La petite chipie reposait sur la table blanche, dans une pièce sombre, baignée d'une lumière éblouissante. Sa petite main était froide, si douce, innocente et encore pleine de l’énergie de la vie qui l’avait quittée. Son visage, bien que sombre de peau, semblait pâle ; et même si ses yeux étaient clos, il était impossible de confondre ce corps sans vie avec celui d’une belle endormie, blottie en boule et entourant de ses petites mains Ignatiusa.
Elle n’avait pas le vertige, mais il semblait qu’elle était sur le point de s’endormir les yeux ouverts. Les yeux ne pouvaient pas quitter Daffodil, elle ne ressentait rien ou peut être tout à la fois pour comprendre quel sentiment dominait. La colère envers les médecins, la sérénité et le soulagement pour Daffodil qui ne devrait pas souffrir de la perte de ses proches et de sa maison, la honte de n'avoir pas tenu sa promesse, la solitude mais à la fois un peu de la paix et finalement une certaine indifférence, elle ne connaissait pas ce petit enfant très longtemps et elle ne le pouvait pas, Ignatiusa avait toujours l'idée de quitter l'hôpital à n'importe quel moment et de dire au revoir à Daffodil.
Lyulph s'approcha du corps de Daffodil, posant doucement sa tête contre la petite main froide. Ses yeux, d’habitude vifs, semblaient empreints d’une tristesse muette, presque humaine. Dans ce silence, il veillait sur elle, fidèle jusqu'à la fin.
Soudain, la porte s'entrouvrit légèrement, laissant entrer une infirmière, suivie d'Arlan. Mais Ignatiusa n’y prêta pas attention. Il portait un énorme sac à dos et tenait dans ses mains un objet long et fin, vert avec une boule jaune étrange à son extrémité, faite de formes triangulaires. Au centre, une cloche fragile, jaune et délicate, semblait émerger. Il déposa doucement cette création frêle sur le corps faible de la petite, aussi fragile maintenant qu'il l'était alors.
Ignatiusa s’était déjà penchée en avant, prête à manœuvrer son fauteuil roulant vers la sortie, une seule pensée en tête : fuir cet endroit, ce poids, cette atmosphère suffocante. Mais avant qu’elle ne puisse rouler d’un centimètre, la voix de l'éducatrice en santé la retint.
"- Mademoiselle Senna," annonça-t-elle d’un ton plus doux que d’habitude, "avec les événements qui se sont produits… il me semble que vous pourriez bénéficier d’un peu d’air frais. Pourquoi ne pas faire un petit tour du royaume ? Monsieur Rubtanof vous accompagnera."
Ignatiusa tourna la tête vers Arlan, le regard encore chargé d'émotions contradictoires. Elle hésita un instant, son instinct lui soufflant de décliner, de se retrouver seule. Mais, sans mot dire, elle relâcha ses mains de ses roues, cédant à la suggestion silencieuse qui planait entre eux. Arlan, comprenant son assentiment, saisit fermement les poignées du fauteuil, prenant les commandes.
Le royaume dégageait une incroyable puissance, froideur, et résilience, s'élevant vers les cieux par ses toits et la lueur des pierres précieuses qui ajoutaient des touches de couleur. Les hautes montagnes attiraient par leur majestueuse hauteur, inaccessibles, comme un objectif impossible à atteindre, cherchant à toucher les nuages.
Arlan avançait en silence, poussant le trône à roulette de Ignatiusa, tandis que Lyulph semblait incapable de rester en place, comme si chaque seconde d’immobilité brûlait ses pattes.
Après le long chemin ils arrivaient sur une terrasse entourée de maisons qui étaient en réalité des arbres mais enfin des abris pour les créatures étranges comme Lyulph. Cependant la vue était majestueuse, un air différent plus triomphant, plus certain, plus libre et plus encourageant. «Les titans de roc et de glace, dont les sommets touchaient les cieux» était la description la plus pertinente et éternelle.
"- Je te laisse ici une heure." dit Arlan en attachant les roues pour qu'elle ne puisse s'en fuir. Cette fois, il évita de croiser son regard, ses mouvements plus durs que d’habitude. Il verrouilla chaque roue avec une précision presque excessive, comme pour souligner sa détermination.
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Légende du monde perdu [TOME 2]
FantasíaKarina quitte son royaume pour résoudre le mystère de Casterin qui est occupé par sa sœur Anaiar.