19.3. La malédiction elfique : Ana

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Elles lui expliquèrent la situation. Ana plaça toute son âme, tous ses espoirs dans chacun des mots qu'elle avait minutieusement choisis.

"Je ne peux poursuivre ainsi, madame. Non seulement cela m'épuise, mais jamais je ne pourrai être votre reine. Jamais je ne pourrai comprendre mon peuple, et pensez à toutes ces décisions irraisonnées que je prendrai une fois sur le trône ! Lorsque je songe au massacre que nos soldats ont connu dans les montagnes, et que je songe à ce que j'aurai décidé si j'avais été à la place de ma tante, je tremble d'effroi.

Je serai un danger pour notre patrie, et je sais que vous avez la sagesse de me comprendre, je dirai même d'être en accord avec les propos que je vous assène depuis des mois. Edlyfia vous effraie et je le comprends, mais elle ne se rend pas compte du danger que je représente. A combien de mes crises de colère avez-vous assisté ? Combien en avez-vous déclenché, en effectuant simplement votre travail ?

Alors pensez à celles que généreront mes ennemis si vous ne faites rien pour moi. Je sais que vous êtes conçue pour mener à bien votre devoir, mais voilà où désormais votre devoir se trouve. Suivez notre future générale dans son choix, et venez en aide à une suppliciée en me libérant de ma capacité à subir ces sentiments atroces !"

La prêtresse demeura silencieuse un moment, avant que son visage ne se fende d'un immense sourire.

"Il était distrayant d'écouter ton petit discours. Tu es une bonne actrice. Si je ne t'avais jamais eu en classe, je l'aurai presque cru spontané."

Ana s'apprêtait à protester mais l'elfe l'interrompit d'un simple mouvement de la main :

"Tu es une sang-mêlée, Ana. Je ne peux pas te faire subir la malédiction elfique telle que nous la connaissons."

Le fardeau qui s'écroula sur les épaules de la jeune femme fut indescriptible, mais pourtant une lueur d'espoir continuait de briller au fond de ses yeux :

"Que voulez-vous dire par telle que nous la connaissons ?"

La grande prêtresse eut un rictus suivi d'un tic nerveux.

"Seulement la moitié du fluide coulant dans tes veines provient de notre peuple. Tu ne peux donc qu'à moitié te protéger de ces sentiments. Ce que je peux t'offrir..."

Elle hésita, jaugeant son élève avant de reprendre :

"Je peux te laisser le choix. Tu pourras te couper volontairement de tes sentiments, mais cela consommera ton fluide. Cela t'épuisera, et diminuera considérablement tes capacités. Mais cela t'accordera toujours davantage de répit que tu n'en connais actuellement..."

Dlyss interrogea la belle dame du regard. Celle-ci le remarqua, et ajouta dans un souffle :

"Egdal m'a appris..."

Dlyss baissa pudiquement les yeux. Elle se tourna vers Ana, qui bouillait sur place. Cette dernière posa une nouvelle question :

"Mais lorsque je choisirai d'accepter mes sentiments, aurais-je de nouveau accès à ma pleine puissance ?

-Si tu as pris le temps de récupérer l'énergie que tu auras perdu dans tes précédentes actions, oui. Cela fonctionnera comme si tu possédais un pouvoir supplémentaire."

Une larme roula sur la joue de la sang-mêlée. Elle la désigna d'un index tremblant d'une multitude d'émotion d'une violence inouïe, le regard rougi par la fureur et le dépit :

"Alors faisons de cette chose l'une des dernières qui se trouvera jamais sur mon visage."

La grande prêtresse acquiesça.

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