Chapitre 28

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Les pompiers arrivèrent. J'étais dans les bras de Corentin, qui me susurrait de mots apaisants, je pleurais, incapable de respirer normalement, incapable de prononcer un autre son que mes reniflements incessants. La pluie avait éteint les flammes de la voiture, à moitié consumée.

Un des hommes en uniforme rouge nous entoura d'une couverture de survie et nous guida à l'arrière d'une ambulance.

- Où sont vos parents ? demanda-t-il d'une voix peu rassurante.

- Je... je...

J'abandonnai. Il m'était impossible d'aligner trois mots.

- Les miens sont chez moi, les siens sont en vacances ne les dérangeaient pas s'il vous plaît, reprit Corentin à ma place.

- Je vais être forcés d'appeler ta maman ou ton papa, répondit le pompier.

Corentin fit la moue, agacé.

- Bien.

- Donne-moi son numéro je te pris.

- 06 21 08 12 16.

L'homme composa le numéro mais il tomba sur le répondeur. Il essaya ensuite d'appeler Marc, mais une fois de plus personne ne répondit.

- On va vous ramener chez vous, dit-il alors.

Au lieu de réagir à ce qu'il racontait, je regardais la scène qui se passait à quelques mètres de nous ; les autres pompiers installaient l'homme, visage méconnaissable, immolé par le feu, sur un brancard avant de le recouvrir d'un drap blanc. Mes yeux s'emplissaient de larmes. Un homme était mort sous mes yeux de la même façon que mon père. Avait-il des enfants ? Une femme ? Seraient-ils autant dévastés que moi ? Tout allait trop rapidement. Mon cœur battait tellement vite que je le sentais résonner dans tout mon corps. Je ne connaissais pas cette personne, pourtant, lorsque l'ambulance démarra, son cadavre à l'intérieur, mes jambes lâchèrent et je tombai au sol dans un cri déchirant qui m'attrapa les tripes d'une main pour les tordre et les tirer dans tous les sens. Mes ongles se cassaient à force de griffer le bitume sur lequel mes genoux se vidaient de leur sang. Les mots dans ma gorge restaient bloqués tant et si bien que j'eus pendant, quelques minutes, l'impression que ma trachée triplait de volume.

Je sentis une main se poser sur mon épaule que je dégagea d'un revers de main si puissant que j'entendis le pompier se plaindre. Il devint soudain plus froid que la glace :

- Monte. Je vous ramène chez vous.

J'aurais voulu obéir, j'aurais souhaité m'installer sur le siège passager seulement mes jambes refusaient de me porter.

- Allez Princesse. Viens.

La voix de Corentin, douce, rassurante, aimable me ramena à la réalité. Je sentais de nouveau le pluie froide s'infiltrer sous mon t-shirt et engourdir chaque partie de mon corps. Mais je n'avais toujours pas la force de me relever.

- J'y... J'y arrive pas, dis-je dans un dernier effort.

Je me sentis tomber avant d'être rattrapée par des bras réconfortant. Je me laissais faire. J'étais incapable de faire le moindre geste seule. Incapable de résister. Incapable de parler. Incapable d'ouvrir les yeux ne serait-ce qu'une demi seconde. Je ne pouvais plus rien faire.

* * *

J'avais chaud. J'ouvrai un œil, puis deux. J'étais allongée sur mon canapé. Un plaid me recouvrait des orteils jusqu'au menton et une bouillotte chaude était placée sur mon front, je la retirai et elle tomba sur le sol, créant une flaque de buée sur le carrelage froid.

- Co' ? appelais-je d'une voix faible.

Le silence seul me répondit.

J'essayai une nouvelle fois.

Pas de réponse.

J'entrepris alors de me lever. Dans un dernier effort je poussai sur mes jambes et avançai, tout en m'appuyant sur tous les meubles à dispositions. Je tremblais de tout mon corps, mon seul but était de retrouver Corentin sans qui j'étais perdue.

- Corentin ?! Corentin ?! criai-je désespérément dans la maison.

Chaque pas devenait plus compliqué que le précédent, chaque pièce dans laquelle je ne trouvais pas Corentin me faisais plus peur encore.

Soudain, j'entendis des bruits sourds venant de l'escalier. Remplie d'espoir, je me déplaçai en direction du son. C'est la que je le vis, il me courra dans les bras. Je fondis en larmes sans même savoir pourquoi.

- Eh princesse ? Je suis là maintenant. Il ne peut rien t'arriver. On est en sécurité. Tout va bien, disait-il en me caressant tendrement le dos.

Sa voix m'apaisait.

- Qu... qu... qu'est ce... qu'est ce qu'il s'est... s'est passé ?arrivai-je à articuler au milieu de ce torrent de sanglot.

- Rien de grave... tout va bien...

- Papa ? Où est papa ? dis-je.

- Prune ? répondit Corentin, d'un ton plus qu'inquiet.

- PAPA ?? m'époumonais-je.

- Mais Prune ?

Je me dégageais violemment de l'étreinte de Corentin. Si brutalement qu'il fut bousculé contre le mur et tomba assis, par terre, bouche bée.

- JE VEUX MON PERE BORDEL !! hurlais-je.

Puis tout me revins en tête et ce fut bien pire que si je m'étais pris un mur en pleine tête. Je reculais comme pour fuir la vérité avant que mon dos rencontre la paroi du mur. Je glissai alors le long de celui-ci, me recroquevillant sur moi même. J'enfouis ma tête dans mes bras croisés, eux mêmes posés sur mes genoux repliés.

Les larmes coulèrent en silence le long de mes joues. Je sentis le poids de la tête de mon copain se poser délicatement sur mon épaule, ce qui permit aux commissures de mes lèvres de remonter légèrement, laissant apparaître un sourire touché sur mon visage noyé d'eau salée.

Nous restâmes là, en silence, et cela me suffisait.

Je coupais alors ce blanc pour dire d'une voix claire :

- Pardon Co'.

- Pourquoi tu t'excuses chaton ?

- Je ne suis qu'une cause de problèmes pour toi.

Je me plaçai sur mes genoux, face à lui, afin de continuer notre discutions.

- Je ne veux pas être une source de mal-être pour quelqu'un. Et encore moins pour toi.

Il posa son index sur ma bouche et s'avança pour déposer un baiser sur mes lèvres encore humides de pleurs.

- Je te veux. Peut importe les circonstance je veux être avec toi. Même si notre amour était impossible je me battrai pour le rendre possible. Je ne pourrai pas vivre sans toi, je me demande comment j'ai fait pour tenir autant de temps avant que tu entres dans ma vie. Je te veux toi, avec ou sans problèmes. Je te veux toi comme tu es et comme tu seras dans trente ans. Putain je te veux Prune.

Il avait dit tout ça avec tant de rage, de tristesse et de sincérité que je ne pu que lui rendre son baiser.

- Je t'aime mon Corentin.

- Je t'aime ma Princesse, quoi qu'il arrive.

Il voulut alors me porter afin d'aller nous coucher dans la chambre.

- NON ! criai-je lorsqu'il tenta de me soulever.

- Qu'est ce qu'il y a ? demanda-t-il.

Pour seule réponse, je le regardais dans les yeux, tandis que les miens étaient larmoyants.

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⏰ Dernière mise à jour : Nov 06 ⏰

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