Elfes de la Lothlorien

CHAPITRE 11｜❛ Kôlath ❜

Le ciel était sombre, lourd comme un couvercle. Une épaisse fumée noire obscurcissait la lune. Le feu, comme un animal enragé brûla de longues heures durant. Il s'éteignit au matin, ne laissant derrière lui que des cendres.

Le cœur lourd, les elfes constatèrent ce qu'était devenu leur foyer.

Caras Galadhon, autrefois un havre de paix et de beauté intemporelle était méconnaissable. Les majestueux mallorns, piliers d'argent et de vert, s'étaient tordus et brisés. Les sous-bois étaient imprégnés d'une odeur de résine et de bois brûlés. Les feuilles dorées, vivant symbole de la gloire des elfes avaient été réduits en cendre.

Le silence pesait lourdement sur les survivants. Il ne restait plus un oiseau pour chanter en Lothlorien.

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Arranis se tenait parmi les décombres. La magicienne se tenait droite, mais son visage trahissait la lassitude et l'angoisse.

Une elfe s'approcha et posa une main douce sur l'épaule de la magicienne.

-La Lothlorien renaîtra de ses cendres, comme elle l'a toujours fait, déclara-t-elle, sa voix brisée par l'émotion.

Arranis hocha la tête, mais une part en elle doutait encore de ces paroles réconfortantes. Il avait payé cette nuit un lourd tribut.

-J'ai pensé que tu devais le savoir, hésita l'elfe. Le capitaine Thalion est porté au nombre des disparus. Nous honorons sa mémoire.

La main sur son épaule se resserra. Arranis se tourna, ses yeux scrutant ceux de l'elfe avec une intensité nouvelle.

-Il n'est pas mort, promit la magicienne. Il fait son devoir.

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Thalion et Sage s'étaient réfugiés dans une grotte à une lieu de l'incendie. De là, ils avaient observé en silence le brasier dévorer la Lothlorien.

-Je n'aurais jamais imaginé que cela puisse arriver, murmura Thalion, les yeux fixés sur les lointains vestiges de son foyer.

Le silence retomba entre eux, seulement interrompu par le crépitement lointain des flammes.

-Je te guiderai au-delà des frontières de la Lothlorien, promit le capitaine. Et nous serons quitte.

Sage tourna la tête, posant ses yeux sur le capitaine.

-Et que feras-tu ensuite ?

-Je trouverai les coupables, fit-t-il d'un air sombre. Et justice sera rendue.

La change-peau ne put détourner son visage de l'elfe. Les ombres dansaient sur son visage. Derrière un masque de détermination, la tristesse et la colère qui émanaient de Thalion était presque palpable. Intérieurement, Sage savait que l'elfe sombrerait dans les ténèbres pour venger son peuple et son foyer perdu.

-Nous avons nos différends, capitaine, commença-t-elle doucement, ses yeux se perdant un instant dans la lueur des flammes mourantes. Mais nous avons également un ennemi commun.

-Nous n'avons rien en commun change-peau, répliqua-t-il.

Sage, blessée se tut. L'elfe ne détourna plus son regard des flammes dansantes. Quand la lune passa derrière l'horizon, Sage ne put retenir ses paupières lourdes. Elle se blottit dans un coin de la grotte et s'endormit.

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Le matin amena avec lui une odeur de cendre froide.

Quand la change-peau se réveilla, elle regarda autour d'elle, confuse. Thalion était adossé contre le mur de pierre, son regard fixant un point lointain. Le soleil était encore bas, éclairant la caverne d'une douce lumière. Le capitaine rangea d'un geste brusque le glaive à la lame courbée avec lequel il jouait depuis un bon moment déjà.

Sage se redressa lentement. Ses membres étaient encore affaiblis par sa captivité prolongée et ses avant-bras portaient les marques des brûlures de la veille.

-Tu n'aurais pas dû me laisser dormir autant.

-J'ai honnêtement hésité à t'abandonner ici, confessa l'elfe. Mais une promesse est une promesse.

La change-peau s'étira

-Je te libère de ton serment.

Thalion la regarda, interloqué.

-Tu préfères les cellules de Caras Galadhon ?

-Non. Mais les coupables sont en Lothlorien.

-Ce n'est pas... commença le capitaine. Sage l'interrompit sèchement.

-J'ai mes raisons.

-Je peux savoir lesquelles ?

-Non.

Thalion soupira. Les choses se présentaient fort mal. La change-peau, ignorant ses réticences sortit de la grotte. Le capitaine la suivit d'un pas vif.

-N'as-tu pas une autre mission à accomplir ?

Elle se retourna

-Et ton peuple ? Ne devrais-tu pas être à ses côté.

-Je sers mon peuple

Sage ne trouva rien à répondre. Thalion soupira et s'adossa contre le mur de roche froide.

-Quand je ferme les yeux, je vois des flammes, dit doucement le capitaine. J'entends le crépitement du feu et les cris des miens. Rouge est le brasier, rouge est le sang de la Lothlorien.

Il avait toute l'attention de la change-peau.

-Alors je vais t'aider à retrouver ces hommes. Ceux qui ont réduit mon foyer en cendre. J'en étais le gardien ; j'en serai le vengeur. Et ma main ne tremblera pas quand je mettrai fin à leurs vies misérables.

Sage le regarda avec intensité.

-Dans ma langue maternelle, nous avons un mot pour ce que tu ressens, dit-elle doucement. Il s'appelle « Kôlath », la soif de justice mêlée de douleur. C'est une douleur qui amène à combattre pour ce que nous aimons et pour ce qui est juste.

Thalion resta silencieux un moment, absorbant ses paroles.

-Kôlath, répéta-t-il doucement, comme s'il goûtait le mot pour la première fois.

Tous deux se regardèrent longuement, découvrant chez l'autre une profondeur nouvelle.

-Nous perdons la lumière du soleil, fit finalement remarquer Sage.