XII. 𝙴𝚡𝚘𝚛𝚌𝚒𝚜𝚖𝚞𝚜 𝚒𝚗 𝚜𝚊𝚝𝚊𝚗𝚊𝚖 𝚎𝚝 𝚊𝚗𝚐𝚎𝚕𝚘𝚜 𝚊𝚙𝚘𝚜𝚝𝚊𝚝𝚒𝚌𝚘𝚜

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XII.


Deux silhouettes, un escalier. L'une est haute et presque massive ; la seconde a des pâleurs quasi-fantomatiques — des cheveux couleur blanc précoce, un fin nez presque ogival et un visage qui semble taillé dans l'ivoire. Sur les joues courent de minces favoris et les yeux sont clairs, un gris passé et useux qui absorbe les ombres.

Une marche grince au passage du premier. Le second n'en soulève aucun bruit, ...quasiment un silence spectral.

« Donc...c'est ce soir, hein ? » demanda le plus grand d'une voix un peu rauque. Il se retourne, offre au peu de lumière qui se faufile dans l'endroit l'éclat de deux grands yeux trop bleus et trop inquiets ; l'homme est massif, lourd et très grand. « Tu es sûr qu'elle a été suffisamment préparée ? »

L'autre a un mouvement de tête apaisant, presque de ces gestes légèrement paternalistes qu'on peut avoir à l'adresse d'un enfant — et pourtant la fonction rassurante tire juste. « Elle est affaiblie. C'est le moment de tenter l'exorcisme. »

Le plus grand semble baisser la tête, une demi-seconde. Un reflet quasi-argentique balaye le creux de son œil, et on y devine de l'eau. Alors le second reprend la parole, légèrement plus fermement cette fois : « on a pas le choix, Silas. C'est notre métier, t'en souviens-tu ?

Oui. » La voix est rauque, presque à contrecœur, et pourtant l'autre à raison ; il n'ont absolument pas le choix. « Oui, je le sais.

Tu lui parleras. Trouve les mots. Tu connais son histoire. »

Parce que les fantômes ne partiront jamais sans qu'on les trouve ; parce qu'on saisit un meurtrier, mais on ne saisit pas l'insaisissable. Retrouver leur paix et la leur rendre est le mot d'ordre de l'exorcisme.

Il fait noir, dans l'escalier.

« Qu'est-ce que je peux lui dire ?

Apaise-la. » La silhouette pâle s'avance d'encore quelques marches, s'enfonce dans l'obscurité claustrophobique du boyau d'escalier. Ils sont deux, presque remplissant l'espace de tout ce qui peut être vivant, et pourtant une puanteur de mort s'insinue en augure dégueulasse dans tout le bois marqueté. Une seconde, ils s'arrêtent. Les yeux gris rencontrent les yeux bleus. « ...Le mot magique, c'est toujours ce qu'il y a de plus précieux pour chacun.

C'est-à-dire ? »

L'autre ne répond pas. Il se hisse sur le palier, avance sa main dans le noir et la pose sur une poignée de porte branlante sculptée comme le visage d'un diable. Derrière, des gémissements de fièvre glissent sous la porte.

« Natanael ? »

La voix de la silhouette plus massive a comme un accent inquiet. L'autre tourne la tête vers lui.

« Oui ?

Tu n'as pas dit "tout va bien se passer." »

Parce que c'était traditionnel. C'était la phrase porte-bonheur, un petit morceau de superstition crasse dans l'obscurité, celle qu'ils échangeaient avant chaque intervention. Natanael Fredriksson baisse la tête, une seconde. Il ne répond pas tout de suite.

« Oui, c'est vrai. »

Un silence, un peu trop long.

« ...Tout va bien se passer. »

 »

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