Chapitre 46

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Les bras gluants de chair du Flagelleur se déplaçaient lentement de rayons en rayons. Nous avions dû nous cacher, sans pouvoir aller plus loin que la boutique car Elfe a marché sur quelque chose ce qui a attiré la curiosité du monstre.

On reprenait nos esprits, calmant nos respirations pour ne pas qu'il nous remarque. Nous nous étions cachés derrière la caisse lorsque un mannequin portant les mêmes vêtements que ma sœur soit projeté jusqu'à nous. La peur nous traversa tous lorsqu'on comprit qu'il en avait vraiment pour Elfe. S'il était capable de s'en prendre à un mannequin qui portait les mêmes vêtements qu'elle, alors il pourrait très bien lui faire pire.

Je fermai les yeux, essayant de me concentrer sur mon souffle qui avait bien du mal à se calmer. On entendit un ballon éclater et le Flagelleur s'en approcher très rapidement. On se décida à fuir au même moment pour mieux se protéger. Je pris ma sœur par le poignet et nous nous mîmes à courir.

On a traversé bon nombre de couloirs jusqu'à atteindre l'extérieur. On se permit de ralentir étant donné que le Flagelleur avait miraculeusement disparu. On pensait qu'il n'y avait plus personne à part nous et quelques soldats russes morts. Mais c'était sans compter Billy qui se trouvait juste devant nous. Son corps était recouvert de veines noires. C'est fou ce que ça pouvait le rendre presque sexy. Mais je ne pouvais pas penser à ça sur le moment.

-Courez à l'intérieur ! hurlais-je aux adolescents.

Mon corps resta figé quelques instants, mes yeux perdus dans ceux de Billy, remplis de larmes et de rougeurs. Je me mettais soudainement à réaliser tout ce qu'il se passait. Et je le sentais. Ça allait mal se finir. Ses yeux scrutaient les miens. Il paraissait soudainement moins dangereux, et plus désespéré. Il semblait tout autant dépassé par les événements. Je le sentais s'approcher de moi lentement.

-JULIETTE ! VIENS VITE ! me cria Max.

Elle me sortit de ma transe et je me mis à courir dans sa direction avant qu'elle ne ferme les grilles du parking de livraison. Nous traversâmes encore une fois les couloirs. Mike et Max aidait Elfe à marcher même si c'était difficile. J'ouvrais la marche essayant de trouver un endroit plus sûr pour que l'on s'y réfugie. On arriva devant un ascenseur, j'appuyais frénétiquement sur le bouton pour qu'il s'ouvre.

-Putain aller ouvre-toi !

J'étais concentrée là-dessus tout comme Elfe et Mike lorsqu'on entendit Max.

-Billy, commença-t-elle, t'es pas obligé de faire ça. Tu t'appelles Billy, Billy Hargrove. T'habites au 4819 Cherry Lane. Il faut que tu me crois ! Je suis Max !

A peine avait-elle finit que nous vîmes Billy lui asséner un énorme coup de poing dans le visage. C'était de plus en plus réel. Elfe hurla face à cette vision que nous avons vécu.

-MIKE NON !! lui hurlais-je en le voyant s'engager vers Billy.

Ce dernier ne se fit pas prier pour prendre Mike, qui devait être léger pour lui, et le balancer contre des tuyaux. Je pris ma sœur en mode princesse et commençai à courir. Elle pleurait sûrement plus que moi. Je me devais de tenir le coup pour elle même si c'était mon copain, là devant nous, qui n'était plus lui-même et qui faisait du mal même à sa sœur.

Dans ma course, je sentis un poids frapper au niveau de ma cheville. Le sol rencontra rapidement mon corps et celui d'Elfe. Aussi absurde que cela paraissait, Billy m'avait fait un croche-patte efficace. Je me relevais difficilement, et toucha mon front en sentant un liquide chaud s'écouler sur mon visage. Je saignais de l'extérieur comme de l'intérieur. Mon corps était en train de se liquéfier. Je me retournais pour faire face à Billy qui s'était arrêté.

Quelques longues secondes semblèrent passer jusqu'à ce que je vis Billy lever son poing. Avec toutes les techniques de self-défense que mon père m'avait apprise, je réussis à appréhender et à éviter le coup. Seulement, il était bien plus fort que moi, alors que j'allais lui rendre la pareille et lui mettre une droite, sa main intercepta la mienne et son autre main vint encadrer mon cou. Il me poussa contre un mur. Je sentis mes épaules et ma tête crier de douleur face à la brutalité de sa poigne.

Mon souffle commençait à se faire court. Mes mains tentèrent d'atteindre le torse de Billy pour le faire arrêter, le repousser. Seulement, sa poigne se fit de plus en plus lourde. Je prenais des petites inspirations, essayant de donner de l'énergie pour que mon cœur batte encore. J'entendais simplement Elfe crier mon nom mais la dernière vision que j'ai eu c'était... Billy, le visage lisse, éclairé par le soleil, un sourire aux lèvres qui murmura :

-Je t'aime.

Et je m'en allai.

Je ne savais où mais la réalité semblait de plus en plus loin.

Je me réveillai dans un endroit bien connu. Chez moi. Et non pas au chalet. Non pas dans le mobil-home. Mais avec ma mère, mon père et... et Sarah. J'étais dans ma chambre et le soleil baignait dans la piece. La fenêtre était ouverte et le vent caressait doucement mon visage. J'ouvris les yeux et les refermais, le temps de m'habituer au soleil. Ça faisait longtemps que je ne l'avais pas vu et que je ne l'avais pas senti sur ma peau. Étant donné le temps que nous avions passé dans ce centre-commercial.

J'essayais de remettre tout en ordre dans ma tête. Je me souvenais de pratiquement tout mais pas de comment j'étais arrivée là.

Est-ce qu'on avait réussi ? Est-ce que le Flagelleur était mort ? Est-ce qu'en descendant je découvrirait juste ma mère qui m'annoncera qu'elle a décidé de retirer la garde à mon père à cause de ce qu'il s'était passé. Est-ce que je vais voir mon père ? Et Elfe ? Et Billy, était-il toujours en vie ? Je devrais tenter de prendre ma voiture et d'aller chez lui, voir s'il allait bien, tout comme Max. Et tous les autres aussi.

Je me levais, sentis ma tête tourner quelques secondes et me dirigeai vers mon miroir. Mon visage semblait terne et pourtant j'avais juste l'air d'avoir mal dormi. Aucune trace de sang sur mon front, aucune égratignure. Une personne normale.

Je commençais à stresser, à ressentir une boule se former dans mon estomac. J'allais ouvrir la porte lorsque une personne fit irruption dans ma chambre. Ses petits bras vinrent entourer ma taille afin de m'étreindre avec force. Je restais bouche bée, je n'osais pas bouger et regarder ce qui venait de me prendre dans ses bras.

-Tu m'as tellement manquée grande sœur.

Je n'en revenais pas. Mes yeux tentèrent difficilement de ne pas lâcher une seule larme mais c'était peine perdue. Une puis deux puis tout un torrent. Je m'accroupis à sa hauteur et vins encadrer son visage de mes mains. Mes doigts décalèrent quelques unes de ses mèches alors que j'observais son tendre sourire prendre place sur son visage.

-Tu m'as manquée aussi Sarah.

À l'aube de l'autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant