Légende du monde perdu [TOME 2]

Chapitre 29: Karina

Trois bateaux glissaient silencieusement sur l'eau noire, se dirigeant vers la grotte, là où le trésor les attendait, du moins c’était ce qu’on leur avait fait croire. Aloïsa, seule sur sa barque, ramait avec une précision presque mécanique, son visage imperturbable, son regard fixé droit devant elle. Un peu plus loin, Grace et Aleep naviguaient sans bruit, se laissant porter par le courant, leurs mouvements parfaitement coordonnés.

Elle suivait la silhouette furtive de Neilée, qui venait de quitter leur bateau sans se faire remarquer. Le léopard de neige flottait vers les rochers, se fondant dans l'ombre, loin des regards.

Un courant froid, bien plus glacial que celui de l’océan, semblait sortir de son propre cœur, enveloppant tout son être. Encore une trahison, encore des mensonges et encore c'était elle qui organisait tout ça. Cependant celle-ci semblait être moins brisante que la manipulation d'un petit âme innocent de Baldr ou même Rina.

"- T'inquiètes, c'est pas ton dernier regard sur le vaisseau." dit Storm avec son éternel sourire narquois au coin de lèvre. " Il y aura toujours quelqu'un qui me devra de l'argent."

Sans se détourner de l’horizon, Karina répondit d'une voix basse, presque menaçante : «— Fait gaffe, les rôles pourraient bien changer un jour, Storm.»

Il éclata d’un rire moqueur. «— Ha ! Je voudrais bien voir ce jour.»

Elle tourna légèrement la tête, les yeux mi-clos, son ton tranchant comme une lame : «— Rame en silence.»

Ayant chassé toute la poussière de la construction d'étroites prisons pour son âme.  Il était impossible de quitter des yeux la beauté de la nature.  Sous la brillance de lune  et au son de la mélodie des vagues, de titanesques apparence mais fragiles à l'intérieur falaises contemplaient le paysage. 

Qu'est ce qu'ils ont subi ces massives, comment cette eau marine et innocente sculptait les arcs de son triomphe.  Ces roches, constituées de craie, étant formées il y a des millions d'années à partir de sédiments marins.  La craie, étant un minéral mou, était vulnérable à l’érosion causée par le vent, l’eau et les puissantes vagues océaniques.  Au fil du temps, la lutte constante de la nature avec la pierre a creusé des arches complexes dans les rochers, laissant des zones plus solides qui formaient des ponts naturels, témoins d'anciens cataclysmes.

Le temps, allié aux forces naturelles, avait donné naissance à des arches complexes, des grottes mystérieuses et des ponts naturels. Les forces tectoniques s’étaient jointes au ballet, soulevant ces couches fragiles de craie, tandis que les marées inlassables érodaient leurs bases. Ce mariage de terre et de mer avait engendré des paysages à couper le souffle, où la fragilité de la roche rencontrait la puissance invincible de l'océan. C'était vraiment époustouflant, si majestueux et inexplicable que chaque seconde passée à observer ces rochers faisait ressentir la grandeur de la nature mais aussi son insidiosité.

Elle ne pouvait détourner les yeux de cette beauté silencieuse, une pensée pénétra dans son esprit, peut-être qu'elle était ridicule mais Karina ne pouvait pas la rejeter. Ces falaises étaient comme elle — façonnées par les épreuves, les tempêtes, les coups, endommagés par la mer et l'érosion du temps. Mais elle ne pouvait pas être comme ça, elle ne pouvait pas laisser les obstacles la cassé.

Je dois devenir comme la mer, celle qui passe même à travers la terre.

« — Arrivé, » annonça Storm.

Karina revint brusquement à la réalité, tirée de ses pensées par la voix de Storm. Elle leva les yeux et vit au-dessus de sa tête un ciel de pierre : la grotte immense, d’un gris froid, semblait les engloutir dans ses entrailles. L’écho de leurs pas résonnait sur le sol inégal, amplifiant l’impression d’être surveillée.