𝟐𝟒 - 𝐏𝐮𝐥𝐬𝐢𝐨𝐧𝐬

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Attention : ce chapitre peut contenir des allusions à caractère sexuelle.
Il n'y aura pas de scènes de smut,
ni de langage cru et explicites, mais des sous-entendus implicites peuvent s'y trouver. Je vous invite à passer quelques lignes si le sujet vous met mal à l'aise.

Bonne lecture !

🎶 Bathroom - Montell Fish🎶

" JE suis au bord de l'implosion.

Des semaines sans avoir eu l'occasion de le voir, d'entendre sa voix, de sentir son parfum.
Et la cruelle torture que m'infligeait le fait de lui parler par l'unique biais d'un écran, de le voir m'appeler sous un nom qui n'est pas le mien.
Et voilà qu'une nouvelle proposition de débat, sortie de on ne sait où, venait d'atterrir sur ma boîte mail.

Moi qui luttait, corps et âme, depuis des jours entiers pour ne plus le revoir, pour ne pas écouter mes pulsions, pour ne pas révéler le lourd secret qui pesait sur ma conscience.

Et dorénavant, alors que le flux médiatique avait finalement cessé de nous solliciter, une nouvelle demande était apparue.

J'aurais pu refuser... J'aurai pu refuser...

Je devrais refuser.

Mais j'en étais tout bonnement incapable.
J'arrivais à résister à la tentation la plus part du temps, mais m'offrir la possibilité d'avoir des heures privilégiées à ses côtés sur un plateau d'argent, me rendait incapable de refuser.

Alors oui, j'avais accepté.

J'avais accepté, sachant la difficulté mentale qu'allait représenter tout ce temps ensemble, lui et moi.
Sachant l'irréductible envie d'arracher sa chemise immaculée de son corps dans les loges privées des studios.

La simple pensée de cette scène me fit monter la chaleur à la tête.
Je pris une grande inspiration et me laissa tomber vers l'arrière, reposant mon dos sur le dossier, faisant grincer la chaise au passage.

Je passais ma langue sur mes lèvres pour les humidifier.
La sensation de sa bouche contre la mienne ne semblait pas vouloir me quitter même après tout ce temps.

Au fond de moi, je savais que Gabriel avait oublié ce baiser entre nous.

Entre lui et Jordan.

Et, qu'à choisir, il n'hésiterait pas une seconde entre Jordan et Stéphane.

Mais le poids de ce secret me pesait, chaque jour, un peu plus sur la conscience, menaçant de faire s'écrouler mon château de cartes bâti méticuleusement.

Partagé entre des envies, des obligations et des craintes, mon esprit ne cessait d'être tourmenté.

Et le silence de la pièce ne m'aidait pas à être plus concentré.
Il semblerait, cependant, que quelqu'un soit venu me sortir de cette solitude.

Trois coups retentirent à la porte de mon bureau, au sein du siège du Rassemblement National.

- Entrez.

Mon community manager pénétra dans la pièce, sa nouvelle paire de lunettes rondes flamboyantes et un téléphone branché sur batterie externe dans les mains. Un vrai cliché.

Après m'avoir dit bonjour, il s'installa en face de moi et se mit à déblatérer un tas de stratégie marketing auquel je ne comprenais pas grand chose d'habitude, mais encore moins en ce moment.

- Vous connaissez Tik Tok ?

- Si je connais Tik Tok ? Alexis, on a trois ans d'écart, pas quatre-vingt, je crois que même mon arrière grand-mère connaît Tik Tok.

- Elle à quel âge, sans indiscrétion ?

- Elle est morte. Dis-je d'un ton sec tout en prenant une gorgée de mon café posé sur le coin du bureau. Il y'a dix ans, bien avant l'invention de Tik Tok donc, mais je suis persuadé qu'elle connaît tout de même l'application. Alors, plutôt que de me regarder avec des yeux de chien battu, tu pourrais m'expliquer pourquoi tu me poses une telle question et en venir au fait, non ?

Le plus jeune blêmit quelques instants, visiblement peu habitué à mon attitude froide et agacé.

C'est vrai que je l'ai recruté il y'a pas longtemps...

- Tu sais quoi ? Tu as carte blanche avec mes réseaux sociaux. Tu y fais ce que tu souhaites, et s'il y a nécessité que j'apparaisse sur une vidéo, tu me préviens quelques jours auparavant.

Il sourit comme un enfant qui entrerait dans un magasin de jouet avec budget illimité, puis il parti en se confondant en remerciement.

C'était ma bonne action de la journée.

Aussitôt que le community manager ferma la porte de mon bureau, je fis tomber ma tête entre mes deux mains, massant douloureusement mes tempes avec mes index.

Je repensais encore à ce débat.

Demain, vingt et une heure trente.

Comme d'habitude, il faudra arriver en avance, minimum une heure.
Nous risquons alors de nous croiser à vingt heure trente.
Le temps sur le plateau sera d'environ trois heures, plus quelques minutes pour récupérer mes affaires en loges et debriefer brièvement avec mon équipe.
Cela fait un total de quatre heure et demi.

Quatre heure et demi à devoir contenir mes pensées et mes actions devant lui.

Un exercice d'une difficulté presque impossible, mais que j'allais, malgré tout, devoir accepter.
Même si je doute de savoir ne serait-ce que débiter des arguments à la même ténacité qu'à mon habitude.

Comment arriverais-je à garder mon calme en sa présence ? Après si longtemps à méticuleusement éviter toutes les occasions où nous pourrions nous croiser, j'allais devoir passer des heures en sa présence, tout en luttant contre l'envie que mon corps me dictait. L'envie de goûter à ses lèvres une fois de plus. L'envie de le goûter lui, tout simplement.

Cette pensée revenait encore et encore me hanter l'esprit.

Gabriel, tout entier, suffisait à me hanter l'esprit.

Cette proximité par message et cette froideur, que je m'étais imposé depuis quelques temps, ne faisaient pas bon mélange et m'empêchaient même de travailler convenablement.
Ce qui m'avait, d'ailleurs, valu nombreuses réflexions de la part de Marine Le Pen et des autres anciens du parti qui pensaient avoir des leçons à me donner.

Mais aussi étonnant que cela puisse paraître, leurs insistances et leurs impertinences dans ma vie et mes affaires professionnelles ne m'énervaient plus autant qu'avant.

Les problèmes de colère qui me rongeaient, diminuaient considérablement chaque jour, et j'aimais à croire que c'était l'œuvre de Gabriel. Ou plutôt, l'un des nombreux impacts bénéfiques qu'il a eu dans ma vie.

Il avait apaisé une partie de moi, et je savais que, désormais, si je ressentais de nouveau ce genre d'émotion trop puissante, je pourrais m'en remettre à lui. À ses messages, à ses mots réconfortants, doux.
Je savais que, quoi qu'il arrive, il mettrait tout en œuvre pour m'aider, tout comme je mettais tout en œuvre pour l'aider.

C'était agréable et sain comme relation, mais j'avais envie de plus.
Ou plutôt, je luttais pour ne pas avoir envie de plus.

Après de longues minutes à ressasser dans mon bureau, je me décidais à m'isoler un moment, dans une pièce où je ne pouvais pas être interrompu : les toilettes.

La pièce était constamment nettoyée et sentait une odeur de produit ménagé, ce qui rendait les moments où je m'y trouvais moins désagréable.

Ce n'était - pour sûr - pas le meilleur endroit, mais je pouvais y être seul, sans personne.

Une fois dans la salle, je me suis retrouvé face au grand miroir encadré sur le mur.
J'ai fait reposer mes deux bras de part et d'autres du lavabo, fixant mon reflet essoufflé et rouge. Puis j'ai fermé à clef.

- Putain. Soufflais-je en regardant mon état déplorable face aux pulsions qui animaient mon esprit."

Au delà du réel [ BARDATTAL ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant