Le sentiment de plénitude qui m'enveloppe lorsque j'ouvre de nouveau les yeux étire mes lèvres en un sourire qui s'agrandit quand je rencontre le regard océan d'Ezio. Plus beau que jamais, il me rend mon sourire et me tend sa main pour que je m'en empare. Je suis sur le point de la toucher quand je me sens d'un coup happée par le vide qui naît sous mes pieds.
En chute libre, la panique me gagne en voyant l'asphalte du sol se rapprocher dangereusement. Désespérée, j'essaie de me retourner, de crier, de m'agiter, de me couvrir les yeux mais rien n'y fait, l'impact est imminent. J'ai tout juste le temps de fermer les yeux avant de percuter le sol.
Dans une inspiration douloureuse, je les ouvre de nouveau. Il me faut quelques secondes pour comprendre que mon corps n'est pas éclaté par terre mais bien assis dans mon lit et en vie.
Le constat de mon échec cuisant accable mon cœur qui s'alourdit instantanément du vide que j'avais tant cherché à fuir. Plus désespérée que jamais, je laisse tomber ma tête sur l'oreiller, les larmes perlant déjà sur mes joues.
— Ca y'est tu es revenue d'entre les morts ? demande Andy d'une voix empreinte de colère et de tristesse.
— Il faut croire que ce n'était pas mon heure. réponds-je d'un ton détaché.
— Ou que tu as un bon ange gardien. Sérieux à quoi tu pensais ?
Les yeux rivés sur le plafond d'un blanc aussi froid que mon âme, j'articule douloureusement:
— A mourir mais j'ai échoué.
— Heureusement que j'étais là pour te venir en aide surtout !
— Je ne t'ai rien demandé Andy. Je voulais juste en finir et tu aurais dû respecter ma décision. C'est ma vie j'en fais ce que j'en veux.
— Non désolée mais ça ne fonctionne pas comme ça. Je ne vais pas te laisser te vider de ton sang comme une vache à l'abattoir. Tu n'as pas le droit de mettre fin à tes jours !
— Tu vas me surveiller chaque seconde ? Chaque minute et chaque heure jusqu'à ce que je retrouve soudainement l'envie de vivre ?
— S'il le faut oui. Quand tu sortiras de cette chambre, ce ne sera pas les pieds devant !
— Et si c'est mon seul désir ?
— Et bah ton désir est à chier. Tu me remercieras plus tard. Je dois y aller mais évidemment j'ai retiré tout ce qui pouvait être dangereux pour ta vie et ai fermé à clé la fenêtre donc à part retenir ta respiration, bonne chance pour crever !
Elle commence à partir puis revient sur ses pas et s'arrête net devant moi. Soudain, sans comprendre ce qui se passe, ma tête bascule sur le côté et une vive douleur réchauffe ma joue.
— Ah mais ça ne va pas, pourquoi tu m'as giflé ?
— C'est pour avoir tenté de te suicider espèce de lâche égoïste !
Telle une furie, elle quitte ma chambre qui vibre sous le claquement brutal de la porte, me laissant seule à mon désespoir.
Je vis le quotidien des six mois suivants au rythme de ma dépression. Dans la prison de mon esprit je suis réduite à être la spectatrice de ma vie. Andy ma geôlière veille à assouvir mes besoins primaires. Je subsiste le reste du temps à fixer le plafond vide d'émotion, en le peignant de mes scénarios suicidaires.
Andy me surveille comme promis et parfois Andrea prend la relève quand elle est retenue ailleurs. Ils sont mes deux seules visites. Pas que je désire voir qui que ce soit d'autre.
J'ai eu le droit une seule fois à une autre visite, pas moins indésirable. Celle du notaire au cœur fragile qui s'était évanoui lors de mon altercation avec Raphaël. Le pauvre avait tenté de m'intéresser à la raison de sa venue mais sans succès. Après un monologue gênant et interminable, il a essayé d'entamer un échange mais qui demeurait sans réponse de ma part. Au bout de longues minutes d'attente, il a enfin compris que sa place était dehors et est parti en laissant le dossier sur le lit malgré tout. D'un coup de pied je l'ai fait tomber ne voulant pas en entendre parler. Après ça je me suis d'autant renfermée sur moi même.
Aujourd'hui ne fait pas exception. Mes yeux à peine ouverts, je la maudis déjà et espère qu'elle passera à vitesse grand V.
Soudain, j'entends la porte s'ouvrir avec fracas et distingue la silhouette d'Andy se frayer un chemin dans la pénombre. Sans un mot, elle se dirige vers les fenêtres qu'elle ouvre en grand. Dans le halo de lumière aveuglant, je comprends que cette journée n'aura rien de pareil aux autres.
— Tu n'es peut-être pas encore morte mais l'odeur de ta chambre nous fait croire le contraire. Il est temps pour toi de sortir d'ici, tu as assez gagné de temps comme ça. Si je ne te sors pas maintenant, tu ne seras plus qu'une escarre géante.
Sous les draps qui me protègent de l'éclat du soleil, je soupire et grogne, bien décidée à ne pas l'écouter. Je sens soudain qu'on me tire la couette et malgré ma tentative de la maintenir sur mon corps, Andy arrive à gagner et à la jeter par terre.
— Ne crois pas que tu vas t'en sortir comme ça.
— Andy redonne moi cette couverture ! Tout ça ne sert à rien et en plus je me les caille !
— Ce soir c'est Halloween et j'ai promis aux enfants qu'ils verraient un vrai mort-vivant terrifiant. ironise-t-elle.
Elle me tire les jambes et essaie de m'attraper mais je me débats. Malgré ma perte de tonicité, j'arrive à la faire lâcher prise et à me recoucher.
— Très bien tu l'auras cherché.
Intriguée, je la regarde partir dans la salle de bain d'où j'entends de l'eau couler puis elle réapparaît avec une bassine d'eau. Je n'ai pas le temps de fuir que je sens soudainement l'eau glacée me transpercer tel un milliard de poignard.
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Le Phénix- Renaissance [TOME 2]
AventuraDe nouvelles flammes de vengeance; Couvantes puis incandescentes; Aussi inattendues que mortelles; Sillonnent l'île du soleil; De l'envolée menaçante; D'une renaissance cruelle. Cette histoire est le deuxième tome de la série " Le phénix", digne suc...