C H A P I T R E 25

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SETH
2085, District Orlie

Je suis dans un état second lorsque je rentre à la hâte dans la voiture. Personne ne dit rien tout le long du trajet jusqu'au QG, me contraignant à davantage ruminer sur la soirée parce que je n'arrive pas à penser à autre chose.

Le véhicule s'arrête devant l'immeuble désaffecté après une bonne trentaine de minutes, mais personne ne bouge, nous contentant de rester là, le regard rivé devant nous. D'un coup, tout s'éclaircit dans mon esprit et je me précipite dehors en claquant la portière. J'ai besoin d'air, j'étouffe, à telle point que je ne suis pas loin de vomir. Je masse ma gorge en inhalant de grandes inspirations qui ne parviennent malheureusement pas à me calmer. Je me précipite alors vers le bâtiment en ignorant les cris de mes amis qui m'appellent. Au bout d'un long moment, je me rends enfin compte des larmes qui affluent sur mes joues et qui obstruent peu à peu ma vue. Je tourne en rond, en proie à une nouvelle crise, bien plus violente que d'habitude et qui me prend de court tant elles sont habituellement rares. Les larmes redoublent tandis que mon corps tremble de plus en plus. La respiration haletante, je finis par me réfugier dans un coin de la pièce où je me recroqueville sur moi-même. Je dois avoir l'air misérable, mais je n'ai pas le temps de m'en préoccuper tant je suis concentré à essayer de me calmer. Je presse mes oreilles avec mes mains essayant de faire taire tout ce bruit dans ma tête. Je sursaute violemment au contact de la main d'Ery sur mon bras, ne l'ayant ni vu, ni entendu arriver. Elle pose sur moi un regard terrifié, empreint de pitié. Une pitié que j'ai toujours détesté, cette même pitié qu'on avait quand je me suis retrouvée seule, quand j'ai tout perdu. Je ne veux pas d'elle ! Je la hais plus que tout.

Je repousse méchamment sa main en me redressant pour me tenir face à elle. J'ouvre la bouche, mais les mots s'étouffent au fond de ma gorge, la douleur étant si forte que je n'arrive pas à parler. J'ai l'impression qu'on vient de m'enfoncer un pieu dans le cœur, qu'on a aspiré mon âme. Je me sens faible, comme si j'avais passé plusieurs nuits d'affilée sans dormir - ce qu'il n'est pas tout à fait faux dans un sens. La douleur est trop intense, trop insupportable, que c'est comme si on me serrait la gorge pour m'empêcher de respirer. C'est pire encore que la mort elle-même. C'est presque aussi horrible que lorsque ma mère est morte, devant moi...

Je soupire en fronçant les sourcils alors qu'Ery se rapproche davantage. Elle prend mon visage en coupe dans ses petites mains, me forçant à la regarder, tout en étant extrêmement douce. Cette fois-ci, je n'ai pas la force de la repousser alors je la laisse faire.

- Tout n'est pas encore terminé, souffle-t-elle du bout des lèvres, de façon presque inaudible, tout en plongeant son regard dans le mien.

Je me noie dans ses prunelles émeraudes, qui pour une raison qui m'échappe totalement, m'apaisent peu à peu. Elle colle son front au mien sans me lâcher du regard et je finis par caler ma respiration sur la sienne qui a un effet apaisant. En un rien de temps, elle réussit à me calmer. Elle s'écarte pour essuyer de ses pouces mes joues trempées de larmes avant de m'embrasser tendrement sur la front. Son geste me prend de court un brève instant, mais je ne le calcule pas tant que ça. Toutes mes pensées sont dirigées vers elle, à tel point que toutes les autres choses me semblent insignifiantes à côté.

Je repousse brusquement Ery au moment où Olympe et Zedkiel entrent en scène. Je n'ai vraiment pas besoin de leur pitié à eux aussi, je me sens déjà bien assez comme une merde d'avoir échoué si lamentablement. Je veux juste me terrer dans mon appartement, seul, à l'abri des regards d'autrui. J'ai besoin d'être au calme pour réfléchir à la situation.

- Je... Ça n'aurait jamais dû se passer ainsi ! je m'emporte, troublé. On aurait dû plus se préparer, prendre plus le temps... On...

Mes yeux s'agitent dans tous les sens tandis que je sers les poings tout me mordant la lèvre inférieure jusqu'à ce qu'un goût âcre de sang m'emplit la bouche.

FALLONOù les histoires vivent. Découvrez maintenant