Chapitre 11 - juin 2024

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— Ayden ?


   Je retourne dans la salle à manger, quittant ainsi mon poste à la plonge. Sarai a les sourcils froncés et fixe intensément son mari. Presque comme si elle souhaitait l'entendre dire quelque chose.

   Je profite de mon passage dans cette salle pour ramasser leurs assiettes sales et vides que j'irai ensuite poser en cuisine au profit de leur dessert.

   La jeune femme détourne finalement le regard de Henry et me demande, d'un ton bas :


— Vous savez où est William ?


   Je réalise alors que non, je ne sais pas où est William. Je ne l'ai pas vu depuis hier soir, lors de son dernier repas. Ça fait déjà une semaine qu'il est venu pleurer dans mes bras. On a parlé depuis, pas mal. Mais du coup, comme on s'est rapprochés, j'ai pu constater qu'il rentre de plus en plus tard. A des heures où il ne pensait même pas pouvoir rentrer auparavant.

   Sentant le regard des adultes sur moi, je prends conscience que je ne suis pas responsable comme je suis censé l'être. Ils m'ont littéralement confié leur fils. Et je l'ai perdu. Je ne sais pas où il est.


— J'ai essayé de lui envoyer des SMS mais il ne répond pas, soupire-t-elle.

— Je vais l'appeler.


   Henry se lève avec son téléphone dans la main et quitte la pièce que je balaye du regard. Mes yeux se posent alors sur l'assiette de mon ami. Moi je sais où il est. Deux options simples.

   La première, il erre dans la rue en se demandant s'il doit cacher ses coups, s'il doit mentir et quelle excuse il doit trouver.

   La seconde, bien qu'elle m'horripile, c'est qu'il se fait encore frapper. A cette heure là, il doit se prendre des coups et des insultes qui doivent le pousser à regretter sa vie.

   Et ça me fait mal qu'il regrette de vivre car il ne sait pas à quel point il apporte la lumière aux gens sous son toit. Ça fait mal que William soit forcément dans une de ces deux options car il doit être en train de souffrir, peu importe laquelle est-ce. Et c'est de ma faute.

   Je jette un regard à Sarai qui est en train de fixer son écran en se mordant les ongles. Sincèrement, je ne sais pas trop quoi dire parce que je me sens coupable. Mais si, pour elle, j'ai uniquement perdu son fils, je sais au fond de moi que je suis coupable de bien plus.


— Désolé, je souffle.


   Sarai lève la tête vers moi et demande :


— Désolé de ?


   Je remarque que ses yeux brillent. Elle est en état de stress complet et bordel c'est normal vu que son fils a disparu. Alors je la regarde et réponds doucement :


— Parce que je suis censé le surveiller.

— Oui enfin pas officiellement, c'est un service que nous vous avons demandé. C'est nous ses parents.

— Je devrais savoir où il est...

— Nous aussi, Ayden, nous aussi.


The shadow in our eyesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant