Chapitre XVII

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J'essuyais encore le sable qui s'était imprimé sur mon visage et s'était infiltré dans ma bouche. Il faisait encore nuit, mais le soleil ne tarderait pas à se lever et à nous faire honneur de sa présence, qui à cet instant, me semble plus que nécessaire. Il n'y avait pas un bruit autour de moi, la solitude m'était insupportable. À mon réveil, je m'étais retrouvée la tête plongée dans un sable froid, assez loin pour échapper aux vagues, mais suffisamment pour en sentir le vent de fraîcheur. Le visage d'Azarias réapparaît devant moi à chaque fois que je clignais des paupières. Il savait ce qui m'attendait...

Je déplie le morceau de papier que j'avais trouvé près de moi à mon réveil sur cette plage. Je relisais son inscription, encore et encore, sans comprendre ce que cela signifiait. Des consignes plus claires auraient été les bienvenues. J'ignore comment je pourrais rentrer auprès de Pénélope. Je regardais avec désespoir l'imposant arbre qui recouvrait toute la surface de cette terre. Sa largeur était telle que l'on aurait cru voir une forteresse s'étaler à l'horizon. Son sommet, lui, atteignait les étoiles, qui à coté n'étaient que des grains de poussière. L'arbre semblait prendre racine au centre de cette terre, nous ne sommes plus sur Adegar. Ou alors nous sommes bien loin du château. Depuis la capitale, cet arbre ne m'aurait jamais échappé. Il pouvait être vu à des heures d'ici. Sa grandeur n'a d'égal que sa singularité.

Je ne peux espérer quitter cet étrange lieu sans me prêter au jeu. Bienvenue aux héritiers... Ça, puis les illustrations de Nona dans la serre de Meredith... Pour l'instant, je dois suivre les instructions, aussi floues soient elles, et sortir d'ici. Seule, avec aucun garde aux alentours, je ne risque pas d'aller bien loin. Une fois que cette épreuve sera finie, j'irai parler à... je ne sais même pas à qui je devrais m'adresser. Mais je trouverai quelque chose, c'est ce que j'ai toujours fait.

Mes pas lourds de sables et dictés par une surprenante conviction, je me dirige vers le tronc du mystérieux arbre. Il était loin, si loin, mais marcher est une chose que je sais bien faire, alors je m'enfonce. J'atteins une forêt, le sable est remplacé par de la terre. Les palmiers par des pommiers et la mer par une rivière. Rien qui ne me soit pas familier. Sur mon chemin vers cet arbre qui semble être la solution à mon énigme, je saute d'un pas et attrape une pomme qui était de toute façon sur le point de tomber. Je la frotte contre ma robe de bal et en croque un morceau. Rouge et juteuse, tout ce qui me plaît dans une pomme.

Le bas de ma robe était à présent coloré de taches grises et marron. Et pour faciliter mes mouvements, je décide d'attraper le bout de l'étoffe que je déchire avec soin, laissant le reste du tissu près d'un arbre. Maintenant, j'étais bien plus agile, mes mouvements n'étaient plus ralentis par ma jupe qui s'agrippait à chaque branche que je croisais. 

Quelques centaines de mètres plus loin, alors que le soleil pointait le bout de son nez, je me trouvais désormais au pied du grand arbre. Crédule que je suis, je pensais qu'il s'agissait d'un simple tronc, mais c'est bien plus que cela. Le bois de buste se laissait ouvrir sur une immense porte qui menait aux profondeurs de ses racines. Une odeur nauséabonde en sortait. Des sacs de cailloux étaient installés près de l'entrée de l'arbre et quelques pioches se trouvaient au sol. Au diable mon courage ! Cet endroit ne présageait rien de bon...

Je reste immobile quelques secondes avant de me décider à entrer dans ces lieux. Et je perds l'équilibre en affrontant le corps sans vie d'un homme dans les entrailles de cet arbre. C'était... l'homme que j'avais vu au bal... celui qui m'avait prise pour Pénélope. Il gisait au sol, une pioche en plein cœur..
Je m'accroupis et me cache près d'un sac de pierre en entendant des pas qui résonnaient de plus en plus près. J'étais entre la lumière du ciel et l'obscurité de l'arbre, au portail qui séparait la vie et la mort. Ce n'est pas ce qui était écrit dans le papier, la règle n'est pas de tuer ! Pourquoi tuer ?!

Le Tournoi de la Couronne - PitosheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant