Chapitre 14 - juin 2027

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   Je dépose les dernières assiettes à table en grimaçant. Hier je me suis vraiment fait mal mais quelqu'un m'a déposé sur mon lit. Ou alors j'y suis retourné seul sans m'en rappeler ?

   Je ne sais toujours pas si William est revenu alors j'espère simplement que oui. Sinon je pense qu'on peut commencer à donner des avis de recherche parce que même moi je trouve ça vraiment bizarre. Limite flippant en fait. Et si ses harceleurs ne l'avaient pas poussé au suicide mais l'avaient tué d'eux mêmes ?


— Bonjour Ayden.


   Je me tourne vers la voix et les bruits de pas qui viennent de derrière moi. Il s'agit de Henry, Sarai et William. Je remarque directement les larmes sur ses joues mais aussi les nombreux bleus qui dépassent de son col, ainsi que la cicatrice légère à sa lèvre.


— Il est rentré en pleine nuit, soupire Sarai en s'asseyant.

— Il n'a plus quitté notre chambre, ajoute son mari. Tu nous expliques maintenant, William ?


   Ils prennent place à table et je m'éclipse à contre cœur pour aller chercher le plateau avec le pain, le beurre et la confiture.

   Luciana me toise dès que j'entre en cuisine et j'ignore, un peu trop habitué à recevoir ses regards noirs. Alors que je m'y attendais le moins, elle demande d'une voix froide :


— Le petit est rentré ?

— Mmh, je réponds.


   J'attrape le plateau et la contourne pour sortir. Mais elle n'a pas l'air du même avis puisque sa main saisit mon bras. Elle enfonce ses doigts aux longs ongles dans ma peau en ignorant ma grimace. Puis elle me rapproche de moi sans y mettre vraiment de force car je l'aide, je ne veux plus de ses ongles dans ma peau.


— Je t'ai posé une question.

— A laquelle j'ai répondu.


   Je soutiens son regard et murmure :


— Il est rentré. Je te l'ai dit.


   Devant son air piqué, je retire mon bras d'un mouvement sec et m'éloigne. Par chance, le plateau ne m'a pas échappé lors de cet échange houleux, je peux donc aller le déposer sur la table des patrons.

   J'arrive en plein milieu d'une conversation que je n'ai pas suivie mais que je peux en revanche imaginer : William qui se fait interroger par sa famille sur les raisons de son absence hier. Je parviens tout de même à l'entendre répondre :


— Je me suis inscrit dans un club de combat. C'est tout.

— Un club de combat ? s'écrie Sarai. Mais tu es complètement con ?

— Maman ! Putain c'est papa qui arrête pas de dire que je suis une mauviette !


   Je ne sais pas ce qui me choque le plus. Le fait que je n'aurai jamais pu l'imaginer hausser la voix contre elle ou le fait que son père le traite ainsi. C'est tellement imprévisible.

   Même si je sais que c'est risqué, je risque un coup d'œil sur le visage de William pour revoir un moment ses coups. Il me fait de la peine.


— Mais je ne te dis pas ça pour que tu fasses dans l'illégal ! réplique Henry, piqué au vif.

— Bah fallait être plus clair, répond-il sèchement. Je m'endurcis.

— Tu fais vraiment tout de travers, Sarai claque sa main contre la table. William j'en ai marre de tes conneries.

— Bon mais ça va les reproches ? il se lève en me bousculant. Je vais faire du sport en haut si ça au moins j'ai le droit.


   Devant l'air ahuri de ses deux parents, il quitte la pièce en claquant ses talons au sol. Je me tourne alors vers Henry qui papillonne des yeux et déclare :


— Il ne nous a jamais parlé comme ça...

— Faut qu'on en parle, mon amour, murmure Sarai. Ayden vous pouvez disposer.


   Je pars donc en hochant la tête en les laissant là. Si c'est vrai, et que William n'a jamais été comme ça, je peux en tirer une conclusion : Je sais qu'il n'est plus le même qu'il y a quelques mois. Ces types n'ont pas abîmé que son corps. 

The shadow in our eyesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant