Chapitre 15 « Duo improbable »

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La journée est presque finie, mais dans l'amphithéâtre, c'est l'angoisse totale. On attend tous les résultats de nos projets en binôme, l'air put la nervosité. Mes mains sont moites et mon cœur bat à cent à l'heure. J'ai bossé comme une dingue sur ce projet et Jordan aussi, on y a mis tout ce qu'on avait. Je jette un coup d'œil à mon partenaire, il a l'air aussi stressé que moi. Pour une fois, on est dans le même bateau. Mme Lopez joue la juge dans une cour d'assises. Elle feuillète les résultats avec une précision chirurgicale, comme si elle s'apprêtait à trancher des vies. Son regard est impénétrable, et j'ai l'impression qu'on va passer un interrogatoire au lieu de recevoir une note. Je sens la boule au ventre grossir. La remontée de ma moyenne dépend majoritairement de ce devoir. Je repense à toutes les nuits blanches que j'ai passé à peaufiner les moindres détails. Aux discussions interminables au téléphone avec Jordan pour tout rendre parfait. L'autre soir à la cafet', je n'avais aucune envie de le retrouver. J'y allai à reculons, mais je faisais tout pour montrer que j'étais sereine alors que je ne voulais qu'une chose : faire demi-tour. Mais en vérité, j'ai vraiment apprécié bosser avec lui, pire, j'ai aimé être avec lui. Le lendemain soir, j'ai perdu toute raison. Mon cerveau avait décidé de prendre des vacances et j'ai appelé Jordan. J'avoue prendre plaisir à entendre sa voix sarcastique, à imaginer son sourire en coin quand je l'envoie chier. Il me fait sentir vivante, de la manière la plus exaspérante possible. C'est grisant, mais je crois que j'aime bien. C'est positif. Enfin, je crois. Quand Mme Lopez approche de ma table, le temps s'arrête. Je la regarde, essayant de déchiffrer la moindre indication sur son visage, mais rien. Nada. Elle est aussi expressive qu'un mur. Mon cœur bat si fort que j'ai l'impression que tout le monde peut l'entendre.

_ Mademoiselle Sanchez, monsieur Davis, annonce Mme Lopez d'une voix solennelle, votre projet a retenu toute mon attention.

Je fixe la feuille entre ses mains comme si ma vie en dépendait. Ma vie ? Non. Ma scolarité ? Un peu. Une boule d'anxiété se forme dans le creux de mon estomac. Je me demande si Mme Lopez fait partie de ces profs sadiques qui distribuent les copies par ordre de notes. De la plus mauvaise à la meilleure ou inversement. Mes mains sont moites, et je sens mon cœur battre dans ma poitrine, comme si chaque battement résonnait dans toute la salle. Je jette un coup d'œil à Jordan, et il a l'air aussi stressé que moi. C'est comme si on partageait le même nœud d'angoisse. Mme Lopez, elle, prend tout son temps. On dirait qu'elle savoure cet instant de suspense.

_ Félicitations, s'exclame-t-elle enfin. Vous avez abordé le sujet de manière exceptionnelle. C'est un travail remarquable et c'est pourquoi vous avez eu la meilleure note.

Mon cerveau met un moment avant d'enregistrer l'information. Un flot de soulagement et de joie m'envahit. Je me tourne vers Jordan, qui me fixe déjà. Il me décoche un clin d'œil à fendre la terre en deux et je souris, fière de nous. Le duo le plus improbable a réussi haut la main.

À la fin du cours, alors que tout le monde se disperse dans le couloir, je le vois s'éloigner. Jordan commence à disparaître au milieu de la marée d'étudiants. Pas question de le laisser filer. Je me faufile entre les groupes, bousculant légèrement quelques personnes, jusqu'à ce que je sois assez proche pour crier.

_ JORDAN ! Ma voix se mêle au brouhaha, mais il l'entend.

Il se retourne, surpris, les yeux écarquillés en me voyant courir vers lui. Avant même qu'il n'ait le temps de réagir, je lui saute dessus, enroulant mes bras autour de son cou. Un courant électrique me traverse, et je suis sûre qu'il le sent aussi. Mon cœur bat à toute allure et je suis submergée par une vague de joie pure et intense.

_ On a réussi ! je m'exclame, le serrant encore plus fort contre moi, incapable de contenir mon bonheur.

Ses bras hésitants finissent par entourer ma taille. Il niche son visage dans mon cou et nos corps se pressent l'un contre l'autre.

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