Edesse tome 1 Jeunesse Royale

Chapitre 20 ⚜ Pénélope ⚜

Onze ans plus tôt, Versailles.

Papi et mamie n'aiment pas qu'on aille dans la Galerie des Glaces. Ils disent que ce n'est pas un endroit fait pour les enfants. Pourtant moi, j'adore y venir. Les lustres majestueux, les plafonds décorés, les statues en or, je pourrais m'y perdre juste en les regardant. Candice me dit que je suis folle. Moi je lui réponds que cet endroit me fait rêver. J'aimerais tellement qu'un jour un grand bal y soit organisé. Mila, elle, voudrait qu'une course y soit organisée, parce qu'elle trouve que la galerie est trop longue pour simplement n'y faire que marcher. Je pense que ce serait un sacrilège de faire ça.

Postée devant un des innombrables miroirs, je rajuste le diadème qui orne ma tête. Je l'ai eu pour mes dix ans et si je pouvais, je dormirais avec. Il est très fin, avec de jolis motifs floraux sur lesquels sont incrustés des diamants. Il fait tellement princesse... Mais tu es une princesse, me souffle une petite voix.

Parfois, je peine à le croire. Depuis mon dixième anniversaire, ma vie a brusquement changé. Avant, je ne sortais presque jamais pour les événements officiels parce qu'on me considérait encore comme étant trop jeune. Ça m'allait très bien, je restais chez moi et je trouvais ça amusant de voir papa, maman, Noan et Esteban, à la télévision. Maintenant, j'ai gagné certaines obligations. Mes parents m'ont expliqué que je devrais me montrer au peuple de France. Sauf que ça me fait un peu peur, tous ces yeux braqués sur moi. Les gens ont l'air gentils, mais on dirait qu'ils me connaissent alors que moi, je ne les connais pas. Ils m'appellent par mon prénom comme si j'étais leur copine et me donnent même parfois des cadeaux. C'est assez bizarre. Maman dit que je finirai par m'y faire, et même par aimer ça. Je ne sais pas trop si je dois la croire pour le moment.

— Pénélope fait sa crâneuse, Pénélope fait sa crâneuse ! chantonne ma cousine Mila en trottinant et en sautant sur le parquet pour faire le plus de bruit possible.

— N'importe quoi ! je m'exclame en arrêtant de toucher mes cheveux.

Mila est un petit peu insupportable. Je veux dire, je l'aime beaucoup, mais elle est très remuante et jamais calme. J'espère qu'elle changera en grandissant.

— On joue ? s'écrie son petit frère.

— À quoi ? demande Candice l'air blasé en faisant tinter un de ses ongles sur une statue.

Depuis quelque temps, Candice semble toujours ennuyée. Mon frère Noan m'a dit que c'était à cause de la crise d'adolescence mais aussi de ses lunettes qu'elle est obligée de porter. Noan dit qu'elles sont affreuses. C'est vrai que ça fait bizarre de voir Candice avec ses lunettes à grosses montures noires. Je suis contente de voir très clair.

— À être une fée ! s'exclame Emilian.

— Mais tu ne peux pas être une fée, Emilian, tu es un garçon, je marmonne ahurie.

— Laisse-le être qui il veut, me rabroue Candice.

— Moi je suis le corbeau, nous lance Mila.

— Comment ça, un corbeau ? je m'exclame stupéfaite.

— Alors là, je ne comprends pas... bougonne Candice.

— Emilian veut être une fée, laissez-moi être un corbeau, aboie Mila d'un ton sec.

— Bon bah moi je suis la princesse alors.

— Et Candice la reine ! crie Emilian, parce qu'il ne sait pas parler sans crier.

— Je ne joue à rien du tout, j'ai passé l'âge pour vos gamineries, déclare Candice, en plus, les garçons vont bientôt arriver.

— Ils sont là, annonce Mila, le nez collé à une des fenêtres.