Sous pression

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Après une matinée tranquille chez Nadia, je suis rentrée à pied. Ça m'a fait du bien de passer du temps avec elle, même si, comme d'habitude, elle n'a pas arrêté de me raconter ses histoires, ses crushs des réseaux, ses petites péripéties. Moi, je la laissais parler, mais sans vraiment être là.

Dans le fond, je pensais déjà à autre chose...

J'étais dans mon quartier. J'ai grandi ici, Nadia et moi, on a partagé des goûters, des rires, des secrets.

Depuis toujours, ce coin, c'est chez nous.

Les souvenirs de notre quartier défilent autour de moi pendant que je marche. J'ai grandi ici. Nadia habite toujours à quelques blocs de chez moi, comme depuis qu'on est petites. On avait commencé à traîner ensemble en primaire, partageant nos goûters sur les bancs. Depuis, c'est comme si nos vies s'étaient tissées ensemble.

Mais le quartier, lui, il avait changé. Les bâtiments, vieux et fatigués, paraissaient toujours plus délabrés. Les halls d'immeubles sentaient la pisse, les murs étaient tachés de tags et de graffitis qui s'entassaient année après année. Normalement, c'est animé ici, bruyant, vivant. Le quartier ne dort jamais vraiment, même en hiver. Il y a toujours des cris, des éclats de voix qui résonnent entre les blocs, des jeunes qui traînent en bas des immeubles, des familles qui sortent, des voitures qui passent. Mais là, vu qu'il était encore tôt, c'était plutôt calme. Les seules personnes que je croisais étaient des mères de famille qui filaient au marché.

J'ai ralenti un peu, profitant de ce rare moment de tranquillité. Les dernières feuilles d'automne tombaient doucement, emportées par une légère brise. C'est dans ces moments-là que j'apprécie la simplicité des choses. Je laisse mes pensées s'évader un instant avec la musique de Nekfeu dans les oreilles, me concentrant sur ce qui m'entoure.

Je m'arrête à la boulangerie pour prendre du pain. Une petite habitude du matin avant que les garçons et maman ne se réveillent. Mais alors que je reprends le chemin vers chez nous, je vois une scène qui fait remonter ma tension en flèche.

Marwan, mon petit frère, est là, juste devant moi, face à un homme beaucoup plus vieux que lui. Ils sont en pleine embrouille. L'homme le tient par le col, son visage trop proche de celui de Marwan. Je ne réfléchis pas, mon corps réagit tout seul.

— Hé ! Lâche-le ! criai-je en m'approchant rapidement.

L'homme se tourna vers moi, un regard dur, méprisant. Il n'avait pas l'air impressionné par ma présence.

— Casse-toi, ça te regarde pas, répondit-il froidement, sans lâcher Marwan d'un pouce.

Je me suis avancée, déterminée.

C'était mon frère qu'il tenait là, mon sang.

— C'est mon frère, alors si, ça me regarde. Lâche-le ou ça va mal finir pour toi.

Il sourit, un sourire qui me glaça. Il pensait sûrement que j'étais juste une fille qui s'énervait pour rien.

—  J'en ai rien à foutre que ça soit ton frère, lança-t-il calmement. Il me doit de l'argent, et s'il paye pas maintenant, je le lâcherai pas.

Marwan ne disait rien, il ne bougeait même pas. J'ai senti la colère monter en moi.

— Tu vas lâcher mon frère maintenant, ou je te promets que tu vas regretter de t'être approché de lui.

Je me mis juste devant lui, me plantant entre l'homme et Marwan. Il me jaugea, avec ce même sourire de défi, comme s'il me testait. Puis, d'un geste lent, il le relâcha, mais pas sans me lancer un dernier avertissement.

Adila - Entre Ombres et Lumière Où les histoires vivent. Découvrez maintenant