Et merde.
Le texto de Nicole vient de me foutre à genoux.
J'éteins le feu sur lequel cuisait le contenu fade d'une boîte de conserve et je m'effondre sur la chaise de la cuisine. La tête entre les mains, j'entrevois l'enfer qui m'attend.
Je suis rentré groggy de mes retrouvailles avec Monica. J'étais heureux, mais ivre. Ivre d'un trop plein d'émotions fortes au point de ne plus en percevoir une seule.
Désormais, je dois trouver une solution urgente parce que le bracelet et le collier, je ne les ai plus. J'ai tout vendu ce matin, j'ai récupéré le fric et comme convenu avec ce couillon de maître chanteur, le Ratel, j'ai effectué un virement. Le compte était sous un faux nom, un certain « Marc Durant ». Comme si je n'allais pas voir l'anagramme de « Truand » !
Je prends le téléphone et décide d'assumer la connerie jusqu'au bout.
[Désolé Nicole, je vais tout avouer à Monica, promis. Préviens pas les flics. Je viendrai avec Marius samedi et je rapporterai les bijoux.]
Et je mens encore. OK, je vais venir, je vais tout balancer parce que ma conscience n'en peut plus et je présenterai mon fils. Mais va falloir que je leur avoue aussi que je n'ai plus ni le bracelet ni le collier.
Chaque chose en son temps. Pour le moment, le plus important, c'est qu'elle ne porte pas plainte, parce que si je me coltine des poursuites, je peux dire adieu à la garde de mon fils.
Ça a été la croix et la bannière pour obtenir de le voir au moins un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires. Charlotte est parvenue à argumenter sur mes conditions de vie, pas idéales pour un gamin. Je vis dans un T1 et je dors sur le canapé.
L'unique chambre est pour le minot. Elle est très jolie et j'en suis fier. J'ai refait la peinture, changé les fenêtres pour éviter les courants d'air et je lui ai acheté une belle couette avec des dinosaures, depuis le temps qu'il me tannait avec ça ! Sur les murs, il y a des photos de nous, nos bons moments. Lui bébé, sa mère, moi, quand tout allait pour le mieux.
Je ne veux pas qu'il se doute qu'entre Charlotte et moi, c'est la guerre désormais. Elle me flique et veut que je lui rende des comptes en permanence. Tant que je n'aurai pas trouvé un boulot décent de toute façon, je n'aurai aucune chance d'obtenir plus de jours de garde pour profiter de la vie avec mon fils.
[Est-ce que je peux te faire confiance ?]
Nicole.
J'ai envie de lui dire « non ».
Que je suis un pauvre type, que je ne mérite pas sa gentillesse. Ce type de filles, le pire qu'il puisse lui arriver, c'est de tomber sur un mec comme moi, du genre à abuser de sa générosité. Elle n'est pas fourbe, elle n'anticipe rien de la méchanceté des autres. Je voudrais la protéger de toutes les désillusions que je vais lui apporter. Si j'écoutais ma lâcheté, je n'irais pas chez ma grand-mère samedi. Quoi que je fasse : y aller et lui avouer mon méfait, ou ne pas y aller, je lui briserai le cœur.
Je vais lui faire du mal, parce que je suis un véritable poison pour les autres.
Toutes les deux pourraient me forcer à porter plainte contre le Ratel. Il vaut mieux que je n'en parle pas, je me contenterai d'expliquer que j'ai des soucis financiers.
Lui et moi, nous sommes rentrés en contact de façon fortuite, il y a cinq mois. J'ai reçu un mail d'un gars qui proposait des crédits. Des emprunts, j'ai déjà dû en faire pour couvrir les frais d'avocats pour mon litige avec Jérôme, mon associé et ex-meilleur ami et aussi pour le divorce. À ce moment-là, je ne pouvais pas prétendre obtenir l'aide juridictionnelle. La banque a refusé que j'augmente mon crédit et les organismes privés sont de plus en plus regardants. Un type au chômage qui finit dans le rouge chaque 15 du mois, c'est clair que je ne suis pas le bon pigeon. Alors le Ratel est devenu la solution que je savais déjà mauvaise dès le départ.
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Des aiguilles sous le sapin
RomanceRien ne prédestinait Yanis, chômeur et père célibataire, à vendre des pelotes de laine. Il n'a pas eu le choix : c'était ça ou finir chez les flics. Ça lui apprendra à cambrioler sa grand-mère ! Il doit en plus suivre les ateliers tricot de Nicole...