Quand ma mère est arrivée, à peine entrée dans la chambre, elle s'est précipitée sur moi.
— Hey Fa, hey Fa, soubhanala ! Ay sama dom bi, sama nenetouti bi, boula dara dale, tout en brouhaha. En me touchant le corps...
Elle n'était pas seule. Mon oncle, Tonton Saliou, était là aussi, la main posée sur son épaule comme pour la calmer. « Doucement, Rama, doucement », lui disait-il d'une voix apaisante. « Ne lui rajoute pas plus de stress, elle n'en a pas besoin maintenant».
Ma mère m'a pris dans ses bras, et je pouvais sentir son cœur battre à tout rompre. Ndeysann, l'amour d'une mère.
— Aye Fa, balma ak, ma leu sonal, stress bu yep mane la. Dom, balma.
Les larmes ont coulé sans que je puisse les retenir. Entendre ma mère admettre sa part de responsabilité... c'était comme un baume sur mes blessures.
Mon oncle a ensuite commencé à me questionner, demandant comment je me sentais, si j'allais bien... Puis, le docteur est entré. Il a discuté avec mes parents (ma mère et mon oncle) de mon état, expliquant que j'avais besoin de repos, de calme pour surmonter cette crise. Il a ajouté que cette situation était très fréquente, mais inshalah, tout irait bien. Il m'a tout de même avertie que je risquais de rechuter si je ne prenais pas soin de moi.
Quant à ma mère, après le départ du docteur, elle a rencontré Monsieur Badiane et lui a expliqué toute notre situation. Elle a tout révélé sur notre précarité, sur l’importance de la bourse pour nous. Je pense que Monsieur Badiane a compris ma situation. Bref, moi, je ne suis pas comme ma mère. Je sais garder les choses pour moi, car je suis réservée, tandis que ma mère est extravertie. Bref...
Après cela, ma mère a rencontré Amina. Je pense qu'Amina avait bien compris ma situation, car elles ont longuement discuté en dehors de la chambre. Même si je ne sais pas tout ce dont elles ont parlé mais connaissant ma mère... Elle a sûrement exposé toute notre vie à amina. Amina est une fille très pudique, toujours dans la discrétion, à l'opposé de Binette. Oui, après quelques mois de cohabitation, je commence à bien cerner chacune d'elles.
Mon oncle, Tonton Saliou, vêtu de son grand boubou blanc, restait debout près de la porte, le visage grave mais doux. Ma mère, elle, s’agitait autour de moi, son pagne coloré virevoltant à chaque mouvement brusque. Puis à l'heure de la prière, mon oncle est partie prier me laissant seule avec ma mère.
Une fois seule avec elle, ma mère m'a dit :
— Fa, li dou néne. Je crois que tu as été maraboutée.
— Maraboutée ? Yaye, tu as bien entendu le médecin. Ce n’est pas une affaire de maraboutage !
Ma mère, secouant la tête, insista :
— Fa, écoute-moi. Les gens de notre famille sont mauvais. Tu es la seule fille à aller à l'université. Toutes tes cousines se sont mariées très jeunes et vivent dans la pauvreté. Tu es la seule à avoir réussi. C'est la jalousie, mais inshalah, quand tu sortiras de l'hôpital, on ira voir ce marabout, pa Dansokho, inshalah. Lou lokho deff, lokho dina ko dindi.
Je suis restée silencieuse. Ma mère et ses histoires de maraboutage... Je l'aime, mais parfois, je me demande si on vient vraiment du même monde. Elle voit des jalousies et des malédictions partout, là où moi je vois juste une fatigue extrême, un corps qui a lâché sous le poids de tout ce stress.
Elle m'avait apporté des fruits et de la bouillie... Malgré tout, je l'aime, ma mère 🤣.
Puis l’heure de partir arriva. Elle m'a dit qu'elle reviendrait demain, mais connaissant ma mère, elle fera sûrement un saut chez un marabout avant. Elle en connaît tellement...
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Chronique de Fa, L'étudiante
RomanceFa, l'étudiante Fa est une jeune femme déterminée venant des quartiers modestes de la banlieue de Dakar. Elle a toujours rêvé de devenir médecin, un rêve qui semblait lointain dans son petit appartement exigu où elle partageait ses journées entre ét...