peine la menace. Une sueur froide me glisse dans la nuque et la boule dans ma gorge se resserre.

— On ne restera pas ici.

— On ? Tu continue de te placer à leur niveau ? Tu n'es qu'une Nervidienne, Fayyisa, personne te cherche, personne t'attends.

Son expression a changé, sa voix aussi. Elle n'a plus rien à voir avec la femme qui nous a accueilli.

— Revenez sur vos pas.

Pourquoi tu es si déterminée à nous faire rester ? On est quatre bouches de plus à nourrir et à respirer ! intervient Yemaya.

— Vous êtes déterminés à courir vers votre mort.

— Si on reste ici on mourra aussi, les chasseurs nous trouverons et votre camp sera compromis, j'interviens.

— Faites demi-tour, gronde t'elle.

Mon cœur tambourine dans ma poitrine, je retiens l'envie de reculer face à la violence de son ton.
Ses yeux se sont assombrit, elle est beaucoup plus menaçante maintenant qu'elle ne se cache plus derrière des sourires hypocrites.
Soudain je croise le regard de Neville dans le groupe. Elle se fait discrète dans le fond avec sa capuche rabattue sur son visage. Je vois difficilement ces yeux dans le noir, mais je fini par réaliser qu'ils sont plein de culpabilité, de pitié.

Pitié pour toi.

Pitié pour nous.

Louche.

Il y a quelques chose qui nous échappe. Un détail important.

Elle ont besoin de vous.

Besoin ? Qu'avons nous dont elles auraient besoin ? De la main d'œuvre ?

ALKEBULAN T.1.Le cœur du mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant