Muse

Face à la mer

Calogero et Passi

De la place, j'en fis beaucoup à Max, bien malgré moi. Jos avait cessé de conspirer pour que l'on se croise à nouveau. Même pendant les fêtes, ce que j'avais trouvé extrêmement étonnant. Plus le temps passait, plus je me disais que je devais cesser de tenter de comprendre Jos.

Nous étions déjà en février. La nouvelle saison était sur le point de démarrer, et je ne comptais plus mes heures. Max était en réalité assez loin de mes pensées. Bien sûr, j'aurais aimé le croiser les jours où nous étions à l'usine en même temps, mais cela n'était pas arrivé en trois ans depuis que j'avais rejoint la Formule 1. Cela n'avait pas commencé depuis que j'avais rejoint l'équipe de voyage. En réalité, cela augmentait mes chances significativement, car nos bureaux étaient situés bien plus près du simulateur que ceux de mon ancienne équipe. Je n'avais sans doute pas eu de chance. Ou alors j'avais eu de la chance ? J'étais toujours perplexe face à sa réaction de la dernière fois.

On aurait dit que je lui avais fait du mal, mais j'avais beau repasser la conversation dans ma tête, je ne parvenais pas à comprendre ce que j'avais bien pu lui dire pour le mettre dans un tel état. Peut-être que Jos avait raison, peut-être qu'il avait simplement des sautes d'humeur. Mais c'était tellement différent du Max que je connaissais. Avec moi, il était toujours souriant, avec la blague facile. Jamais un mot plus haut que l'autre. Alors oui, je le savais caractériel, mais sa réaction de la dernière fois ? Ça n'était pas juste son mauvais caractère.

Tout cela était beaucoup trop compliqué. J'avais donc décidé de mettre Max dans un coin de ma tête. J'avais beaucoup de travail à faire, beaucoup à prouver, et il était hors de question que j'échoue.

Février signifiait aussi team building. L'objectif était d'avoir un temps dédié au brainstorming, mais également de régler les conflits et déceptions de l'année passée pour commencer l'année dans de meilleures conditions. Ce n'était pas mon premier team building avec l'écurie, mais mon premier avec ma nouvelle équipe. J'étais donc un peu stressée, même si je connaissais désormais tout le monde.

J'étais surtout très excitée à la perspective de travailler avec Adrian Newey, qui serait également présent. Pendant les week-ends de course, il n'avait pas le temps de s'adresser directement aux nouveaux. Je n'avais donc jamais eu l'opportunité de le rencontrer. Ajouter une masterclass donnée par Adrian Newey à mon cv, alors que la Red Bull était la saison dernière et sans doute pour la saison à venir la voiture la plus dominante du paddock, m'assurait plus ou moins de trouver du travail pour le restant de mes jours.

Je devais donc être encore plus concentrée qu'en temps normal, des fois qu'il reconnaisse mon génie de l'autre côté de la pièce et décide de faire de moi son assistante personnelle.

Quoi ? Une fille a bien le droit de rêver, non ?

Milton Keynes n'était apparemment pas suffisamment perdu dans la campagne, puisqu'il avait été décidé que le team building aurait lieu au fin fond des Cornouailles. Je n'étais même pas sûre que nous ayons suffisamment de réseau pour travailler.

J'étais citadine dans le corps, mais surtout dans l'âme. La perspective de passer quatre jours à la campagne m'enchantait beaucoup moins. J'étais persuadée que j'aurais des allergies en plein milieu de l'hiver.

– Devine qui nous fait le discours d'introduction.

– Adrian ?

– Adrian ? se moqua Chloé. T'aimerais bien.

– Bah oui, répondis-je sur le ton de l'évidence.

– Christian Horner lui-même, répondit-elle. Quand il se déplace, tu peux être sûre qu'ils ont une annonce importante à nous faire. Avec un peu de chance, ils veulent augmenter nos primes. Je croise les doigts pour un bonus supplémentaire si on gagne aussi la seconde place du championnat cette année.