« La force ne naît que par la lutte et par l'épreuve. »
Saint Enfalor le lumineux
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Dans les ténèbres de la vallée, sur le tracé des routes, des chemins et des sentiers, deux petits points se déplaçaient : c'étaient les lanternes des assassins de la famille Orion, les charrieurs de mort en travail. Ils chevauchaient deux bubuflons fendant le vent avec célérité. Les bêtes étaient immenses ; les pattes épaisses comme des piliers, de longues oreilles pendantes, une barbe raide à la mâchoire inférieure, une toison blanche épaisse et abondante venant couvrir leurs apparences autrement inquiétantes. Les cornes du bubuflon, rapprochées et renflées à leur base avant de se recourber vers l'arrière puis de se diriger vers le haut, formaient une sorte de casque terminé par des pointes acérées. Contrairement à son apparence effrayante, l'animal appartenait à une race docile, paisible au milieu de son clan, secourable pour ses congénères et facile à élever. Attaché par des cordes et des allonges au milieu de l'abondante toison laiteuse d'une des deux bêtes, le jeune garçon avait repris connaissance. Meurtri par la douleur et la fatigue, il n'avait même pas essayé de s'enfuir, il revoyait sans cesse la mort d'Elise dès qu'il fermait les yeux.
Les bubuflons galopaient vers l'Est. Port Nuo se trouvait sur la côte Ouest de l'île, toute l'activité s'y concentrait. L'Est était essentiellement constitué de falaises où l'océan venait se briser, les habitants avaient donc laissé cette partie de l'île inhabitée, cette partie était surnommée la Côte Sauvage. Personne ne viendrait le sauver dans cette direction. Les bubuflons se mirent à ralentir, les secousses de leurs courses commencèrent à s'espacer, et le corps du garçon cessa de ballotter. Il se sentit soudain soulevé avant d'être lâché au sol comme un sac de patates. Un cri de douleur lui échappa lorsque son épaule droite frappa lourdement le sol. La pression des cordes autour de ses chevilles se relâcha. L'un des deux individus cagoulés avait coupé ses liens. Les deux assassins ôtèrent leurs cagoules et les jetèrent dans les herbes. Les deux hommes avaient la trentaine, estima le garçon. Le plus grand des deux, celui à la voix rauque, avait les cheveux courts bruns avec une balafre sur le coin de l'œil ; son compagnon à la voix fluette était un vilain rouquin avec un gros nez et des taches de rousseur. Les deux hommes avaient cependant un train en commun, ils avaient un tatouage sur le front. Il s'agissait d'une tête squelettique avec deux serpents enroulés de part et d'autre du crâne. Le jouvenceau reconnut le symbole immédiatement : celui des adorateurs du Dieu de La Destruction.
Le culte le plus infâme de tout Albion trouvait ses origines dans une époque lointaine avant même la création des grands empires plus de mille ans auparavant. Lors des grandes guerres qui secouaient alors le continent à l'époque, les adorateurs du Dieu des morts et de la destruction avaient commencé à pulluler à travers le monde. Ne reculant devant aucune ignominie pour honorer leur Dieu, les cultistes avaient reçu de lourds tributs de part et d'autre pour éliminer les ennemis de leurs employeurs. Ils avaient alors gagné en influence jusqu'à devenir la principale force souterraine d'Albion devançant toutes les pègres et autres organisations criminelles. Impliqué dans tous les génocides, tortures et crimes humains les plus atroces, il aura fallu attendre l'impulsion de la famille Matris, les fondateurs de l'Empire de Bonys dont les descendants dirigeaient encore aujourd'hui, pour voir une résistance apparaître. Ils organisèrent un conseil entre tous les grands chefs d'État où la décision unanime fut prise de se débarrasser de cette secte. Quatre cents ans plus tôt, le culte de la Destruction avait été chassé à travers le monde, et bien qu'on se doutât qu'il en restait des membres, ceux qui avançaient auparavant au grand jour avaient dû disparaître et se cacher pour survivre.
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Seis: Les Ruines du Vent
Science FictionUn jeune batard vit dans les royaumes pauvres et désolés du Nord de la planete Albion. Il n'a presque rien, mais un coup du sort l'envoie en prison pour un crime qu'il n'a pas commis.. Il n'a d'autres choix que de devenir plus fort ou mourir. Il au...