Chapitre 8

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BLAKE

Grand Prix d'Arabie Saoudite, Circuit de Djeddah, weekend du 7 avril 2024
Quatrième manche de la saison

La tournée au Moyen-Orient se passe plutôt bien avec deux solides quatrième places à Abu Dhabi et au Qatar. Elle se termine ici sur le circuit de Djeddah en Arabie Saoudite. Malgré ma quatrième place au classement général, je ne l'aborde pas de la manière la plus sereine pour être tout à fait franc. Non seulement c'est encore un circuit totalement inconnu pour moi, mais la petite nouveauté c'est que c'est aussi un Grand Prix qui se déroule en nocturne. Pour couronner le tout je suis malade depuis deux jours, bref ce n'est pas la joie.

Je suis devant le centre média avec Nick et Andrea le pilote de chez Black Mamba avec qui je viens de terminer la traditionnelle conférence de presse. À moitié absorbé par notre discussion à cause d'un sacré mal de tête, je sens quelqu'un me bousculer. Je tourne la tête vers la droite, m'attendant à ce que la personne s'excuse mais il n'en est rien, bien au contraire.

— Sérieux Da Silva tu peux pas faire gaffe non?

Je reconnaîtrais ce ton et cet accent les yeux fermés. Les mêmes qui m'exaspèrent depuis le début de saison, ceux du pilote français de Caballo Negro, Hugo Adam.

— Qui ça moi? On dirait plutôt que c'est toi qui a une fâcheuse tendance à me rentrer dedans à chaque fois que tu me vois, Hugo.

J'allonge délibérément son prénom. Je ne suis pas d'humeur à supporter ses enfantillages. Je continue pour abréger au plus vite notre échange.

— Je sais que je te plais mais tu sais, je préfère largement que tu m'offres des fleurs et que tu m'emmènes dîner. Ce serait pas mal comme première étape.

Je vois Nick secouer la tête en souriant semblant dire "il est pas croyable". Au même moment, on appelle Hugo pour la conférence. Avant de franchir la porte, il lance sans même jeter un regard vers moi.

— C'est ça fait le malin. Tu rigoleras moins dimanche.

Je lève les yeux au ciel. Andrea m'explique qu'il fait ça depuis qu'il est en F1. Que lui-même a subi cette ridicule petite stratégie d'intimidation il y a deux ans. Chaque année, il a un mec qu'il ne peut pas encadrer et cette année, c'est pour ma pomme. Je prends congés de mes deux collègues et envoie un texto à Ryan pour qu'il m'apporte une aspirine. J'ai encore quelques événements auxquels je dois assister, il faut que je tienne au moins une heure ou deux. Je pense d'abord me poser à l'hospitality mais je me ravise et profite que tout soit encore calme pour me poser dans mon coin du box.

— Ben dis donc tu ne dois vraiment pas être bien pour être tapis dans le noir mec.

J'entends enfin la voix de Ryan après ce qui m'a semblé être une éternité.

— Putain m'en parle pas. Merci, tu es un chef. En plus, j'ai croisé mon grand copain français tout à l'heure. Quel abruti sérieux.

J'avale d'une traite le médicament qu'il me tend

— Laisse courir va. C'est tout à fait le genre de mec à essayer de rentrer dans ta tête pour essayer de te perturber et tu sais pourquoi? Parce qu'il n'a pas le talent pour le faire en piste. En plus j'ai entendu dire qu'il s'était fait pas mal taper sur les doigts en coulisses après sa manœuvre sur toi à Miami.

Je fais osciller mon fauteuil de droite à gauche en me pinçant l'arrête du nez dans l'espoir que ce léger bercement calme plus rapidement le marteau que j'ai dans la tête.

— Ouais t'as pas tort. Comment tu sais ça toi?

— Eh il faut bien avoir ses oreilles partout pour servir mon pilote non?

Malgré l'obscurité, je vois le sourire en coin qu'il arbore fièrement.

— Bon je te laisse tranquille d'ici 10 minutes ça devrait aller mieux. Si après tes relations publiques ça ne va toujours pas tu m'appelles, je te ramène à l'hôtel ou au pire je crois que le médecin est encore sur le circuit.

All the way 'till the checkered flagOù les histoires vivent. Découvrez maintenant