9

9 3 21
                                    

Mon cœur bat à tout rompre alors que je cherche Selly désespérément dans les ruelles non loin du banc vide. Les rues sont bondées, mais pas une seule trace de la princesse. La peur me ronge. Où a-t-elle pu aller ?

Je sens l'angoisse monter, un poids lourd s'installer dans ma poitrine. Je dois agir vite, mais quoi faire ? J'ai envie de courir immédiatement vers le Palais Royal, d'alerter le roi, la reine, n'importe qui, mais une peur sourde m'envahit. Et si je me faisais accuser de trahison ? Ou pire, si on me prenais pour responsable de sa disparition ? J'imagine déjà le visage sévère des gardes me passer les menottes avant de m'enfermer dans un cachot froid. Je tremble à cette pensée.

Soudain, une voix familière et rassurante murmure à mon oreille : "Fais-toi confiance, ma fille."

Je me fige, mon sang se glace. C'est lui. Azazel, l'ombre que j'ai vue plus jeune. Celle que j'ai cru être un rêve. Mais non, il est bien réel. Ses paroles sont comme un baume apaisant sur ma panique. Je respire profondément et ferme les yeux un instant. Je dois me faire confiance. Selly a besoin de moi. Ce n'est pas le moment de céder à la peur.

Je tire doucement mon épée de son fourreau, la tenant fermement dans ma main, j'avais supplié ma mère de m'entraîner, il fallait bien un jour que malheureusement cela me serve. Le poids de la lame me réconforte un peu. Ensuite, je range précieusement le collier que j'avais acheté pour Selly dans ma poche, déterminée à le lui donner plus tard... si je la retrouve.

En observant la ruelle de plus près, je remarque quelque chose qui me serre le cœur. Un peu de sang macule les pavés, s'éloignant de l'endroit où les gardes sont tombés. Mon regard se pose plus loin, sur une chaussure, celle de Selly, abandonnée près d'un recoin sombre. Je me précipite vers elle, mes pensées s'emballant. Est-elle blessée ? Est-ce qu'elle a réussi à s'enfuir ?

Je sens la panique revenir, mais cette fois, je la contiens. Je suis une Duarte. Je ne peux pas me permettre de craquer maintenant. Je dois suivre les traces. Respirant profondément, je m'enfonce dans la ruelle, mon épée à la main.

Les gouttes de sang me mènent à un endroit que je n'aurais jamais imaginé : une sorte de taverne vulgaire, cachée dans l'ombre des bâtiments. L'enseigne est usée, et l'endroit semble malfamé. Une lumière vacillante éclaire l'entrée, et des bruits sourds de voix et de rires grossiers résonnent depuis l'intérieur. Mon instinct me crie de faire demi-tour, mais je n'ai pas le choix.

Je pousse la porte en bois, qui grince sinistrement. L'intérieur est sombre, enfumé, et peu de gens y sont présents. Tous les regards se tournent vers moi dès que j'entre, certains méfiants, d'autres moqueurs. Je sens immédiatement que je n'ai pas ma place ici, une noble vêtue de manière si soignée, brandissant une épée. Un homme assis au bar me dévisage et ricane avant de s'adresser à moi d'une voix grave et bourrue :

- Qu'est-ce qu'une petite fille comme toi fait ici ? C'est pas un endroit pour les gosses perdus.

Je serre la poignée de mon épée, luttant contre la peur qui refait surface, mais je ne peux pas m'enfuir maintenant. J'inspire profondément et m'approche de lui.

- Je cherche une fille. Elle a les cheveux blonds, les yeux émeraudes. Vous l'avez vue ?

L'homme plisse les yeux, l'air intrigué, avant de hocher la tête.

- Si tu cherches des réponses, descends. La Guilde des Ombres Silencieuses est en bas, demande le patron. Mais fais attention, petite... Tout le monde ici n'est pas aussi... courtois.

Je le remercie d'un signe de tête, dissimulant la peur qui tambourine dans ma poitrine. Je me dirige vers un escalier sombre au fond de la pièce. Descendre... dans un repaire secret. Je sais que je joue avec le feu, mais si c'est le seul moyen de retrouver Selly, je dois prendre ce risque.

Je marche d'un pas rapide dans les escaliers, suivant les indications de l'homme à la guilde. Mon esprit est assailli par mille pensées : où est Selly ? Est-elle blessée ? Qu'est-ce qui a bien pu se passer ? Mais je secoue la tête. Ce n'est pas le moment de céder à la panique. Je dois rester concentrée.

Soudain, un homme immense, barbu et impressionnant apparaît devant moi, bloquant mon passage. Je m'arrête net, mes doigts se resserrant instinctivement autour de la poignée de mon épée. L'homme m'observe de ses yeux sombres, son visage impassible. Je fais un pas en avant, refusant de me laisser intimider.

- Je dois parler au patron, dis-je d'une voix ferme, essayant de cacher mon appréhension.

L'homme me regarde un instant, comme s'il évaluait mes intentions, puis il hoche lentement la tête. Sans un mot, il me fait signe de le suivre. Je le suis à travers un labyrinthe de couloirs sombres, mon cœur battant de plus en plus vite à chaque pas. Finalement, nous arrivons devant une porte massive en bois. L'homme ouvre la porte et me laisse entrer.

Je m'attendais à un endroit lugubre, mais ce que je découvre me surprend. La pièce est luxueuse, richement décorée, avec des tapis épais, des meubles en bois sombre finement travaillés et des chandeliers qui illuminent l'espace d'une lumière chaude. Un contraste saisissant avec l'atmosphère des ruelles extérieures.

Au centre de la pièce, un homme est assis derrière un large bureau. Il est grand et élancé, avec la peau tel de la porcelaine et des cheveux d'un blanc éclatant, presque surnaturels. Ses yeux bleu clair, presque translucides, me fixent avec une intensité qui me met mal à l'aise. Ils me rappellent étrangement le petit chat que j'ai trouvé dans les jardins du palais. Un pincement au cœur me traverse à cette pensée, et je me demande brièvement si le chat va bien. Je l'avais laissé dormir ce matin avec de la nourriture à proximité.

Je balaye la pièce du regard et mon cœur manque un battement. Là, devant moi, se trouve une silhouette familière, assise de dos. Des cheveux blonds, tombant en cascade sur des épaules que je reconnaîtrais entre mille. C'est Selly.

- Selly ! m'écriai-je en me précipitant vers elle, mes jambes tremblantes de soulagement.

Selly se retourne, son visage pâle, et avant même qu'elle ne puisse parler, les larmes coulent de mes yeux. Elle est là. Vivante.

- Que s'est-il passé ? Demandai-je, ma voix tremblante d'émotion.

L'homme à la chevelure blanche se lève doucement de son bureau, faisant signe de s'asseoir. Il a l'air d'avoir un âge similaire à mon frère, mais une sagesse plus ancienne brille dans ses yeux.

- Asseyez-vous, dit-il calmement. Je suis le maître de cette guilde, Kaelith

Je m'assois lentement, encore sous le choc. Selly prend une profonde inspiration et commence à expliquer.

- Lorsque tu es partie, mes gardes ont commencé à agir bizarrement, dit-elle d'une voix faible. Je... je ne comprenais pas pourquoi, mais soudain, ils m'ont attrapée et m'ont forcée à les suivre dans une petite ruelle. J'ai essayé de me débattre, mais ils étaient trop forts...

Elle marque une pause, sa voix tremblante, et je serre les poings de rage en imaginant ce qu'elle a dû subir.

- C'est là que le maître de la guilde est intervenu, reprend-elle. Il a vu ce qui se passait et m'a sauvée. Il m'a ramenée ici pour que je sois en sécurité.

Je me tourne vers l'homme, encore méfiante malgré ses bonnes actions.

- Pourquoi l'avez-vous sauvée ? demandai-je en essuyant mes larmes. Et qui étaient ces gardes ?

L'homme s'assoit de nouveau derrière son bureau, ses doigts entrelacés devant lui.

- Ceux qui ont agi ainsi n'étaient plus vos gardes au moment de l'attaque, dit-il d'une voix grave. Ils avaient été corrompus, sous l'influence d'une force bien plus sombre.

Les larmes du crépusculeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant