La théorie de l'arc-en-ciel

Chapitre 13

Alerte : tempête en approche

La réponse de Taylor mit tellement de temps à venir que Liv se sentit obligée d'insister un peu.

— Taylor ? l'appela-t-elle doucement.

La concernée secoua la tête pour retrouver ses esprits, puis accepta la main tendue. Liv les guida jusqu'à sa chambre, où une porte-fenêtre donnait accès à un large balcon. Elle lâcha Taylor et s'éclipsa dans le dressing accolé à sa chambre pour enfiler une paire de baskets.

Taylor profita de ce moment de solitude pour détailler la pièce. Comme le reste de l'appartement, la décoration était inexistante. Le lit avait été impeccablement fait, et tout semblait avoir été méticuleusement rangé, donnant l'impression que personne n'avait dormi ici depuis des lustres. La seule chose qui apportait un peu de vie à l'ensemble était l'imposante bibliothèque accolée au mur du fond et dont les étagères croulaient sous le poids des livres. Taylor s'en approcha, curieuse de découvrir ce que Liv aimait lire durant son temps libre. Sans surprise, elle trouva de nombreux livres de neurobiologie, de neuropsychologie, de neuroanatomie et même de bio-informatique... en somme tout ce qui touchait de près ou de loin aux neurosciences. Sur les étagères les plus basses, les ouvrages scientifiques laissaient place à des romans de science-fiction et de fantasy : J.R.R Tolkien, Sapkowski, H.G. Wells, Lovecraft ou encore C.S Lewis, se côtoyaient. Taylor n'avait jamais lu aucun de ses livres. Elle était plus du genre à se plonger dans un roman d'amour ou policier qu'à se laisser emporter dans des univers aussi fantasques. Et pourtant, son côté terre à terre dans la lecture ne l'avait jamais empêché de visionner plusieurs fois les adaptations cinématographiques de tous ces livres.

Soudain, deux bras tendres qui étreignirent sa taille par derrière, la firent sursauter.

— Désolée, je ne voulais pas te faire peur, murmura Liv dans son dos.

Elle savait que prendre Taylor dans ses bras n'était pas forcément la chose à faire à cet instant précis, surtout qu'elles n'avaient pas encore eu l'occasion de s'expliquer, mais ça avait été plus fort qu'elle. Après tous ces jours passés loin d'elle et ces parties de poker où elle s'était efforcée de se montrer le moins tactile possible, elle n'avait pas pu résister à la tentation de l'enlacer. Elle se recula finalement et laissa Taylor se retourner pour lui faire face. La jeune femme n'avait pas l'air fâchée, mais ne semblait pas non plus très enjouée.

— Tu veux rester ici ou aller discuter dehors ?

— Un peu d'air me fera le plus grand bien, répliqua Taylor.

Liv leur ouvrit la fenêtre et se décala pour permettre à la jeune McAllister de sortir la première. Elles furent accueillies par une bourrasque qui balaya leurs visages et ébouriffa leurs cheveux. La propriétaire des lieux grogna en se recoiffant. Depuis quelques jours, le Santa Ana sévissait sur Los Angeles. C'était un phénomène météorologique courant à cette période de l'année, mais Liv, malgré ses quatre années passées en Californie, ne s'y était jamais habituée. L'air devenait sec et chaud, et les rafales étaient parfois si fortes que fermer l'œil la nuit était souvent très compliqué, surtout pour quelqu'un avec un sommeil aussi léger qu'elle.

Taylor s'appuya contre la balustrade tandis que Liv s'adossa au mur en face d'elle. Un nouveau coup de vent les percuta, puis soudainement tout s'arrêta. La violente brise venait de retomber comme un soufflé en dehors d'un four.

Le calme avant la vraie tempête, pensa Liv. Elle était persuadée que Taylor lui en voulait, après tout, elle avait toutes les bonnes raisons de le faire. Elle lui avait sciemment menti dans les toilettes du Velvet en prétextant qu'il n'y avait rien entre Andrea et elle, alors que c'était loin d'être la vérité...