Chapitre XVIII

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Face à nos adversaires, qui plus est, semblent être des meurtriers, Kariad était décidé à sauver sa peau. Je l'étais aussi, mais, disons que mes principes ne me permettaient pas d'abandonner des camarades. Néanmoins, je ne risquerai pas ma vie pour eux. Mais je ne les abandonnerai pas lâchement, je n'ai pas le sentiment que la lâcheté est une valeur qui me correspond. Mais l'héroïsme ne l'est pas non plus. Solvay, de son côté retient désespérément Ella qui, décidée à sa manière, poursuivait ses pas vers l'ennemi. Je porte mon regard vers les tunnels devant lesquels nous avions déjà fait notre chemin, un peu plus tôt. Je me demandais si ces derniers conduisaient là-haut, ce serait une manière intéressante de les prendre par surprise. Je fais alors signe à Kariad, dont le visage était désormais tout pâle, de me rejoindre pour emprunter les tunnels plus bas. Je ne comprends pas comment cet homme a pu rejoindre l'escouade des Corbeaux, tous les autres soldats d'Azarias sont courageux ou au moins doués dans un domaine, Kariad ne me semblait pas être hors du commun.

— Non. Répond-il de la manière la plus insensible qui soit.

Je le soupçonne son âme d'avoir quitté son corps. Je suis certaine qu'il s'est alliée à Ella et Solvay pour leurs atouts, des héritiers qui sont, en plus de cela, des soldats de Garde Royale, ils n'ont rien à envier aux Corbeaux.

— On doit faire quelque chose, lui dis-je en attrapant la manche de sa chemise bleue que je secoue.

Il ne bouge pas et Ella était là-haut, accompagnée de Solvay. Elle s'était mise à la recherche des deux héritiers dans les tunnels alors que ces derniers s'étaient enfuis dans ces trous. Elle n'a pas froid aux yeux, elle me fait penser à Jana.

— Kariad ! L'interpellé-je à nouveau, en secouant cette fois tout son bras.

— Artemis... Je ne suis pas un héritier courageux, je suis ici uniquement parce que je ne voulais pas qu'on me prenne mes pouvoirs.

Je crois que Solvay m'avait déjà dit quelque chose de similaire. Mais je ne parviens pas à m'en souvenir nettement alors je l'interroge du regard, sans dire un mot.

— Tout le monde sait que je suis un héritier, je n'ai pas eu besoin de recevoir une invitation comme d'autres héritiers, avoue-t-il, si je refusais de me présenter au tournoi, je n'aurais plus eu que mon sang pour témoigner de mon appartenance à la lignée royale, mes enchaînements, eux, me seraient destitués.

— Toi au moins, tu étais prévenu ! Pesté-je. Tu te plaindras plus tard de ton sort, là, nous devons aller aider les autres.

Il me regarde à nouveau d'un air perdu, voire absent. Et je ne perds pas mon temps à l'attendre. Je descends les marches jusqu'à atteindre la première entrée d'un tunnel, j'inspire profondément et m'incruste dans cette allée noire. Les pierres rouges étaient la seule source de lumière dans ces lieux, mais plus je m'enfonçais et moins elles brillaient. J'inspecte tous les recoins, mes bras s'élançaient en avant pour prévenir le moindre mal qui pourrait survenir, tâtonnant à chaque recoin les bouts de l'arbre. Bientôt, j'atteignais un rayon de lumière, c'était une sortie qui débouchait vers les escaliers, mais étrangement, je ne me trouvais pas en haut de l'arbre comme je le pensais, mais tout en bas.
Je risque d'arriver trop tard s'il arrivait quelque chose à Solvay ou Ella, je regrette sincèrement de ne pas avoir pris des cours de défense auprès des Corbeaux. Le seul qui était auprès de moi maintenant est un abruti qui n'arrive pas à faire quelques mètres pour aller sauver des camarades !

Je dois garder mon sang-froid si j'espère aider les autres. Mais nous devons faire vite, la lettre était claire : à la nuit tombée. Notre épreuve prend donc fin au coucher du soleil. Je poursuis mon chemin en faisant abstraction de la colère qui montait en moi. J'emprunte une nouvelle entrée vers les tunnels, espérant cette fois rejoindre les autres, si je ne trouve pas de sortie vers Ella et Solvay, je vais de voir les rejoindre en empruntant les escaliers, je serais alors de nouveau à découvert. Les tunnels ont au moins le mérite de nous permettre de se fondre dans la masse. Bien que nos tenues bleues ne passent pas inaperçu dans cet arbre. J'avoue me demander comment Ella pouvait se déplacer avec sa longue robe, elle n'avait même pas pris la peine d'en couper le bas comme je l'avais fait pour la mienne.

Le Tournoi de la Couronne - PitosheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant