Prologue

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De nos jours, les gens se cachent sous des masques soigneusement construits, des façades trompeuses derrière lesquelles ils dissimulent leurs véritables émotions. Ils prétendent aller bien, sourient dans les moments opportuns, mais à l'intérieur, ils sont brisés, meurtris par des douleurs invisibles. Ils affichent des intentions bienveillantes, promettent d'aider, de soutenir, mais trop souvent, ils ne sont là que pour détruire, que ce soit par égoïsme, par peur ou simplement parce qu'ils sont eux-mêmes perdus. Derrière chaque regard assuré, chaque parole réconfortante, il y a parfois un cœur en lambeaux, rongé par les épreuves de la vie. Au-delà des apparences, tout n'est que chaos silencieux, une lutte pour maintenir cette illusion de contrôle, alors qu'à l'intérieur, les fissures se multiplient et menacent de tout emporter.

Le crépitement du feu dans la cheminée remplissait la pièce d'une chaleur trompeuse. Assis dans son canapé en cuir neuf, un homme tenait d'une main lasse un verre de vermouth à moitié vide. Ses yeux, perdus dans le reflet des flammes dansantes, trahissaient une amertume sourde qu'il peinait à dissimuler. Il avait tout. Une carrière couronnée de succès, une maison luxueuse nichée dans un quartier prisé, une famille qui, de l'extérieur, paraissait parfaite. Pourtant, une ombre pesait sur son cœur, un vide silencieux que rien ne semblait pouvoir combler.

L'amour. Ce mot résonnait en lui comme une note discordante dans une symphonie trop bien orchestrée. Mais ce n'était pas seulement l'amour romantique qu'il cherchait. Il en voulait plus, il en avait besoin. Il aspirait à l'amour véritable sous toutes ses formes, d'abord, celui d'une famille plus soudée, d'amis qui le verraient pour ce qu'il était vraiment, et non pour ce qu'il possédait. Il souhaitait ce lien sincère, authentique, un amour qui le transcenderait et qui ne serait pas lié à son succès ou à son compte en banque.

Il avait l'air exigeant, presque intransigeant avec les autres, mais la réalité était qu'il cherchait désespérément une connexion réelle, quelque chose qui ne soit pas superficiel. Dans ses relations, qu'elles soient familiales ou amicales, il avait souvent cette sensation frustrante de ne pas être pleinement compris ou accepté. Tout était trop lisse, trop parfait en apparence, mais vide de sens à l'intérieur. Il rêvait d'une intimité sincère, d'une proximité émotionnelle où il pourrait être lui-même, sans masque ni prétention.

Quant à l'amour véritable d'une personne qui le verrait au-delà de son statut et de ses biens matériels, il y avait longtemps qu'il avait cessé d'y croire. Il avait tenté de s'y accrocher, de garder espoir que quelqu'un pourrait l'aimer pour ce qu'il était vraiment, avec ses défauts, ses vulnérabilités. Mais à chaque tentative, il se heurtait à la même réalité, dans ce monde façonné par l'argent et les apparences, l'authenticité semblait rare, presque impossible à trouver. Alors, il avait fini par ranger cette idée dans un coin reculé de son esprit, une option vite mise aux oubliettes. Aujourd'hui, il se convainquait que ce genre d'amour n'existait plus, du moins, pas pour lui.

Le vermouth tournait lentement dans son verre tandis qu'il se demandait, pour la énième fois, s'il devait s'ouvrir davantage aux gens qu'il rencontre, ou leur faire davantage confiance. Il doutait d'en être capable. Était-il tout simplement incapable d'aimer ? Ou était-ce le monde qui ne savait plus ce qu'était l'amour vrai ?

Pendant ce temps, à quelques rues de là, une âme, usée par la vie bien trop tôt, courait d'un travail à l'autre. À peine sortie de l'adolescence, la vingtaine encore fraîche, cette personne portait déjà sur ses épaules un poids qu'un adulte aguerri aurait du mal à supporter. À vingt ans, on aurait pu croire qu'elle avait déjà vécu quarante vies. Les responsabilités qui pesaient sur elle étaient écrasantes, une montagne à gravir chaque jour sans jamais pouvoir se permettre de ralentir, encore moins de s'arrêter.

Quatre emplois. Quatre chaînes qu'elle portait sans se plaindre depuis des années, parce qu'il n'y avait pas d'autre choix. Survivre était devenu son unique objectif, sa seule priorité. Mais parfois, dans la solitude, elle se demandait à quel moment elle avait cessé de vivre pour simplement exister.

Brisée par sa propre famille, trahie par ceux qui auraient dû la soutenir, elle avait appris très tôt que la vie ne faisait pas de cadeaux. Les cicatrices émotionnelles laissées par ces blessures étaient profondément ancrées, et même si elles ne se voyaient pas à l'extérieur, elles étaient bien présentes, brûlant à chaque instant.

Mais malgré cette colère et ce dégoût soigneusement dissimulés, elle se battait encore pour avoir une vie décente. C'était compliqué, bien sûr. Chaque jour ressemblait à une nouvelle guerre à mener, une bataille pour la dignité, pour la survie.

Peut-être qu'un jour, sans qu'ils s'en aperçoivent, leurs routes se croiseront. Et dans cet instant fugace, ils pourraient réaliser que la pièce manquante à leur puzzle se trouve peut-être dans l'âme brisée de l'autre. Ou peut-être pas.

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