Chapitre XI

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Vingt-deux jours s'étaient écoulés depuis cette désastreuse journée. L'hiver était encore à plusieurs semaines, mais le froid avait déjà installé son nid. Le vent glacial de l'océan et les tempêtes avaient emporté le navire, allongeant ainsi notre voyage. De là nous avions longé les côtes Adegariennes pendant plusieurs jours avons de laisser le Perchoir, bateau de l'escouade des Corbeaux, dans un port qui était sous l'ordre de l'armée navale. Puis nous avons marché, énormément marché, du port qui se trouve à l'ouest du pays jusqu'à la capitale Adegarienne, qui était au nord-ouest. Nous en avons eu pour sept jours de marche avant que des soldats Adegarien ne nous escortent, une partie en carrosse et l'autre à cheval.

Si mon corps s'était amaigri, ce n'était pas le cas de Pénélope qui avait considérablement pris du poids. Cacher son état ne sera plus possible pour longtemps. Ses nausées et vomissement étaient justifiés sur le bateau, mais sur la terre ferme, c'est une toute autre histoire. Yaman et Jana semblent d'ailleurs avoir de sérieux doutes là-dessus, je sais qu'ils font simplement semblant de ne pas le savoir, et je sais aussi qu'ils ne diront rien. Peut-être savent-ils que le père n'est autre que Horace, ce qu'ils ignorent, c'est que cet enfant est le fruit de leur amour, et non d'un viol, pensé-je en reposant mon visage sur le velours du carrosse.

Depuis mon altercation avec le soldat de l'armée navale. Non. Depuis que le soldat de l'armée navale s'était jeté sur moi pour son alcool : Vincent, Grizel et moi-même ne nous adressions plus la parole. Le même alcool qui a coûté la vie à Vanélopé, la jeune espionne Princienne qui s'est vue offrir un fruit maudit.

Sept et moi sommes étrangement devenus amis, si nous pouvons appeler ça comme ça. Disons que lui au moins ne me déteste pas. Mais le plus important est que ces vingt-deux jours aux côtés des Corbeaux m'ont appris plus de choses que je ne le pensais sur Adegar, non sur Araskan tout entier.

— N'es-tu pas angoissée ! S'exclame soudainement Pénélope dont la toilette était pleine de déchirures indéfinies provoquées par ses ongles.

— Vous n'avez pas à l'être, dit Jana d'un ton qui se veut rassurant, la cour, le peuple, le château, vous vous y plairez ! Et puis vous n'y passerez que deux jours...

Deux jours, se moque-t-elle de nous ? Deux jours, cela est parfaitement suffisant pour qu'Azarias trouve le moyen de me faire porter tous les crimes de l'humanité sur le dos. La guillotine, ou peut-être l'exil ? Non pire encore : quelqu'un ici pourrait reconnaître Pénélope !

— Tu dis ça parce que tu y vis ! Empeste Pénélope.

— J'y travaille, précise-t-elle, les corbeaux habitent dans des camps d'entraînement au nord de la capitale.

Comme aurait fait une enfant, Pénélope dévie le regard de Jana avant d'émettre un long soupir. Sa tenue raffinée n'allait pas avec le ton qu'elle empruntait. Elle portait une belle et longue robe rose pâle, doublée d'un corset de la même couleur et qu'elle n'avait pas aussi serré qu'elle n'en avait l'habitude. D'un geste régulier, elle tapait des pieds au fond de ce carrosse abîmé jusqu'à en déranger Jana qui gardait tout de même son calme. Même si nous n'étions que trois, j'avais l'impression que l'air me manquait et, mon souffle se coupe réellement en apercevant la beauté du paysage qui s'offrait à moi. Au loin, je pouvais voir la ville qui s'approchait à mesure que les chevaux avançaient. Voici donc la capitale, le noyau d'Adegar. L'île était belle, elle était même magnifique, mais lorsque là-bas la beauté en était sauvage, ici, c'est dans l'ordre qu'elle trouve sa magnificence.
Les arbres aux formes parfaites captaient mon admiration, les champs étaient colorés et je pouvais y voir des cultivateurs arroser leurs cultures. Buissons et étangs étaient aménagés d'une manière si raffinée que pendant un instant, je rêvais de m'installer auprès de ces gens, me lever au petit matin et apprendre tout de ces plantes et végétations qui me sont étrangères, qui me sont nouvelles. Ma bouche à moitié ouverte, j'observais avec la plus grande admiration chaque détail qui me semblait plus majestueux que le précédent.

Le Tournoi de la Couronne - PitosheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant