Le salon rouge

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Affalé dans un fauteuil en cuir rouge, Lau devait supporter le bruit, les rires et les sons embarrassant en plus de la princesse Wendji et ses caprices quasi incessants.
Et surtout sa manière de vouloir l'inclure à la conversation alors qu'il était visiblement écrit sur son visage qu'il voulait juste être seul.
- Lau... Lau vous m'écoutez ?
Il s'orienta vers la princesse qui essayait une fois de plus d'engager la conversation.
La princesse Wendji avait un charme bien à elle, elle avait des cheveux prunes avec des reflets mauves, et des yeux en amande pénétrant qui vous faisait tout de suite l'effet d'un tigre sur le point de vous dévorer vivant. Elle avait de hautes pommettes et un nez légèrement retroussé. Lau trouvait qu'elle était comme une plante carnivore. Attractive mais mortelle.
Néanmoins, elle était très désirée et une foule de prétendants était à ses pieds, désireux de se brûler les ailes. Lau les surnommait le club Icare. Car ils volaient bien trop près du Soleil. Ils devaient s'imaginer qu'ils avaient un truc en plus qui les démarquaient de la populace. Mais ils étaient tous pareil.
Cependant, ceux qui arrivaient à la voir en privé après avoir attiré son attention, ne voulaient plus jamais entendre parler d'elle. On disait qu'elle les repoussaient tous de façon à ce qu'ils la laisse tranquille. Définitivement. Raison de plus pour dire que le club Icare était masochiste.
- Oui mademoiselle, qui a-t-il ?
- Je vous demandais ce que vous pensiez des nouveaux sacrifices arrivés plus tôt dans la journée.
Oui ces sacrifices qui avait fait qu'après sa visite chez le Roi, Elliot lui avait annoncé sans plus de cérémonie qu'il n'était plus son garde et que, par conséquent, il ce retrouvait sans emploi. De plus sans aucune explication. Ces sacrifices-là.
- Et bien espérons que ceux-ci répondront à nos attentes, déclara Lau avec un sourire crispé.
La princesse se remit à parler, mais honnêtement, Lau ne l'écoutait plus. Il observait le salon rouge - où il ne venait presque jamais et qui l'intriguait toujours autant - et ses occupants.
Le salon rouge était l'un des nombreux lieux qui démontraient de la richesse du palais. Dans un coin de la pièce se dressait un bar gargantuesque remplis d'alcools tous plus chers et meilleurs les uns que les autres. Certaines fois Lau se demandait s'il devait payer une caution pour pouvoir y toucher. La pièce au mur vermillon possédait d'immenses colonnes en or massif entourées de dragons - inspirée de l'Orient, un endroit dont Lau n'avait entendu parler que dans les livres. Il paraissait que les vampires orientaux avaient orchestré leur hiérarchie sociale par une dynastie, même s'ils étaient eux aussi sous les ordres d'Oswald. Du moins c'était ce qu'on disait - et des nuages et chandeliers de la même matière peuplaient les murs et le sol au parquet chêne. Donnant des pleins et des déliés à la salle. Le nom de salon rouge était assez transparent mais la salle en elle-même, était magnifique.
Ce qui s'y déroulait un peu moins.
Sur les fauteuils écarlate, les gens gloussaient, s'embrassaient à pleine bouche, faisaient l'amour et buvaient comme des trous. Des tables de billard et de poker étaient disposés un peu partout et les vampires pariaient des sommes astronomiques, parfois des serviteurs humains aussi. Lau trouvait ça répugnant. Il croisa le regard d'un homme en train d'embrasser le cou de sa compagne qui ondulait des hanches. L'homme lui fit un clin d'œil et Lau se détourna. Non pas qu'il soit gêné - il avait certaines fois surprit des actes bien plus intimes que ça - il n'avait juste pas envie d'assister à ce qui allait sûrement ce produire avant la fin de la soirée.
Il décida d'aller boire un verre pour noyer sa frustration quand à l'absence de réponses d'Elliot quand à son renvoi, et se dirigea vers le bar.

*. *. *

Le garde assigné à la surveillance des jardins se faisait vraiment chier.
C'était vulgaire mais il n'avait pas d'autres mots pour désigner l'ennui mortel de surveiller les jardins de nuit.
Le Roi est vraiment parano, pensa-t-il.
Il restait dix minutes avant la relève et il tombait déjà de fatigue et luttait pour garder les yeux ouverts. Il en avait marre de rester planté là comme un gland.
J'ai encore le temps d'aller faire un tour, se dit-il.
Il se mit à marcher dans les allées de gravier, entre les bosquets de belladones, les massifs d'hortensias et les parterres de digitales, puis déboucha dans le tunnel végétal. Du lierre et des glycines s'enroulaient autour de la structure en métal du tunnel, des rayons de Lune perçaient du feuillage, juste assez pour éclairer l'herbe qui tapissait la terre du tunnel.
L'horloge rattachée à la façade du château sonna deux heures du matin.
Le garde, distrait par l'écho de l'horloge, trébucha sur une racine d'arbuste et tomba tête la première dans un buisson de houx installé là Noël dernier. Sa main rencontra quelque chose de dur, froid et humide. Le regard du garde se posa sur sa main.
C'était du sang.
Horrifié, le garde descendit la tête vers la source du liquide et hurla.
Une plaie béante et ensanglantée traversait la gorge du cadavre en un sourire sadique.
C'était le Roi.
Il était mort.

*. *. *

Lau en était à son troisième verre de rhum quand un garde en panique déboula en trombe dans le salon rouge.
- Que ce passe-t-il ? demanda l'homme qui avait croisé le regard de Lau et qui venait encore de relever le visage du cou de sa compagne, apparemment il aimait bien cette partie du corps de sa partenaire.
- C'est le Roi ! cria le garde à moitié hystérique, Dans les jardins ! Il est mort ...
Lau rencontra le regard de la serveuse humaine arrivée aujourd'hui avec les sacrifices : Sharon. Ni elle ni lui ne semblait réellement réaliser la situation, c'était bien trop improbable.
Wendji eut un rire hystérique et le garde s'évanouit.

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