3. Koi No Yokan (2/2)

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En réalité, nous parlons sans nous arrêter depuis deux heures et je commence à réaliser qu'il est bien plus qu'un homme « beau », et qu'il n'a rien à voir avec l'attitude austère et prédatrice qu'on pouvait lui trouver.

Je me prête au jeu de l'émerveillement, même si les quelques décorations suspendues ne suffisent pas à rendre Strasbourg jolie à mes yeux. En revanche, dès que nous apercevons le sapin, je me dois d'admettre qu'il est plutôt réussi.

— Trente-et-un mètres de haut, le bestiau !

Nous nous jaugeons, percevant le potentiel sous-entendu en-dessous de la ceinture, et nos sourires espiègles s'accordent.

Il attrape mon menton pour me forcer à détourner le regard et admirer les lumières.

— Concentre-toi, souffle-t-il à mon oreille.

Mais c'est sur son corps collé dans mon dos, et sa bouche si proche de mon cou, que je suis pleinement concentrée.

Ce mec me fait rire et me file des frissons, il est officiellement le nouveau danger de ma vie.

— Attends, bouge pas.

— Si tu me fais le coup du père qui part au tabac du coin, je...

— Aucune chance, Cléo. Te laisser passer serait la plus grosse erreur d'un homme. Je reviens.

Il agrémente sa promesse d'un clin d'œil.

Au pire, je ne suis qu'à quelques mètres de l'appartement d'un ancien plan cul, je saurai rebondir si la soirée s'avère décevante.

Mais je n'en ai nul besoin : après cinq minutes, Johan est bel et bien de retour, un cornet de churros à la main.

— La dégustation manquait de dessert. Madame ?

Mimant une courbette, il tend le bras afin que je me serve.

— Oh, mais... Merci ! Les stands sont fermés pourtant, je...

— À peine, et j'ai des contacts. Une portion nous attendait, de toute façon.

Attendrie, je le contemple.

Quel plus beau spectacle que les illuminations.

Je croque dans un churros saupoudré de sucre, savoure le goût inédit de la galanterie. Elle rythme le reste de la soirée, alors que nous sillonnons le centre-ville pour remonter à ma voiture, en passant par les places phares de la capitale européenne. Nos bariolés détours sont incohérents et témoignent juste de notre incapacité à nous dire au revoir. Cette même incapacité qui l'amène à louper le dernier tram, qui me conduit à le ramener chez lui (à seulement cent quatre-vingt mètres de la résidence où vit ma grand-mère paternelle depuis six mois), qui nous pousse à squatter son canapé (où trônent deux exemplaires de la peluche que je voulais acheter il y a une semaine) en discutant, puis devant un film (durant lequel je m'autorise à lui rendre de la tendresse), et ce jusqu'à six heures du matin.

— T'as aimé ? interroge-t-il au générique de fin, alors que ma tête repose sur sa large épaule.

Je me redresse, ce qui le fait suspendre les caresses de ses doigts sur mes bras.

— J'ai détesté ! me révolté-je. Quelle idée, un film d'horreur. On aurait dû mettre un feuilleton de Noël !

Voilà que j'aime ça à nouveau ?

— Overdose de Santa Klaus, désolé ! Mais pour sortir encore plus de l'univers, je peux te proposer ma série préférée, elle est pas hyper connue mais je l'adore, c'est Supernatural.

À mes ToujoursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant