Chapitre 11

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Elio ne se serait jamais imaginé qu'un Croque pouvait sortir de la forêt. Pourtant, l'un d'eux était bien en train de le pourchasser à travers la ville.

- Poussez-vous ! Criait Elio en agitant des bras en l'air.

Il courrait aussi vite qu'il pouvait. Le croque était assez jeune et courrait beaucoup moins vite que le précédent.
Les passants regardaient Elio d'une mine affreuse, un mélange de terreur et d'étonnement. Les croques étaient réputés pour être des créatures pacifistes qui vivaient en harmonie avec les humains.

Elio sentait le souvenir des crocs traçant un sillage dans la peau de son bras.
Cette fois-ci, Rico n'était pas là pour le sauver. Ils avaient tous disparu, ou du moins Elio les avait fait disparaître. La panique avait créé un mouvement de foule qui poussait les gens à fuir et à se cloîtrer chez eux.

L'adrénaline affûtait ses sens. Ses yeux scrutaient le paysage pour trouver une échappatoire, ses jambes le portaient comme elles ne l'avaient jamais faites, ses poils se herissaient, sentant chaque mouvement d'air et à quelle distance la bête se trouvait, ses oreilles captant chaque sons que l'animal produisait.

C'est impressionnant la manière dont une mort imminente peut pousser les limites du corps humain.

Son cœur battait à tout rompre et ses veines pulsaient un sang bouillant.
C'est à peine si il se rendait compte d'à quel point il courrait vite. En à peine une minute, il avait parcouru la moitié du village.

Elio pensait à Rico, piqué sur le flan de l'animal.
Il savait où frapper et avec quoi. Un objet coupant planté derrière son oreille et s'en serait fini de cette course poursuite.
Une hache, il lui fallait une hache.
Si seulement il pouvait en avoir une, juste là maintenant.
Rien qu'une petite en bois, rien de bien solide juste de quoi percer la cuirasse du monstre.

Pour une raison qu'il ignorait, son vœux fut exaucé.
Une petite hache tel qu'il l'avait imaginée apparue dans sa main droite.

Il n'eut pas le temps de s'étonner de cet exploit. Il savait exactement quoi faire.

Les Croques ne savaient pas vraiment bien gérer leur trajectoire et Elio avait apris à exploiter cette faiblesse.

Ils arrivèrent sur la grande place. Elle était déserte - bien que certains courageux étaient restés pour observer le spectacle, plaqués contre les murs ronds de la place. -

Ses jambes faisaient un travail formidable, Elio les remercia de le porter si loin. Maintenant, c'était à la partie haute de son corps d'agir, et surtout à son cerveau et son torse.
Il avait repéré la grande fontaine implantée au milieu des dalles blanches. Il fonça droit dessus et, au moment où la collision entre lui et la pierre de celle-ci etait imminente, il ordonna à son torse de dévier sa trajectoire. Il fit presque un demi-tour, glissant sur ses pieds, il se retrouva juste derrière la créature qui venait de s'écraser sur le rebord de la fontaine. La bête s'apprêtait à se relever quand Elio s'aperçu qu'il continuait de glisser sur le sol blanc, ses jambes ayant cédé à la fatigue, et l'adrénaline ayant cessé de les nourrir, elles l'entrainaient dans leur chute.

La dernière chose qu'il put faire fut de lancer son arme. Il se rapella les cours de lancé de poids qu'il avait fait au collège. Sauf qu'il n'avait ni appui stable ni cible immobile comme dans ses cours. Il essaya quand même de propulser la hache avec toute la force qui lui restait.

À peine relevé, le Croque s'écroula par terre, tout comme Elio.
Le sang coulait de la hache, tâchant le sol si parfait de la place.
Cette fois-ci, il était bien mort.

Elio n'en croyait pas ses yeux.
Il était assis là, devant le cadavre, la sueur coulant sur ses joues.

Il avait les yeux qui piquaient et le cœur qui menaçait de sortir de sa poitrine.

La guerre des rêvesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant